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Comme chaque année, une fois la programmation du Festival d’été de Québec dévoilée, on scrute, on analyse, on décortique, on la compare aux précédentes, en accordant une valeur prépondérante aux têtes d’affiche sur la grande scène des plaines d’Abraham. Normal, mais encore : qu’en est-il de sa contre-programmation ? Étude de cas avec la cohorte antillaise animant la place George-V, et les vieux rockeurs de Def Leppard en tête d’affiche des plaines d’Abraham.
La contre-programmation est un jeu d’équilibre. Le yin et le yang de l’affiche festivalière. L’art d’opposer deux propositions musicales si différentes, mais attirantes, que le spectateur se retrouve devant un heureux dilemme : Pour Some Sugar on Me, ou Guantanamera ? Nous avons tranché : ce sera la Jamaïque et Haïti, du côté de la place George-V, avec le cofondateur des Fugees et les DJ Protoje et King Cruff. Tant pis pour les anciens champions du Combat des clips sur (feu) Musique Plus, qui ont rempli les Plaines, malgré la pluie.
« Si j’ai encore l’énergie, passé cinquante ans ? » Wyclef Jean a répondu à sa propre question en sautant partout sur scène au rythme de Jump Around, classique de House of Pain, millésimé 1992.
Le concert de l’hyperactif musicien a, dès Ready or Not (de son groupe The Fugees, 1996), pris la forme d’un DJ set, l’auteur-compositeur-interprète américain aux racines créoles et ses accompagnateurs (batteur, bassiste, DJ, quatre danseuses dans leur costume de carnaval à paillettes) enfilant les unes dans les autres les succès de son groupe, ses propres succès solo, et ceux des autres, qu’il a fréquemment échantillonnés d’ailleurs — Killing Me Softly de Roberta Flack recyclée avec les Fugees, Stayin’Alive des Bee Gees sur We Trying to Stay Alive, tirée de son album classique The Carnival (1997).
Tantôt à la guitare électrique, au contrôle des platines ou assis derrière la batterie, Jean ne tenait pas en place. Aux autres, sur scène ou devant, de tenter de le suivre dans ce généreux mélange de succès rap, pop, funk, reggaeton — il a évidemment joué un bout de son immanquable duo avec Shakira, Hips Don’t Lie, enfilé après sa version de Guantanamera, chantée celle-là sur le riddim Dembow, la graine qui a germé pour donner le fruit du reggaeton.
Autour de 20 h, après l’agréable performance multigenre (dancehall, pop, afrobeats) du Torontois aux racines jamaïcaines King Cruff, Protoje et son selector Tippy I Grade ont offert une leçon de dub, le premier s’exprimant sur les grooves du second, qui manipulait en direct les lignes de basses et les percussions préenregistrées avec sa console de mixage et ses boîtes d’effets.
Son répertoire, déjà plus de quinze ans de hits new roots et dancehall (l’immense Kingston Be Wise de 2012, pour ne nommer qu’elle), gagnait ainsi en profondeur, réinterprété par Tippy I Grade. Du gros son lourd : les basses ont voyagé encore plus loin sur Grande Allée en raison du taux d’humidité ambiant, une touche tropicale additionnelle à cette performance d’apparence simple, mais exécutée de main de maître, une dub session à la manière de King Tubby, pionnier du genre, comme l’a souligné Protoje, la voix cuivrée et tout en retenue.
Au-dessus de nos têtes, un épais couvert gris, mais inoffensif ; en fin d’après-midi cependant, la Haute-Ville semblait déserte, et pour cause, puisqu’il pleuvait des cordes. Lorsque l’autrice-compositrice-interprète électro-hyper-pop Virginie B. a balancé ses premiers rythmes à 18 h, il ne tombait plus que des ficelles, mais amplement pour rebuter les festivaliers. Virginie et ses trois musiciens ne se sont pas démontés pour autant, même si nous n’étions qu’une cinquantaine de spectateurs attentifs pour la voir, sur la scène érigée à un jet de pierres de l’Assemblée nationale. Sur scène, cette fille possède un charisme à nous faire oublier le déluge.
Lequel, après plus de deux heures d’accalmie, a fini par reprendre vers 22 h, alors que, côté place George-V, Wyclef Jean était descendu dans la foule pour interpréter sa plus récente chanson, Back from Abu Dhabi, collaboration avec Rick Ross et French Montana. « Fuck rain ! » a-t-il scandé, sommant le public de l’imiter. À ce stade de la performance, une petite pluie n’allait éteindre personne. Nous n’étions pas sur les plaines pour voir Def Leppard, mais sur l’oasis antillaise du FEQ, ce fut la fête.
Le Festival d’été de Québec, on le répétera, se targue d’en offrir pour tous les goûts musicaux, comme en témoigne l’éclectique affiche qu’on nous concocte depuis maintenant 57 éditions. Cette année sur la grande scène des plaines d’Abraham, de Rod Stewart en ouverture jeudi à la star portoricaine Farruko en clôture le dimanche 13 juillet, en passant par les vétérans du thrash metal Slayer, le 11 juillet, ou la fratrie acadienne Salebarbes ce soir, qui pourraient à leur tour devoir faire les frais d’une soirée frisquette et humide.