Les baleines noires commencent à peine à arriver dans le Saint-Laurent cette année et déjà, un individu de cette espèce en voie de disparition a été repéré empêtré dans le parc marin du Saguenay—Saint-Laurent. On ignore pour le moment s’il sera possible de libérer l’animal.

La baleine en question a d’abord été observée mardi et Pêches et Océans Canada (MPO) a confirmé mercredi en fin de journée la présence de cette baleine noire empêtrée dans un engin de pêche dans le parc marin du Saguenay―Saint-Laurent, près de la rive nord de l’estuaire.

« Les efforts visant à relocaliser la baleine, qui sont déployés par le MPO, Parcs Canada et nos partenaires d’intervention auprès des mammifères marins se poursuivent. Si la baleine est retrouvée, et que les conditions météorologiques et maritimes le permettent, tout effort sera tenté pour la libérer des engins de pêche dans lesquels elle s’est empêtrée », a expliqué MPO, par voie de communiqué.

Ce genre d’opération est toujours risquée pour les sauveteurs, en raison du caractère très agressif des baleines noires lorsqu’elles sont empêtrées. Un sauveteur est d’ailleurs décédé en 2017 en tentant de libérer une baleine adulte dans le golfe du Saint-Laurent au large de Shippagan, dans la péninsule acadienne.

L’an dernier, une jeune baleine noire avait aussi dû être libérée dans les eaux de l’estuaire, mais il arrive que des baleines empêtrées ne sont pas repérées de nouveau, comme ce fût le cas l’an dernier dans le Saint-Laurent. Pas moins de cinq baleines noires ont été observées empêtrées.

Menace

Pour le moment, il est impossible de dire si cette baleine s’est empêtrée dans un engin de pêche dans le Saint-Laurent où si elle s’est empêtrée en eaux américaines avant de poursuivre ainsi sa migration printanière vers les eaux du golfe et de l’estuaire du Saint-Laurent.

Les empêtrements constituent une menace directe à la survie de cette espèce, qui est passée très près de la disparition après avoir été exterminée par la chasse commerciale. Plus de 80 % des adultes de l’espèce portent des marques d’empêtrements. Ceux-ci peuvent blesser l’animal, l’empêcher de se nourrir et causer sa mort.

À titre d’exemple, pratiquement toutes les femelles qui avaient donné naissance lors de la saison 2023-2024 avaient déjà été victimes de plus d’un empêtrement, selon les données du New England Aquarium. L’une de ces femelles avait même été empêtrée à huit reprises au cours de sa vie.

Les chercheurs du New England Aquarium estiment d’ailleurs qu’il est possible, dans certains cas, que des femelles qui ont subi un empêtrement dans des engins de pêche ne soient pas en mesure de se reproduire, en raison des répercussions importantes sur leur condition physique. Et selon un rapport de l’Institut océanographique Woods Hole, 85 % des décès de baleines noires entre 2010 et 2015 étaient imputables à des empêtrements.

Ce genre de situation est d’autant plus préoccupante que les baleines noires sont de plus en plus nombreuses à fréquenter le golfe du Saint-Laurent, du printemps à l’automne, après avoir en bonne partie déserté des zones comme la baie de Fundy. Ce phénomène pourrait être lié au réchauffement climatique, qui modifie la distribution de la nourriture.

Ses habitats d’alimentation, de migration et de mise bas se trouvent donc dans des zones d’activité humaine (pêche, trafic maritime commercial et navigation de plaisance), notamment le long de la côte est américaine.

Déclin

L’espèce compte environ 370 individus, tout au plus, dont moins de 100 femelles en âge de se reproduire. Des efforts de protection avaient pourtant permis de faire augmenter la population à environ 500 individus en 2010. La situation s’est toutefois aggravée, notamment en raison d’une mortalité exceptionnelle. En 2017, pas moins de 17 baleines noires adultes ont été retrouvées mortes, dont 12 en eaux canadiennes.

C’est d’ailleurs à la suite de ces décès que le fédéral a mis en place des mesures de protection de l’espèce dans le golfe du Saint-Laurent. En plus des limites de vitesse qui peuvent être imposées aux navires, des zones de pêche peuvent être fermées en cas de présence de baleines noires.

La baleine noire peut atteindre une taille de 18 mètres, pour un poids de plus de 60 tonnes. Chaque individu est reconnaissable aux taches blanches uniques qu’il porte sur la tête, appelées callosités. Il s’agit d’une espèce qui se nourrit essentiellement de copépodes, de petits crustacés qu’elle filtre à l’aide de ses fanons.