Le 25 mai 1816, un beau voyageur ténébreux descend à l’Hôtel de Sécheron, à Genève. Il est jeune et manie l’ironie comme une arme. Il boite. Dans le registre, il indique être né cent ans auparavant. Voici le baron George Gordon Noel Byron, dit Lord Byron. Cheveux bouclés, taille élancée, redingote très ajustée, c’est un Apollon au visage pâle et fantomatique. On le surnomme «Sa majesté satanique» et les femmes s’évanouissent à son approche. Les rumeurs les plus extravagantes courent à son sujet, dans la perfide Albion: il aurait
assassiné une maîtresse et se servirait de son crâne comme d’un calice.
1816 est une année sans été. A cause de l’éruption volcanique du Tambora, en Indonésie, survenue en 1815, le ciel demeure voilé d’un manteau de cendres. Le climat se refroidit, provoquant des famines, y compris en Suisse, des pluies incessantes, de violents orages… C’est dans cette atmosphère de fin du monde que celui que l’on surnomme le «diable boiteux» débarque sur le continent. A l’Hôtel de Sécheron, il rejoint ses amis Percy et Mary Shelley. Cette dernière écrira, ce même été funeste, sur les rives du Léman, le roman Frankenstein.