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Ils sont nombreux, ces citoyens qui ont des opinions à micro fermé, mais qui, pour diverses raisons, refusent de les partager une fois que la caméra est allumée.
Un micro-trottoir, ou un vox pop, est une pratique qui consiste à interroger des gens, la plupart du temps dans la rue, pour recueillir des opinions sur un sujet donné.
Pour Francine Belliveau de Dieppe, vu que les micros-trottoirs arrivent bien souvent de manière imprévue, certains rechignent à parler à la caméra parce qu’ils ne se sont pas préparés et ne sont pas certains de pouvoir répondre correctement aux questions.

Francine Belliveau réfléchit souvent à deux fois avant de répondre aux questions des journalistes.
Photo : Bader Ben Amara
Elle note également une crainte liée à la manière dont certaines opinions peuvent être perçues.
Tu ne sais jamais comment les gens vont prendre les choses. Puis, tu ne veux pas te mettre dans une situation ou quelqu’un aurait entendu quelque chose qui n’aurait pas été justifié comme tu l’aurais voulu, explique-t-elle.
Moi je sais que des fois je me restreins de répondre à des choses, parce que tu ne sais jamais comment les gens vont prendre les choses au jour d’aujourd’hui.
Cette inquiétude qui peut pousser des gens à garder pour eux leurs opinions, Nat Goguen la comprend tout à fait.

Contrairement à d'autres, Nat Goguen n'a pas peur d'exprimer publiquement ses opinions.
Photo : Bader Ben Amara
Iel estime que la caméra peut donner de trop grandes proportions à certaines prises de parole.
Quand ça vient aux médias sociaux, les gens ne sont pas très gênés de donner leurs opinions. C’est vrai que peut-être quand il y a une caméra en avant de leur face, il y a plus de visibilité, explique Nat Goguen.
Moi personnellement je n’ai pas peur de dire mes opinions.
Hésiter à prendre la parole dans un pays démocratique
Si Jacqueline et Donald Kenny comprennent que des gens puissent être inquiets à l’idée que leur opinion suscite des réactions négatives, ils pensent cependant qu’il est essentiel, d’un point de vue démocratique, que l’on entende des opinions variées dans les médias.
Moi j’apprécie ça quand on demande les opinions des gens, comme ça, en sortant de l’épicerie ou ailleurs parce qu’on a le son de cloche de la communauté, indique Mme Kenny.

Jacqueline et Donald Kenny aiment entendre les voix citoyennes dans les médias.
Photo : Bader Ben Amara
Si on n’émet pas d’opinion, on ne peut pas se plaindre par la suite, affirme M. Kenny. Et Mme Kenny de renchérir c’est comme pour aller voter, si tu ne vas pas voter, plains-toi pas.
Sans avoir un avis aussi tranché, Gabriel Arsenault, politologue à l'École des hautes études publiques de l’Université de Moncton, estime qu’il est important de recueillir la parole citoyenne.
Fondamentalement, c'est une façon pour les journalistes [...] de voir que ce que les gens ordinaires, les non-experts, pensent de différents sujets. Et ça, c'est une démarche essentielle, explique-t-il.

Gabriel Arsenault comprend les craintes qu'éprouvent certains à participer à des vox pop.
Photo : Kenneth Hébert
Il cite au passage un extrait de Politique, un ouvrage du philosophe grec Aristote qui, de son point de vue, rend essentielle la pratique du vox pop.
Connaître une maison par exemple, ce n'est pas seulement le fait de celui qui l'a construite, mais celui qui s'en sert en juge mieux que lui, lit-il.
Pour les questions de politique publique, les experts ont une perspective, mais les citoyens qui font l'expérience de ces politiques en jugent mieux qu'eux, en jugent mieux que les experts.
Parler avec tous les moyens à notre disposition
Bien qu’il considère la parole citoyenne comme essentielle, Gabriel Arsenault reconnaît qu’il n’est pas toujours évident pour les journalistes et, accessoirement, ajoute-t-il, les chercheurs en sciences sociales, de la recueillir, compte tenu des craintes que peuvent avoir le public.
On peut avoir des positions qu'on n'est pas prêts à défendre en public parce que les coûts au niveau personnel seront trop élevés. C'est malheureux là, mais ça, c'est la situation, explique-t-il.
Il faut avoir de l'empathie pour les gens qui, de façon totalement compréhensible, veulent éviter de s'attirer ces foudres-là.
Professeure de journalisme à la retraite, Marie-Linda Lord affirme que dans des régions comme le sud du Nouveau-Brunswick, où le français est minoritaire, les francophones doutent parfois de leurs aptitudes linguistiques et craignent de mal paraître dans les médias.

Marie-Linda Lord pense que les vox pop sont des outils essentiels à condition qu'ils soient pris pour ce qu'ils sont véritablement.
Photo : Kenneth Hébert
Elle note aussi, pour s’en désoler, l’agressivité de plus en plus croissante dont font l’objet les personnes qui osent prendre la parole dans l’espace public.
On voit des réactions de certaines personnes auxquelles on était très peu exposé. Toute cette méchanceté, cette virulence, cette critique gratuite, non factuelle, non fondée, juste pour faire du mal, [...] être malveillant, déplore-t-elle.
Il y a des gens qui restent courageux à exprimer leur opinion, puis à assumer les contrecoups s'il y en a, alors qu'il y en a d'autres qui savent déjà que non, moi je ne veux pas vivre ça.
Malgré cela, elle pense que le vox pop est un exercice essentiel. Elle ne souhaite cependant pas qu’on lui fasse jouer un rôle qui n’est pas le sien, un risque qui existe avec les chaînes d’information en continu qui ont sans cesse faim de contenus.
Une « Voix du peuple »
Ainsi, peu importe qu’il porte sur un sujet culturel, politique, économique ou de société, il ne doit pas, affirme-t-elle, être considéré comme un exercice scientifique, sachant qu’il n’est d’ailleurs la plupart du temps pas représentatif.
Souvent, on dit que ce n'est pas représentatif parce qu'on est dans des endroits publics. Il y a des franges de la population qui sont moins présentes dans des endroits publics et le trottoir, par exemple, de la rue principale d'une municipalité, explique-t-elle.
Il faut voir les vox pop non pas comme La Voix du peuple, mais en fait c'est une Voix du peuple. C'est un peu comme une photo qui est prise à un moment donné à un endroit donné sur un sujet donné.
Mme Lord indique que les micros-trottoirs ne doivent pas chercher à créer la nouvelle, ils doivent plutôt arriver en complément de nouvelles encadrées, fondées et vérifiées qui existent déjà.

Sasha Boucher pense qu'il faut pouvoir s'exprimer de toutes les façons possibles.
Photo : Bader Ben Amara
Quoi qu’il en soit, et, peu importe l’importance qu’on leur donne, le micro-trottoir est, selon Sasha Boucher, résident de Dieppe, un outil démocratique d’importance puisqu’il permet aux citoyens d’exprimer leurs opinions, même si cela ne vient pas toujours sans risque.
C’est la fondation de la démocratie que les gens peuvent se prononcer et dire ce qu’ils pensent [...] il faut qu’on parle avec nos votes, parle avec nos voix, parle avec tous les moyens qu’on a à notre disposition, explique-t-il.