« Vous avez ma parole. » Face à l’insalubrité, à la moisissure et aux inondations à répétition qui rongent les immeubles de l’avenue Bergamot, dans le quartier Rexdale de Toronto, la mairesse Olivia Chow promet que les choses vont changer. « Cette situation est moins que parfaite, mais elle s’améliora », lance-t-elle, alors que les locataires, excédés, dénoncent ces « conditions déplorables ».

Invitée par les locataires, la mairesse s’est rendue au bloc appartement samedi pour constater les dégâts sur place. Chaque fois qu’elle voyait un problème, son assistante le prenait en note. Au-delà de la performance artistique pour les caméras, c’était une façon pour Mme Chow de démontrer qu’elle prenait le dossier au sérieux.

Le programme municipal d’inspection RentSafeTO vise à améliorer les conditions dans les immeubles d’habitation de Toronto. Or, selon la vérification la plus récente, les immeubles de l’avenue Bergamot ont reçu en moyenne une note de 90 %.

Ça n’a pas l’air d’un édifice avec une note de 90 % à mes yeux.

La mairesse Chow s’engage notamment à embaucher davantage d'agents chargés d'inspecter les logements.

La compagnie qui possède les immeubles, Pinedale Properties, n’a pas répondu à notre demande d’entrevue.

La mairesse Olivia Chow promet des améliorations à venir au sein des immeubles sur l'avenue Bergamot dans le quartier Rexdale.

Photo : Radio-Canada

Dans un communiqué, l’association de défense des droits des locataires ACORN soutient que des locataires dénoncent depuis longtemps les conditions déplorables auxquelles ils sont confrontés aux appartements du 9 au 27 avenue Bergamot.

Certains ont parlé d'infestations continues de blattes, qui couvrent les plafonds, les sols et tout ce qui se trouve entre les deux, déplore le groupe.

ACORN réclame donc une réforme du système municipal et a fait une trentaine de demandes à la Ville.

Elle veut notamment que les évaluations faites par les inspecteurs municipaux couvrent non seulement les aires communes des immeubles, mais aussi les problèmes à l'intérieur des logements.

Des inondations à répétition

Greg Desgroseilliers vit dans un des logements de l’avenue Bergamot. La buanderie commune des immeubles se trouve juste derrière la cuisine de son appartement. Pendant des années, chaque fois que quelqu’un faisait sa lessive, son appartement était inondé par l’eau sale.

Greg Desgroseilliers raconte que le propriétaire de l'immeuble, Pinedale Properties, n'a jamais réparé les problèmes de plomberie dans la buanderie commune. Résultat: son appartement était inondé chaque fois qu'un résident utilisait la laveuse.

Photo : Radio-Canada

Il appelait son propriétaire, Pinedale Properties, pour qu’il fasse les réparations nécessaires. Mais ce dernier ne faisait que des travaux de surface sur son plancher, sans toutefois s’attarder sur les problèmes de plomberie, raconte le locataire.

Je me sentais comme si c’était un combat perdu d’avance.

Finalement, M. Desgroseilliers a pris les grands moyens : il a arraché son parquet de bois et peint le béton en dessous.

Greg Desgroseilliers a finalement retiré le parquet de bois de son plancher et peinturé le béton pour plus facilement passer la vadrouille.

Photo : Radio-Canada

C’est plus facile de simplement passer la vadrouille plutôt que de demander à chaque fois au propriétaire de réparer le bois, lâche-t-il.

Depuis quelques années, les locataires ont cessé d’utiliser la buanderie commune, en raison des inondations à répétition.

On se rend désormais à la laverie automatique sur Islington pour faire notre lessive, déplore-t-il.

M. Desgroseilliers fait partie d’un groupe de locataires dans les immeubles de l’avenue Bergamot qui ont depuis formulé une liste d’une trentaine de demandes aux propriétaires.

Ils demandent entre autres l’entretien mensuel de la buanderie commune et l’installation de portes automatiques accessibles aux fauteuils roulants.

Les locataires voudraient également que la pondération des évaluations municipales de RentSafeTO soit revue. En ce moment, un ascenseur hors service et le gazon qui n’est pas coupé sont évalués au même niveau, c'est-à-dire qu'ils ne font tous les deux perdre qu’un point au propriétaire de l’immeuble.

Des améliorations aux frais des locataires

Selon des documents obtenus par l’association ACORN, Pinedale Properties a par le passé demandé aux locataires de payer pour leurs propres réparations dues à l’usure normale.

Par exemple, le propriétaire a demandé à un locataire de payer 398,33 $ pour un nouveau frigo en septembre 2024. Or, le nouveau frigo reste la propriété de Pinedale Properties. La locataire a donné son accord.

La présidente du chapitre torontois de ACORN, Monique Gordon, vit depuis 13 ans dans un des appartements de l’immeuble. Elle dit avoir subi de l’intimidation de la part du propriétaire pour avoir dénoncé publiquement les nombreux problèmes du logement, notamment en ce qui concerne la plomberie et l'absence de contrôle de la température.

Monique Gordon dit qu'elle se fait intimider par le propriétaire de l'immeuble en raison de ses multiples plaintes et demandes de réparations.

Photo : Radio-Canada

Mme Gordon indique avoir d'ailleurs reçu un avis d'expulsion pour la mi-juillet, mais qu'elle comptait se battre pour rester.

Le conseiller municipal Vincent Crisanti, qui représente le secteur où se trouvent les immeubles, encourage les locataires à rester unis et à continuer à s'exprimer. Il ajoute que son bureau s’engage dans la recherche d'améliorations.

Pour sa part, Mme Chow répète que si la société n'apporte pas d'améliorations aux immeubles, la Ville interviendra pour effectuer les travaux, puis enverra la facture à la société.

Avec des informations de Lounan Charpentier