Des commerçants et entrepreneurs à l’Île-du-Prince-Édouard se préparent au pire, avec une possible grève de Postes Canada, qui débuterait vendredi.

Kristell Geffroy est la propriétaire de la boutique de linge Swenn, à Charlottetown. Elle croit qu’une autre grève du service postal pourrait avoir des effets graves pour les petites et moyennes entreprises (PME).

C’est sûr qu’il y a un coût financier pour les entreprises, dit-elle. On doit trouver des solutions qui sont forcément plus onéreuses, et on se retrouve à devoir payer pour rassurer les gens et s’assurer qu’ils puissent recevoir leurs commandes quand même.

Bien que Kristell Geffroy ait eu besoin de gérer une grève similaire en novembre et décembre dernier, elle croit que celle-ci sera différente.

À Noël, les gens voulaient vraiment faire des cadeaux, donc peut-être qu’ils trouvaient quand même des solutions, explique-t-elle. Mais là, vu qu’on n'est pas en période de Noël, je pense que les gens ne vont juste pas acheter en ligne.

Depuis la fin de la première grève, elle a commencé à se fier à d’autres systèmes de livraison, en plus de Postes Canada.

Elle estime qu’actuellement, 20 % de ses ventes se font en ligne.

Coup dur pour le journal francophone

Marcia Enman, la directrice générale du journal communautaire La Voix acadienne à l’Île-du-Prince-Édouard, explique qu'il est quasi impossible pour son journal d’opérer sans Postes Canada.

Ça m’inquiète, parce que les gens tiennent à leur journal. Ils tiennent à l’avoir [par courrier] dit-elle.

Marcia Enman, directrice générale de La Voix acadienne, le 2 mars 2023 à Wellington, à l'Île-du-Prince-Édouard.

Photo : Radio-Canada / Gabrielle Drumond

Elle explique que pour le moment, elle offrira le journal gratuitement sur le site internet de La Voix acadienne.

Si la grève persiste longtemps, elle prévoit potentiellement livrer le journal elle-même.

L'Atlantique plus dépendante de Postes Canada

Frédéric Gionet, directeur des affaires législatives la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI) à l’Île-du-Prince-Édouard et en Atlantique, explique que 79 % des membres de la FCEI emploient les services de Postes Canada dans leurs activités quotidiennes.

Les entreprises les utilisent notamment pour envoyer et recevoir les paiements, factures, fournitures et produits.

Selon la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, les services de livraison de Postes Canada sont encore plus nécessaires en zone rurale. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Guy LeBlanc

Postes Canada est quand même assez important dans notre région, dit-il. Et [pour certaines personnes] encore plus dans les régions rurales de l’Île-du-Prince-Édouard.

Similairement à ce que Kristell Geffroy disait, le représentant de la FCEI explique que plusieurs des membres se tournent vers des services qui ne sont pas publics, ce qui peut s'avérer être plus dispendieux et faire en sorte qu’ils perdent confiance en Postes Canada.

Après quelques [grèves], c’est certain que les méthodes alternatives peuvent devenir plus permanentes , croit Frédéric Gionet.

On ne va pas changer de fournisseur de livraison 50 fois dans une année.

Selon un sondage auprès des membres de la FCEI, environ 86 % des PME dans les provinces atlantiques sont plus dépendantes de Postes Canada que la moyenne.

Frédéric Gionet avance que la confiance des entrepreneurs envers Postes Canada pourrait être minée. (Photo d'archives)

Photo : CBC / Tony Davis

À l’Île-du-Prince-Édouard, ce nombre est d’un peu plus de 93 %, mais l’échantillonnage est un peu plus limité.

Au niveau national, les PME dans les secteurs des ressources naturelles, de l’agriculture et des services sociaux sont ceux qui utilisent Postes Canada le plus.

Enfin, un peu plus de la moitié des répondants disent se sentir forcés de trouver des services alternatifs plus coûteux.

Environ les trois quarts des PME prévoient recevoir des paiements en retard, et 41 % prévoient des problèmes d’approvisionnement de produits.