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Islamabad a pris une position claire, samedi 14 juin, en exprimant son soutien total à Téhéran et en appelant les pays musulmans à s’unir face à ce qu’elle qualifie « d’agression israélienne injustifiée ».

Ce samedi 14 juin, le ministre de la Défense pakistanais Khwaja Asif a invité les nations musulmanes ayant des relations diplomatiques avec l’État hébreu – entre autres l’Egypte et la Turquie – à les rompre immédiatement. Il a également demandé la convocation d’une réunion urgente de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) pour élaborer une stratégie commune. L’OCI regroupe les 57 pays musulmans de la planète. La Russie, qui compte jusqu’à 20 % de musulmans selon certaines sources, y bénéficie du statut de « pays observateur ».

Devant les députés pakistanais, le ministre de la Défense Khwaja Asif a averti : « Israël a ciblé l’Iran, le Yémen et la Palestine. Si les pays musulmans ne s’unissent pas maintenant, chacun subira le même sort ».

Le ministre a également mis en avant les liens étroits entre le Pakistan et l’Iran, assurant que son pays se tiendrait aux côtés du régime des mollahs. « Nous soutenons l’Iran et le défendrons dans toutes les enceintes internationales pour protéger ses intérêts », a assuré Khwaja Asif.

Le vice-Premier ministre de la diplomatie pakistanaise Ishaq Dar avait déjà qualifié, ce vendredi 13 juin, l’attaque israélienne de « violation flagrante de la souveraineté iranienne » et exprimé « la solidarité du Pakistan avec le peuple et le gouvernement iraniens ». Dans la foulée, il s’était entretenu par téléphone avec le ministre iranien des Affaires étrangères, Seyed Abbas Araghchi.

Une annonce qui tranche avec cette déclaration ce lundi du président Donald Trump au sujet d’un « accord de paix historique » entre Israël et l’Arabie saoudite, marquant « une avancée diplomatique majeure au Moyen-Orient » : « Je suis fier d’annoncer que nous avons conclu un accord de paix complet entre Israël et l’Arabie saoudite. C’est un jour historique pour le monde« , a déclaré Trump lors d’une conférence de presse ce lundi à la Maison Blanche.

L’entrée en lice du Pakistan change considérablement la donne pour Israël et le camp occidental dans la mesure où la république islamique est officiellement détentrice de l’arme nucléaire. C’est le septième pays du monde à réussir à développer et tester des armes nucléaires et le seul pays musulman à en posséder. Son programme nucléaire militaire débute dans les années 1970 en réponse au programme indien. Selon le Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI), un institut international indépendant dédié à la recherche sur les conflits, les armements, le contrôle des armements et le désarmement, le Pakistan peut aligner entre 250 et 300 ogives nucléaires.

La Chine a fourni les plans de l’arme nucléaire et des matériaux fissiles au Pakistan et continuer à l’aider dans son programme d’armement à la suite d’un accord secret de coopération nucléaire en 1976. Un état de fait qui explique la discrétion d’Islamabad sur le problème ouïghour…

L’Arabie saoudite, la Jamahiriya arabe libyenne (pour 200 millions de dollars dans les années 1970) et l’Iran du temps du Shah ont soutenu économiquement le programme nucléaire pakistanais. La Corée du Nord et le Pakistan ont collaboré dans le domaine nucléaire et balistique.

À partir de 1984, la république islamique d’Iran, alors en guerre avec l’Irak, va s’orienter vers une approche de partage de technologie atomique avec Islamabad.

En 2013, un article de la BBC allègue que l’Arabie Saoudite a acheté et payé le droit d’utiliser des armes nucléaires, qui pour l’instant resteront stationnées au Pakistan.

Le Pakistan possède des vecteurs terrestres d’une portée de 2500 km, destinée au théâtre indien et insuffisante pour atteindre Israël. Il possède également des bombardiers stratégiques F-16A et F-16B qui pourraient compter sur la logistique iranienne pour atteindre l’Etat hébreu.

La marine pakistanaise a créé un « commandement de la force navale stratégique » en inaugurant, le 19 mai 2012, des locaux de ce nouvel état-major chargé des armes nucléaires de la marine, confirmant une version sous-marine du missile de croisière Babur/Hatf 7 capable d’être emporté par les Agosta. La marine pakistanaise dispose en 2015 de cinq sous-marins : deux Agosta 70 (PNS/M Hasmat et Hurmat, entrée en service en 1979) dont l’installation de système anaérobie (AIP) est en cours fin 2012 et trois Agosta 90B (PNS/M Khalid, Saad et Hamza). En avril 2015, le gouvernement pakistanais annonce son intention d’acquérir huit sous-marins S-20 dérivés du type 039A chinois.

Selon le SIPRI, Israël possède de son côté entre 80 et 400 ogives nucléaires. L’État hébreu, qui refuse de reconnaître l’existence de son programme nucléaire militaire, ne possède pas de sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE), mais ses sous-marins diesel-électriques de classe Dolphin sont probablement équipés de missiles de croisière navals (SLCM) à capacité nucléaire. Ces sous-marins sont considérés comme ayant la capacité théorique de transporter une charge nucléaire.

Quoi qu’il en soit, si l’Etat hébreu a la capacité d’empêcher l’Iran d’acquérir l’« arme suprême », il ne saurait éradiquer les capacités nucléaires du Pakistan. Quelques bombes atomiques de moyen tonnage suffiraient par ailleurs à vitrifier les zones urbaines situées sur les 22 000 km² d’Israël – quatre départements français. Une superficie à comparer avec celle du Pakistan, 880 000 km², 40 fois plus. Il est d’autre part évident que les Etats-Unis ne laisseront jamais leur « allié indéfectible » seul face à une menace d’annihilation. Le Pakistan et ses alliés – Chine, Russie – en sont parfaitement conscients, ce qui devrait calmer le jeu…

Henri Dubost