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Chapeau bas aux programmateurs du Festival international de jazz de Montréal, qui ont choisi de clore la 45e édition de l’événement samedi soir avec le plus pointu concert de jazz présenté ces derniers jours sur la place des Festivals. Ils ont remporté leur audacieux pari : l’Américaine esperanza spalding a captivé par sa voix, son jeu expert, son charisme, et sans doute par moments un peu confondu le public avec ses envolées jazz fusion accompagnées par les gestes de deux danseuses.
Arrivant sur scène à 21 h 30, spalding s’est non pas dirigée vers sa contrebasse, mais au piano à queue. Blang ! Blang ! Sa main gauche piochant des accords, elle s’est adressée au public : « C’est le week-end de la fête de l’Indépendance » aux États-Unis, a-t-elle rappelé avant de nous proposer de profiter du concert pour s’affranchir de ce qui nous oppresse. Mettons au bûcher tout ce qui ne tourne pas rond — elle n’a pas eu besoin de les nommer, nous savions de quoi, de qui, elle parlait.
« On brûle ! », scandait-elle avant d’interpréter I Want Now, une des chansons composées pour le film Willy Wonka & The Chocolate Factory (l’original, avec Gene Wilder sous le haut-de-forme, paru en 1971) qu’elle avait endisquée sur Emily’s D+Evolution, paru il y a neuf ans. La voix est puissante et juste, ses accompagnateurs (dont le Torontois d’origine Matthew Stevens, qui passe de la guitare à la basse électrique lorsque spalding s’installe au piano) jouent avec la même envie de mettre le feu à cette place des Festivals.
Empoignant ensuite sa contrebasse, la musicienne reprend Ponta de Areia, chanson de Wayne Shorter et Milton Nascimento (de leur album collaboratif Native Dancer, 1975), manière d’évoquer son récent duo avec la légende brésilienne — et de donner, tôt dans le spectacle, l’impression de danser autour du brasier. Son solo à la contrebasse a fait des flammèches !
La suite sera nettement plus sophistiquée. Complexe, mais jamais hermétique : esperanza spalding a cette faculté de faire avaler au public ses déflagrations jazz fusion en les présentant avec le sourire, désamorçant complètement le caractère cérébral de la musique. Comme lorsqu’elle chantait l’air de Willy Wonka, son jazz fusion sonne comme des show tunes, façon Weather Report se produisant sur Off-Broadway.
La musicienne a ensorcelé les festivaliers, enchaînant avec 12 Little Spells, de l’album du même nom (2018), les deux danseuses de son quintette quittant leurs micros, derrière le piano, pour aller s’exprimer au-devant de la scène. Ses récentes recherches, nous expliquait-elle en entrevue, visent à rétablir le dialogue entre musiciens et danseurs jazz, à développer un nouveau langage commun permettant à chacun d’échanger, d’improviser sur scène. Cette conversation, d’abord entre Stevens et une danseuse, à laquelle spalding s’est jointe à la contrebasse, était fascinante.
Fascinante, quoique difficile à saisir, pour peu qu’on soit loin de la scène : même avec des écrans géants, on imagine que les spectateurs plus au sud ont eu du mal à apprécier ces improvisations musicales et gestuelles, qui se déroulaient là-bas, tout en haut. L’énergie presque rock des interprétations du quintette aura suffi, espère-t-on, pour garder cette dense foule intéressée par le spectacle de la brillante et chaleureuse musicienne qui, évitant les chansons thérapeutiques de Songwrights Apothecary Lab (2021), est plutôt allée piger loin dans son répertoire, jusqu’à ressortir I Know You Know de son deuxième album, paru en 2008.
En début de soirée au Gesù, le compositeur et pianiste Jean-Michel Blais retrouvait, sur scène cette fois, la harpiste américaine Lara Somogyi pour reproduire Désert, album collaboratif paru plus tôt cette année inspiré par les paysages du parc national de Joshua Tree, situé dans la cour arrière de la musicienne.
Un album entièrement improvisé que les deux musiciens ont dû « apprendre à jouer » pour le présenter au public, deux fois plutôt qu’une (une seconde performance était prévue en soirée), mais deux fois seulement, puisqu’aucune tournée n’est à l’agenda — à moins que l’expérience ne porte ses fruits ? Ce fut, à l’image de cet album, joli, mais très douillet, les deux musiciens se suivant pas à pas dans leurs progressions harmoniques confortables et romantiques. « C’est grosso modo la même chanson » déclinée en plusieurs mouvements pendant une heure, de chaleureux arpèges, au piano comme à la harpe (dont la sonorité était légèrement transformée par des pédales d’effets électroniques), desquels émergeaient parfois des motifs mélodiques, souvent assurés par Blais.