Alors que le Brésil est devenu l’un des marchés cibles les plus importants pour les constructeurs automobiles chinois afin d’absorber leur surcapacité en véhicules électriques (VE), les associations locales de l’industrie automobile et des travailleurs expriment des inquiétudes croissantes face à l’afflux de voitures chinoises bon marché.
Le plus grand constructeur chinois de véhicules électriques et hybrides rechargeables, BYD, a expédié quatre cargaisons de ses produits au Brésil depuis le début de l’année, totalisant environ 22.000 véhicules.
On estime qu’en 2025, les importations de véhicules complets en provenance de Chine vers le Brésil augmenteront de près de 40 % pour atteindre 200.000 véhicules, ce qui représenterait environ 8 % des immatriculations de véhicules légers dans le pays, selon la principale association automobile brésilienne.
En 2015, le Brésil a supprimé les droits de douane sur les véhicules électriques de BYD et d’autres fabricants pour promouvoir ce type de véhicules. Afin d’attirer les investissements et de développer l’industrie automobile nationale, le gouvernement brésilien a rétabli en 2024 un tarif douanier de 10 % sur les VE étrangers et prévoit de l’augmenter tous les six mois jusqu’à 35 % d’ici 2026.
Les groupes brésiliens de l’industrie automobile et des travailleurs craignent que les constructeurs chinois profitent de la période avant la pleine application des nouveaux droits de douane pour inonder le marché de véhicules, au lieu d’investir dans des usines au Brésil et de créer des emplois pour les communautés locales.
BYD a annoncé en 2023 avoir acquis l’ancienne usine de Ford dans l’État de Bahia, au Brésil. Elle devait initialement entrer en service en 2024, mais en raison d’une enquête sur des violations du droit du travail, la production complète a été reportée à la fin de 2026.
Un procureur du travail brésilien a poursuivi BYD en mai pour traite d’êtres humains, alléguant que les travailleurs chinois de son usine au Brésil vivaient dans des conditions assimilables à de « l’esclavage ».
Une autre entreprise chinoise, Great Wall Motors (GWM), a également reporté son projet d’installation d’une usine au Brésil de plus d’un an et n’a pas encore officiellement commencé la production.
Les groupes de l’industrie automobile et des travailleurs brésiliens font pression sur le gouvernement pour qu’il augmente immédiatement les droits de douane sur les VE de 10 % à 35 %, au lieu de les relever progressivement, afin de protéger l’industrie locale.
« Nous soutenons l’arrivée de nouvelles marques au Brésil pour produire, promouvoir le secteur des composants, créer des emplois et apporter de nouvelles technologies », a déclaré Igor Calvet, président de l’Association brésilienne des fabricants de véhicules automobiles. « Mais à partir du moment où un excès d’importations freine les investissements dans la production locale, cela nous inquiète. »
L’économie chinoise morose et la faiblesse de la consommation intérieure accentuent la pression sur les constructeurs chinois de VE, déjà confrontés à une surcapacité.
BYD a lancé le mois dernier une vaste campagne de baisse des prix, avec des réductions pouvant aller jusqu’à 34 % sur 22 modèles. D’autres constructeurs chinois ont dû suivre, réduisant eux aussi leurs prix. L’industrie automobile chinoise est ainsi tombée dans une concurrence interne sans précédent sur les prix.
Pour absorber cette surcapacité, les exportations automobiles chinoises ont fortement augmenté au cours des cinq dernières années. Les VE chinois bon marché ont afflué vers l’Europe, l’Asie du Sud-Est et l’Amérique latine, exerçant une pression sur les industries automobiles locales.
En réponse, les États-Unis ont imposé des droits de douane de 100 % sur les VE importés de Chine. Pour protéger son industrie, l’Union européenne a relevé ses droits de douane sur les VE chinois à 45 %.
Le Brésil devient un nouvel axe de l’expansion mondiale de la Chine dans l’automobile.
« Les pays du monde entier ont commencé à fermer leurs portes aux Chinois, mais pas le Brésil », a déclaré Aroaldo da Silva, président d’IndustriALL Brasil, une confédération syndicale regroupant six secteurs industriels. « La Chine en a profité. »
Le Brésil : porte d’entrée du marché sud-américain
« Maintenant, le monde entier se méfie du dumping massif des VE chinois. Ils craignent que leur entrée sur les marchés ne ruine les industries de VE locales », a déclaré à Epoch Times le 20 juin Li Hengqing, économiste et chercheur à l’Institut d’information et d’études stratégiques de Washington.
« Le Brésil est une tête de pont importante pour la Chine afin d’entrer sur le marché sud-américain », a poursuivi M. Li. « Ils ne peuvent pas laisser le Brésil entraîner ces pays à boycotter leurs VE. »
M. Li a souligné que l’actuel gouvernement brésilien de Lula est de gauche et proche de la Chine, et qu’« il entretient une relation très tendue avec les États-Unis ». Il prévoit que le gouvernement brésilien pourrait ne pas prendre de mesures immédiates pour limiter les VE chinois.
L’économiste indépendant chinois Leng Yan, également connu pour son programme financier indépendant « Caijing Lengyan », a déclaré à Epoch Times le 20 juin que les violations présumées des droits des travailleurs par BYD au Brésil ont en effet suscité de fortes réactions dans le pays et pourraient amener le public brésilien à s’opposer aux produits chinois. « Mais je pense que le gouvernement brésilien optera pour une mesure de compromis », a-t-il estimé.
Il a ajouté que « le gouvernement brésilien est relativement pro-Chine, et l’économie brésilienne dépend fortement de la Chine ». À titre d’exemple, il a cité l’augmentation des importations chinoises de soja brésilien pour remplacer celles en provenance des États-Unis pendant la guerre commerciale sino-américaine.
« De plus, le Brésil exporte également vers la Chine du minerai de fer, d’autres minéraux et des produits agricoles vers un marché très vaste. Le Brésil n’offensera pas facilement le gouvernement chinois », a-t-il conclu.
Luo Ya a contribué à la rédaction de cet article.
Avec Reuters
Soutenez Epoch Times à partir de 1€
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.