Une vaste opération de fouilles a été lancée ce mardi matin dans 66 prisons françaises. Les autorités ont notamment mis la main sur de nombreux mini-portables indétectables.

J.C. avec AFP - Aujourd'hui à 16:30 - Temps de lecture :

Près de 70 établissements pénitentiaires ont été visées ce mardi matin par l'opération "Prison Break". Photo d'illustration Sipa/Eliot Blondet

Près de 70 établissements pénitentiaires ont été visées ce mardi matin par l'opération "Prison Break". Photo d'illustration Sipa/Eliot Blondet

Des centaines de cellules de dizaines de prisons françaises ont été visées par un vaste dispositif de perquisitions simultanées et de saisies ce mardi matin. L'opération, baptisée ''Prison Break'' et révélée par franceinfo, a été confirmée par la procureure de Paris Laure Beccuau. Au total, plus de 500 cellules ont été fouillées, dans 66 établissements pénitentiaires répartis sur tout le territoire.

Objectif : « Saisir les téléphones miniatures mis en circulation par une société chinoise et revendus en France par le fournisseur Oportik », a détaillé Laure Beccuau. « C'est la continuité de la stratégie de fermeté carcérale que nous menons en particulier contre la criminalité organisée », a renchéri sur X le ministre de la Justice Gérald Darmanin à la mi-journée.

Ce contenu est bloqué car vous n'avez pas accepté les cookies et autres traceurs.

En cliquant sur « J’accepte », les cookies et autres traceurs seront déposés et vous pourrez visualiser les contenus (plus d'informations).

En cliquant sur « J’accepte tous les cookies », vous autorisez des dépôts de cookies et autres traceurs pour le stockage de vos données sur nos sites et applications à des fins de personnalisation et de ciblage publicitaire.

Vous gardez la possibilité de retirer votre consentement à tout moment en consultant notre politique de protection des données.
Gérer mes choix

Twitter PlaceHolder

5 000 téléphones en circulation visés

Pas une mince affaire : au total, quelque « 5 000 téléphones » mini sont en circulation, visés par cette opération dans le cadre d'une enquête ouverte pour « administration de plateforme permettant des transactions illicites » et « recel d'objet provenant d’une infraction », a détaillé la magistrate. Des appareils de plusieurs types : de simples modèles « à clapet », pour simplement passer des appels, aux smartphones les plus perfectionnés. Mais tous ont en commun d'être « miniatures »... et « vendus comme indétectables aux portiques d'entrée dans les lieux de détention », constate la procureure de Paris. 

Ils sont vendus notamment par la société Oportik, que nous avons tenté de contacter - en vain. Et pour cause ? « Le nom de domaine de la société Oportik a été saisi » ce mardi, selon la magistrate, qui ajoute que « trois fournisseurs » du site, situés « sur le territoire français » ont été interpellés.

Une dizaine de modèles disponibles

Rendu inaccessible, le site internet www.oportik.com promettait de « rester brancher » (sic - les fautes sont d'origine) : « Tous les produits présent dans notre boutique ont été testés et sont certifiés indétectable, aussi bien par les portiques de sécurité que par les détecteurs de métaux portatif. »

Capture d'écran Oportik

Capture d'écran Oportik

Exemple : le Melrose S9X, qui « possède les qualités d'un smartphone dernière génération tout en permettant une discrétion sans précédent », promettait Oportik, pour 99,90 euros pièce. La version S9+ est « le modèle supérieur » avec « 2 caméras », « un lecteur d'empreinte » et une « meilleure autonomie ».

Autres options : le GAT B25, « aussi petit que votre petit doigt ce mini-téléphone passera les portiques sans aucun problème », selon Oportik. Avec des dimensions de 68x28x12 mm pour 24,90 euros, il reste un peu plus grand que « le plus petit téléphone portable du monde » - le Long CZ clapet - vendu 34,80 euros pour des appels « en toute discrétion ». 

Le Long CZ Clapet, 34,80 euros, est à peine plus grand qu'une pièce de monnaie. Capture d'écran Oportik

Le Long CZ Clapet, 34,80 euros, est à peine plus grand qu'une pièce de monnaie. Capture d'écran Oportik

Oportik propose aussi des cartes SIM adaptée. Bouygues et SFR sont « en promo », mais Free (« libre », en anglais) n'est étrangement pas disponible. Chargeurs discrets et batteries de rechange complètent l'offre et laissent peu de doutes sur la clientèle visée : sans référence publique explicite à la prison, Oportik, sur les réseaux sociaux, diffuse des photos publiées depuis Fleury-Mérogis (Essonne), par exemple, pour vanter ses produits... Les messages « on est là » ou « des milliers de clients satisfaits » les accompagnent.

Ce contenu est bloqué car vous n'avez pas accepté les cookies et autres traceurs.

En cliquant sur « J’accepte », les cookies et autres traceurs seront déposés et vous pourrez visualiser les contenus (plus d'informations).

En cliquant sur « J’accepte tous les cookies », vous autorisez des dépôts de cookies et autres traceurs pour le stockage de vos données sur nos sites et applications à des fins de personnalisation et de ciblage publicitaire.

Vous gardez la possibilité de retirer votre consentement à tout moment en consultant notre politique de protection des données.
Gérer mes choix

Des appareils destinés... aux magistrats ? 

Publiquement, la partie « qui sommes-nous » du site se montre beaucoup plus prudente... voire ironique : « Nous cherchons à faciliter le quotidien de nombreuses personnes : magistrat, juriste, agent ferroviaire ou aérien, agent de sécurité privé », indique-t-il. Autant de professionnels contraints, en raison du « passage régulier par des portiques de sécurité », de « retirer vos téléphones portables et autres accessoires régulièrement ». « Simplifiez vous la vie », promet le site. 

On ignore si un magistrat a déjà acheté et utilisé un mini-téléphone portable afin de ne pas biper en arrivant au tribunal... ce qui, en soi, ne serait pas illégal. Mais « il est interdit de faire parvenir un téléphone à une personne détenue », rappelle la procureure de Paris.

Or, « les investigations ont établi que certains de ces téléphones ont été utilisés pour commettre, depuis la détention, les infractions de trafic de stupéfiants, d'escroqueries, de dégradation de commerce par incendie, de tentatives de meurtres commandités », selon Laure Beccuau. Parmi les appareils saisis, « les téléphones seront expertisés par l'Anssi (Agence nationale pour la sécurité des systèmes d'information) afin de vérifier l'éventuelle aspiration de données vers l'étranger [...] L'intégralité des 5 000 téléphones de la flotte en circulation sur le territoire national est visée par cette opération de démantèlement ».

40 000 téléphones saisis chaque année

L'enquête a été confiée à la brigade de lutte contre la cybercriminalité de la police judiciaire de la préfecture de police de Paris et à l'unité nationale cyber de la gendarmerie nationale. Concernant les utilisateurs, la section de lutte contre la cybercriminalité du parquet de Paris devrait se dessaisir au profit des parquets locaux. Ces utilisateurs ont été identifiés notamment grâce au Service national de renseignement pénitentiaire, précise le parquet de Paris.

En 2024, plus de 40 000 téléphones portables ont été saisis dans les prisons françaises, selon le ministre de la justice Gérald Darmanin.