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«Je ne faisais qu’obéir aux ordres»

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L’autrice est chercheuse et professeure en relations internationales.

Les médecins du Texas qui ont laissé mourir Josseli Barnica obéissaient aux ordres. La mère de 28 ans attendait avec joie son nouveau bébé, celui qu’elle voulait offrir à sa grande fille comme petite sœur pour compléter sa famille. Quelle déconfiture quand les médecins lui ont appris, à 17 semaines de grossesse, que le fœtus ne survivrait pas. Une fausse couche était imminente. Plutôt que de précipiter la sortie et risquer une accusation d’avortement, les docteurs ont attendu que le cœur cesse de battre par lui-même pour procéder au curetage.

Une attente de 40 heures, dont chaque minute qui passait au compte-goutte laissait le corps de Josseli vulnérable aux bactéries. Trois jours plus tard, elle mourait d’une infection, laissant sa fille sans maman. C’est arrivé en 2021, peu après que les représentants républicains du Texas eurent interdit l’arrêt volontaire de grossesse après six semaines de gestation. Les médecins ne faisaient qu’obéir à la loi.

La défense fondée sur l’obéissance aux ordres des supérieurs a été surnommée la « défense Nuremberg », car elle a été utilisée par beaucoup d’officiers allemands à la suite à la Deuxième Guerre mondiale durant ces fameux procès de Nuremberg. Même Adolf Eichmann, une des têtes pensantes de l’Holocauste, affirmait dans son procès de 1962 que les officiers subalternes et lui-même avaient été « contraints de servir de simples instruments », rejetant ainsi la responsabilité sur ses supérieurs pour la mort de millions de personnes juives. Il était pourtant présent dans la salle où a été élaborée la « solution finale ».

Les agents qui ont déporté au Honduras un enfant américain atteint d’un cancer de stade 4 suivaient aussi les ordres. Il y a quelques semaines, l’agence de contrôle de l’immigration et des douanes de la Nouvelle-Orléans (ou ICE, pour Immigration and Customs Enforcement en anglais) ont arrêté, détenu et déporté deux familles, dont trois enfants ayant la citoyenneté états-unienne. Les parents, originaires du Honduras, vivaient et travaillaient aux États-Unis depuis plusieurs années, mais n’avaient toujours pas de papiers. Le bambin de 4 ans aux prises avec un cancer métastatique n’aura plus accès à ses médecins et n’a pas pu apporter sa médication.

Alors que des observateurs critiquent le manque de respect des procédures légales dans ce cas et dans plusieurs autres, les agents de l’ICE assurent qu’ils ne font que suivre les ordres. Selon eux, ce sont les parents qui auraient choisi d’amener leurs enfants avec eux plutôt que de les laisser derrière. Rappelons que Donald Trump s’était fait vertement critiquer lors de son premier mandat pour avoir séparé des enfants de leurs parents en détention pour irrégularité migratoire.

Ces mêmes agents de l’ICE, masqués, kidnappent des gens dans la rue sans mandat d’arrêt, les placent dans des voitures banalisées et les font travailler dans des prisons d’immigration pour quelques sous de l’heure. Ce sont les ordres. D’ailleurs, la majorité des personnes sans papiers arrêtées par le gouvernement Trump ne sont pas renvoyées dans leur pays d’origine. La plupart servent de main-d’œuvre bon marché dans un complexe carcéral privatisé. La garde nationale suivait aussi les ordres quand ils ont gazé les manifestants de Los Angeles qui luttaient pour les droits des membres de leur communauté.

La fameuse expérience de psychologie sociale de Stanley Milgram, réalisée en 1963, a montré que la majorité des gens acceptent de provoquer des souffrances à autrui si l’ordre est donné par une figure d’autorité. Dans cette expérimentation, un évaluateur demandait à un participant d’envoyer des décharges électriques à un cobaye s’il répondait incorrectement à une question. Les participants, qui ont presque tous appuyé sur le bouton de décharge malgré les cris de supplication du second cobaye (qui était en fait un acteur), mentionnaient avoir éprouvé une déconnexion émotive lorsqu’ils suivaient des ordres.

Le film Le liseur met en scène cette possibilité de ne pas ressentir le poids de ses actions. Il est clair que l’analphabète Hanna (Kate Winslet) ne réalise pas sa faute d’avoir envoyé des femmes juives à leur mort durant son travail à Auschwitz. Le sentiment d’agentivité s’effrite pour celles et ceux qui obéissent à leurs supérieurs, même si ce sont eux qui refusent des soins, déportent des êtres humains ou suivent des ordres insensés.

Les membres du conseil d’administration des écoles du Texas qui retireront L’attrape-cœurs ou Roméo et Juliette des tablettes de leur bibliothèque suivront aussi les règles. Depuis le 31 mai dernier, le sénat de l’État a adopté une législation permettant de bannir des livres qui n’adhèrent pas aux « valeurs de la communauté ». Ces valeurs peuvent être déterminées par aussi peu que 50 parents d’un district qui décident de signer une pétition.

Comme le faisait remarquer un représentant démocrate, Roméo et Juliette ou L’attrape-cœurs pourraient être considérés comme faisant la promotion du sexe en dehors du mariage. La décision ne relève plus de l’expertise des libraires, mais des parents. Ceux-ci n’auront qu’à suivre les règles s’ils veulent garder leur emploi. D’ailleurs, celles et ceux qui enlèveront les bandes dessinées LGBTQ+ des bibliothèques scolaires de l’Alberta suivent aussi les nouvelles règles adoptées en mai par le gouvernement de la province.

Si la défense d’Adolf Eichmann apparaît absurde considérant son degré d’implication dans un des pires drames de l’humanité — la banalité du mal, résumait Hannah Arendt, après avoir assisté à ce procès célèbre —, à quel moment ou à quel niveau d’autorité « je ne faisais qu’obéir aux ordres » cesse d’être une bonne excuse ? Au moment où les juges interprètent les ordres ? Quand les avocats et les législateurs les contestent (ou pas) ? Quand les policiers les appliquent ? Quand les médias rapportent ces drames ? Ou encore quand les sénateurs et les représentants du Parti républicain se ferment les yeux devant un aspirant dictateur ?

Dans un contexte où les gens meurent, où les libertés individuelles sont démantelées et où de plus en plus d’atteintes aux droits de la personne sont perpétrées, suivre les ordres n’est pas une excuse. Conserver le peu de décence qu’il nous reste encore nécessitera qu’on cesse d’obéir à Donald Trump.

Ce texte fait partie de notre section Opinion, qui favorise une pluralité des voix et des idées en accueillant autant les analyses et commentaires de ses lecteurs que ceux de penseurs et experts d’ici et d’ailleurs. Envie d’y prendre part? Soumettez votre texte à l’adresse [email protected]. Juste envie d’en lire plus? Abonnez-vous à notre Courrier des idées.

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