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International 14/05/2025 17:05 Actualisé le 14/05/2025 19:54
La politologue Vera Grantseva décrypte pour « Le HuffPost » le revirement diplomatique inattendu entraîné par l’invitation de Volodymyr Zelensky à Vladimir Poutine.
HANDOUT / AFP
En proposant à Vladimir Poutine un rendez-vous en face-à-face en Turquie, Volodymyr Zelensky a replacé l’Ukraine en position de force avant d’éventuelles négociations pour parvenir à la paix.
INTERNATIONAL - « Ne sous-estimez pas la journée de jeudi en Turquie. » C’est par ces mots glissés aux journalistes américains et rapportés par le New York Times mardi que Donald Trump a souligné l’importance des négociations directes entre les Russes et les Ukrainiens prévues en Turquie jeudi 15 mai. Une première depuis mai 2022.
À la veille de ce rendez-vous qui pourrait s’avérer décisif pour l’avenir de la guerre en Ukraine, Vera Grantseva, politologue et enseignante à Sciences Po, analyse pour Le HuffPost les enjeux de ces négociations, marquées par l’invitation de Volodymyr Zelensky à son homologue russe Vladimir Poutine.
Car si la Russie a initialement proposé des négociations directes entre les deux pays à Istanbul, l’Ukraine a pris les devants en proposant, par la voix de son dirigeant, une rencontre en personne au président russe. Une proposition toujours sans réponse ce mercredi 14 mai, à la veille du rendez-vous turque.
Le HuffPost : Volodymyr Zelensky insiste lourdement pour que Vladimir Poutine soit présent pour une rencontre en face-à-face afin de négocier l’issue de la guerre. Comment analyser cette tactique du président ukrainien ?
Vera Grantseva : C’est une stratégie très maline, car l’enjeu principal de ces négociations sera de savoir qui domine le rapport de force diplomatique entre la Russie et l’Ukraine. Ces négociations ressemblent donc à une compétition qui ne consiste pas à savoir qui veut le plus la paix, mais plutôt sur qui reposera l’échec des négociations.
Zelensky insiste donc sur la présence de Poutine, parce qu’il sait très bien qu’il ne viendra pas. L’absence de Poutine donnerait à Zelensky un argument pour prouver à Trump que côté russe, il n’y a pas de véritable volonté de négocier. Mais plutôt une volonté de gagner du temps. Je ne l’exclus pas, mais ce serait une grande surprise que Poutine se rende en Turquie. Et s’il ne vient pas, cela sera révélateur de ses vraies intentions.
Pourquoi Vladimir Poutine refuse-t-il de répondre, d’après vous ?
Sur le front, malgré les problèmes bien réels de l’armée russe, Vladimir Poutine estime qu’il a encore une marge de manœuvre suffisante pour gagner du terrain. Dans le Donbass, notamment, et pour récupérer l’intégralité du territoire de l’oblast de Donetsk.
De quoi lui permettre de présenter ces éventuelles futures victoires comme un résultat de la guerre qu’il mène depuis trois ans. Accepter un cessez-le-feu maintenant n’intéresse donc pas Poutine. Il craint aussi que les Ukrainiens se servent d’une trêve pour construire des fortifications dans le Donbass, rendant la zone imprenable pour l’armée russe.
Les événements des derniers jours permettent-ils d’observer une modification du rapport de force entre Poutine et Zelensky ?
Oui, car on voit que la pression sur Poutine augmente de tous les côtés. Que ce soit de la part de la coalition des Européens. Ou de la Chine qui, bien que présente à la parade militaire sur la place Rouge le 9 mai, fait aussi pression pour rappeler la nécessité d’obtenir la paix. Il y a aussi Lula, qui a utilisé ce mercredi 14 mai une tournure que je trouve assez dure pour interpeller Poutine [« Ça ne me coûte rien de lui dire : “Eh, camarade Poutine, va à Istanbul négocier, bon sang” »].
C’est donc une course contre la montre pour Poutine, qui est confronté à un dilemme difficile à résoudre. Car il veut gagner du temps sur le front mais voit bien que la patience de Trump s’amenuise. Son but est donc de mimer des négociations sans vraiment les mener pour gagner du temps sur le front.
Alors que côté ukrainien, on peut saluer le travail diplomatique assez spectaculaire de Zelensky. Surtout quand on se souvient d’où il revient dans ses relations avec Trump. Il y a ici une prouesse diplomatique ukrainienne, qui a inversé le rapport de force. Là où Poutine a presque entièrement perdu le potentiel offert par Trump et son administration.
Quel rôle le président américain peut-il jouer dans les négociations prévues jeudi ?
Il existe une sympathie entre Trump et Poutine. Et malgré tous les échecs de Trump vis-à-vis de Poutine depuis début janvier 2025, il croit – sans doute par narcissisme – pouvoir convaincre Poutine de changer sa position. Même s’il se trompe entièrement, il y croit.
En face, Poutine se dit que si Trump vient à Istanbul, il pourrait le rencontrer. Mais pour venir lui-même, Trump a posé comme condition que Poutine accepte l’invitation de Zelensky. Donc des deux côtés, il y a cette condition sine qua non qui fait que ni l’un ni l’autre ne viendra en Turquie.
Au fond, ce que voulait réellement Poutine, c’est une rencontre avec Trump – comme une nouvelle Conférence de Yalta – où les Américains et les Russes se repartagent le monde en zones d’influence. On ne lui propose pas ça, c’est pourquoi même une rencontre à trois à Istanbul n’est difficilement acceptable pour Poutine. Le projet est celui imposé par l’Ukraine avec le soutien de ses alliés et des États-Unis, ce qui place Poutine sous pression. Et il déteste ça, lui qui s’imagine en grand leader qui décide du destin du monde.
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