La Ville d’Edmonton accepte les demandes de permis de construire pour des projets de bâtiments à un seul escalier. Elle veut ainsi déroger au modèle distinctif des immeubles d'habitation en Amérique du Nord consistant en de longs couloirs avec des logements de chaque côté et deux cages d'escalier aux extrémités opposées.

Un nouveau guide de la Ville permet de franchir les obstacles réglementaires concernant le modèle d’immeuble à escalier unique, qui n’est généralement pas autorisé par le Code du bâtiment de l'Alberta pour les bâtiments de plus de deux étages.

Les défenseurs de ce type de construction affirment qu'il ouvre de nouvelles possibilités de construction de logements à prix abordable, notamment de logements intermédiaires et d’appartements de trois chambres à coucher adaptés aux familles.

Le nouveau modèle et le logement abordable

Armando Hernandez, directeur de Dualita Architecture, s'intéresse aux immeubles à un seul escalier depuis un certain nombre d'années. Il affirme que le guide de la Ville lui a donné la certitude nécessaire pour se lancer dans la construction de ce type de logement.

Il a d’ailleurs révisé un plan qu'il avait déjà élaboré pour un immeuble de trois étages et a supprimé l'un des escaliers. Ce réajustement lui a permis d'ajouter une buanderie dans le logement, d'agrandir la cuisine et d'ajouter un petit séjour.

À la question de savoir si la réduction du nombre d'escaliers peut rendre le logement plus abordable, Armando Hernandez soutient que la norme des deux escaliers crée une économie d'échelle, dans la mesure où elle permet aux promoteurs de construire des appartements plus spacieux et de répartir le coût de l'escalier supplémentaire.

Il ajoute que, pour un promoteur plus modeste, la suppression d'un escalier peut permettre d'économiser jusqu'à 60 000 $.

La surface au sol est synonyme d'argent. L'impact le plus important se fera sentir pour les petits bâtiments, pour les constructions intercalaires.

Selon lui, cela peut également permettre aux promoteurs d'intégrer plus de logements dans un immeuble, ce qui peut également réduire le coût par unité.

Comment cela fonctionne-t-il?

Depuis 2006, le Code de la construction prévoit une autre voie qui peut être utilisée pour des solutions innovantes qui ne relèvent pas du code de la construction, à condition qu'elles soient assorties d'objectifs de performance spécifiques prouvant que la nouvelle solution est égale ou supérieure aux règles existantes.

Cameron Bardas, ingénieur principal au département de la construction de la Ville d’Edmonton, note que, bien que cette voie existe depuis des décennies, elle est sous-utilisée.

La Ville accepte donc les demandes de permis de construire pour des projets de bâtiments à un seul escalier qui prévoient notamment des cages d'escalier élargies ou encore la pressurisation des cages d'escalier pour empêcher la fumée de se répandre dans tout le bâtiment.

Les pompiers estiment que les bâtiments dotés d'une seule issue sont intrinsèquement plus dangereux. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Rob Easton

Une solution qui a aussi ses opposants

Elliot Davis, président de l’association provinciale des pompiers, estime pour sa part que les bâtiments dotés d'une seule issue sont intrinsèquement plus dangereux.

Il fait valoir qu’une cage d'escalier est comme un havre de sécurité pour les pompiers dans un bâtiment en feu, parce qu'il s'agit généralement d'environnements à pression positive, où les équipes peuvent trouver une bouffée d'air frais.

Il ajoute que les escaliers servent aussi à ranger les échelles, les extincteurs et d’autres outils de pompiers.

De plus, selon Elliot Davis, avec des résidents fuyant et ouvrant constamment des portes dans une seule cage d'escalier, cela créerait de la fumée et de la congestion.

Je ne pense pas que quelqu'un veuille accéder à un logement abordable juste pour être piégé dans un incendie de structure.

Bien que la Ville ait consulté les services d'incendie et de secours d'Edmonton pour préparer le guide, Greg Rehman, président du syndicat des pompiers d'Edmonton, a indiqué qu'il s'opposait également à l'initiative.

La Ville a déjà adressé une demande de modification du Code national de la construction au Comité canadien de l’harmonisation des codes de construction.

Avec les informations d’Emily Williams