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Pour les nostalgiques du rap américain des années 1990, l’affiche du 20 mai prochain à la Place Bell — et du lendemain, à l’Agora du Port de Québec — est incontournable : la tournée O Canadabis réunit sur une même scène les membres survivants du trio culte new-yorkais De La Soul, The Pharcyde, pionniers du rap champ gauche, et en tête d’affiche les Californiens de Cypress Hill, qui lanceront le 6 juin prochain un album enregistré en concert avec le prestigieux London Symphony Orchestra (LSO). « Et dire que tout ça a commencé par une blague des Simpson ! » s’étonne encore le compositeur et percussionniste Eric « Bobo » Correa, joint chez lui à Los Angeles.
On a souvent pensé que Matt Groening, le créateur de la série animée The Simpsons, avait le pouvoir de lire dans l’avenir tant certains de ses gags se sont avérés prémonitoires, de l’élection du président Donald Trump (prédite en 2000, descente d’escalier mécanique en prime !) à la légalisation de l’usage du cannabis au Canada, 13 ans avant que le Parlement vote la loi ayant assurément ravi les gars de Cypress Hill, qui ont injecté dans la scène rap américaine une vitale impulsion latino ayant influencé les générations suivantes.
Or, dans le cas de ce nouvel album, Groening semble plutôt avoir semé une idée — auprès des fans, des rappeurs et même de l’institution musicale britannique. Le décor de l’épisode intitulé « Homerpalooza », diffusé en 1996, est celui d’un festival de musique auquel prennent part les Smashing Pumpkins, Peter Frampton, Sonic Youth et nos rouleurs de joints ; un régisseur de scène fait irruption dans les loges en demandant qui était assez « stone » pour avoir embauché le London Symphony Orchestra. Après un bref conciliabule, les gars de Cypress Hill font mine d’avoir passé la commande. Quelques instants plus tard, on entend deux mesures du succès Insane in the Brain, agrémentées de violons !
« Avant le concert, on a fumé — à l’extérieur du Royal Albert Hall, parce que nous sommes respectueux, et je peux te confirmer que certains membres de l’orchestre aussi aiment fumer », assure Bobo, qui perçoit dans cette collaboration entre Cypress Hill et le LSO une sorte de progrès : « Au-delà de l’idée que tout ça est né d’un gag des Simpson, le fait que nous puissions traduire ainsi notre musique pour en arriver à un moment aussi incroyable — je crois que dans ce projet, nous sommes parvenus à une vraie collaboration entre l’orchestre et nous, et ça s’entend dans l’enregistrement. »
Mais encore : est-ce Cypress Hill qui a progressé, où les mentalités dans l’univers de la musique (qualifions-la d’institutionnelle) qui acceptent aujourd’hui le hip-hop comme un genre musical valide ? « C’est intéressant que tu soulèves ce point parce que pense la même chose. Au moment de la diffusion de l’épisode des Simpson, je doute que le LSO — ou n’importe quel autre orchestre, d’ailleurs — ait accepté de plonger dans une telle aventure. […] Je crois aussi que notre musique se prêtait bien à l’expérience, à cause des tonalités plus sombres qu’elle présente parfois. Le LSO, qui a enregistré certains des plus grands thèmes du cinéma, souligne par sa puissance ces moments-là. »
De légende et de nostalgie
Plus de 35 ans après sa formation, Cypress Hill a atteint le statut de groupe légendaire, reconnaît le percussionniste, né à New York mais élevé sur la West Coast. Eric Correa est le fils du non moins légendaire Willie « Bobo » Correa, percussionniste d’origine portoricaine ayant joué en début de carrière avec Tito Puente, pour ensuite devenir un collaborateur de choix, ayant joué dans les années 1960 et 1970 de précieux grooves latins aux côtés de Cal Tjader, Miles Davis, Dorothy Ashby, Wes Montgomery, Herbie Mann, Chico Hamilton, en plus d’avoir enregistré sept formidables albums pour le label Verve. « Mon père m’a dit un jour, en me montrant sa collection de vinyles : “Regarde, ça, c’est ton école” », confie Eric en insistant sur l’importance de garder l’esprit musical grand ouvert.
Le groupe lançait en 2022 un album de matériel original (Back in Black) et suggère que le prochain, son onzième, pourrait être le dernier. « Évidemment, en tournée, on donne aux fans les succès qu’ils veulent entendre, mais on essaie de jouer avec la liste des chansons pour y inclure quelques pièces récentes, dit Bobo, ou on réinterprète différemment quelques vieilles chansons pour surprendre le public. »
On les attend déjà, les Hand on the Pump, Latin Lingo, How I Could Just Kill a Man (du premier album, 1991), When the Shit Goes Down, l’immortelle Insane in the Brain (de Black Sunday), Throw Your Set in the Air, Boom Biddy Bye Bye, celles-là du troisième album, Cypress Hill III: Temples of Boom (1995), le premier auquel Bobo a participé à titre de membre officiel, après avoir passé les deux précédentes années à tourner en alternance avec The Beastie Boys et Cypress Hill.
C’est dans la foulée de la parution de ce troisième album qu’Eric Bobo a visité Montréal pour la première fois. Le souvenir est flou, mais authentique : février 1996, du parterre au balcon de la salle jadis nommée le Métropolis, les fans sont fébriles. Le quatuor californien s’amène au son de l’intro du nouvel album, puis se lance dans l’interprétation de Make a Move. Au moment où le DJ lance un premier beat, des centaines de briquets font « clic ». Trente secondes plus tard, la salle est envahie par un immense nuage de fumée hilarante. L’air n’étant autrement pas respirable, tout le monde est, pour ainsi dire, forcé de prendre un Hit From the Bong (tirée de Black Sunday).
Eric « Bobo » Correa jure que rien n’a changé en trois décennies : « Dès qu’on monte sur scène, les joints s’allument, they’re having a ball ! Chaque fois, on sent qu’ils nous attendent, même après tout ce temps. »