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Est-ce que Toronto peut avoir le beurre et l'argent du beurre? D'un côté, la Ville s'est engagée à construire 285 000 logements d'ici 2031 pour héberger sa population en augmentation constante. De l'autre, elle veut planter grosso modo 5 millions d'arbres supplémentaires d'ici 2050 pour atteindre 40 % de canopée urbaine.
Construire plus de logements tout en augmentant le nombre d'arbres est un défi simple à prime abord, mais sa solution l'est moins : lorsqu'on fait le choix de couvrir le sol de béton ou d'asphalte, il est difficile de revenir en arrière, expliquent des expertes.
C'est ce qu'ont souligné samedi Kim Statham, directrice de la foresterie urbaine de Toronto, et Sharon Lam, scientifique de recherche à l'Office de protection de la nature de Toronto et de la région, lors d'entrevues accordées à Radio-Canada.
Leur message coïncide avec un événement artistique qui se déroule samedi à Toronto. À l'occasion d'une initiative du Bentway appelée Moving Forest, 50 arbres défilent dans des chariots d'épicerie un peu partout dans la ville pour sensibiliser la population à l'importance de la canopée urbaine.

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L'événement de The Bentway a été organisé afin de promouvoir la sensibilisation aux arbres urbains dans la population,
Photo : offerte par The Bentway
Mais ce n’est pas tout : si les expertes s'entendent pour dire qu'augmenter le nombre d'arbres en ville est une bonne manière de contrer les changements climatiques, celles-ci soulignent que ces mêmes changements climatiques causent d'importantes maladies aux arbres de la ville.

Les arbres se trouvent dans des chariots d'épicerie pour « Moving Forest ».
Photo : offerte par The Bentway
Un défi de taille
Nous sommes engagés à l'objectif provincial de 285 000 logements d'ici 2031, a déclaré la mairesse Olivia Chow dans un communiqué de presse en décembre 2023. Cette cible représente environ 28 500 nouveaux logements par année pendant huit ans.

La Ville de Toronto a des objectifs importants de construction de logements. (Photo d'archives)
Photo : Reuters / Chris Helgren
Parallèlement, Toronto veut que 40 % de sa superficie soit occupée par des arbres. La plus récente étude à ce sujet, publiée en 2021, estime que ce chiffre était d’environ 28,4 % en 2018. La ville plante actuellement 120 000 arbres par année, selon le site web municipal.

Toronto veut que sa superficie, vue des airs, passe d'une couverture d'arbres de 28,4 % en 2018 à 40 % en 2050. (Photo d'archives)
Photo : Reuters / Mark Blinch
Pour atteindre 40 %, la ville doit gagner 11,6 points de pourcentage en 26 ans. Cela représente grosso modo 5 millions d'arbres supplémentaires.
Or, selon cette même étude publiée en 2021, Toronto perd du terrain. Entre 2008 et 2018, 892 hectares supplémentaires ont été couverts de béton et d'asphalte. Cela équivaut à 1115 terrains de soccer de nouvelles surfaces dures en seulement 10 ans, y lit-on.
Un équilibre à trouver
Kim Statham dirige la foresterie urbaine de la Ville de Toronto. Elle ne cache pas l'ampleur du défi lors d'une entrevue accordée samedi à Radio-Canada.
Nous devons équilibrer le logement en même temps que nous devons équilibrer notre environnement. Il y a des façons d'aborder l'urgence du logement en même temps que l'urgence climatique que nous avons à Toronto, déclare-t-elle.
La population de Toronto devrait atteindre 3,4 millions d'habitants d'ici 2041, selon le Plan de croissance provincial de 2017.
La directrice de la foresterie urbaine reconnaît les tensions. Ce n'est pas facile. Il y a des moments où l'un peut risquer l'autre, admet-elle.
L'étude publiée en 2021 – intitulée 2018 Tree Canopy Study par Peter Duinker et James Steenberg de l’Université Dalhousie – révèle que 85 % des terrains qui ont reçu des permis de construction entre 2008 et 2018 ont perdu des arbres.
Les activités de construction peuvent être un facteur significatif dans le déclin et la mortalité des arbres en raison de blessures mécaniques aux arbres, d'élagage excessif, de sectionnement de racines dû aux tranchées, et de croissance racinaire restreinte causée par le compactage du sol, précise l'étude.

La construction occasionne souvent une diminution du nombre d'arbres, souligne l'étude. (Photo d'archives)
Photo : La Presse canadienne / Richard Buchan
Le problème s'aggrave quand les espaces perdus sont couverts de béton ou d'asphalte.
La perte de zone perméable a des implications négatives potentielles pour la gestion des eaux pluviales, la qualité de l'eau, la perte de sols sains, la biodiversité, l'effet d'îlot de chaleur urbain, et la réduction d'espace de croissance perméable pour la plantation potentielle d'arbres, y ajoute-t-on.

Une fois les espaces recouverts de béton ou d'asphalte – comme l'intersection de la rue Dundas Ouest et de l'avenue Spadina – il est très compliqué et coûteux de les retransformer afin d'y planter des arbres, selon l'étude. (Photo d'archives)
Photo : La Presse canadienne / Nathan Denette
Une dépendance aux citoyens
L'atteinte de l'objectif de 40 % repose sur l'engagement des citoyens, révèle Mme Statham. Sur les 11,5 millions d'arbres que nous avons à Toronto, 55 % d'entre eux sont sur des propriétés privées.

Kim Statham est la directrice de la foresterie urbaine de Toronto.
Photo : Radio-Canada
Les propriétaires privés demeurent les gardiens de la majorité des arbres torontois, dit-elle. Il est crucial d'avoir le soutien du public dans ce programme.
La Ville a développé des programmes d'incitation pour encourager la plantation sur les propriétés privées. Elle offre des subventions aux groupes communautaires et organise des distributions gratuites d'arbres.
Nous avons eu un engouement incroyable pour ce programme, affirme la directrice.
Changements climatiques : paradoxe
De son côté, Sharon Lam, scientifique de recherche à l'Office de protection de la nature de Toronto et de la région, souligne un paradoxe : les arbres constituent un outil essentiel contre les changements climatiques, mais ils en deviennent également les victimes.
Les forêts urbaines sont un outil important dans notre boîte à outils d'action climatique pour construire des communautés résilientes et saines, explique la scientifique.

Sharon Lam est scientifique de recherche à l'Office de protection de la nature de Toronto et de la région.
Photo : Radio-Canada
Les bénéfices climatiques des arbres sont multiples. Les arbres sont des purificateurs d'air naturels. Ils prennent le dioxyde de carbone, un gaz à effet de serre clé qui emprisonne la chaleur de l'air, et le transforment en oxygène, détaille-t-elle.
Nous pouvons tous imaginer marcher dehors lors d'une chaude journée d'été et à quel point il fait plus frais d'être sous l'ombre d'un arbre qu'au soleil.
Mais les changements climatiques retournent la situation contre les arbres. Il est important de garder à l'esprit que les arbres sont également susceptibles aux impacts des changements climatiques, en particulier le stress et les maladies. Et les arbres stressés et malades sont encore plus susceptibles, avertit-elle.
L'étude de 2021 confirme cette vulnérabilité. L'état moyen des arbres s'est détérioré. En 2008, 82 % des arbres étaient en excellente ou bonne condition. En 2018, cette proportion a chuté à 70 %.
Le stress causé par la sécheresse, les dommages causés par les cycles de gel-dégel et une vulnérabilité accrue aux insectes et maladies affectent de plus en plus les arbres en ville, y précise-t-on. Et avec les changements climatiques, la chaleur extrême et les tempêtes extrêmes devraient continuer à devenir plus fréquentes, intenses et sévères, prévient Mme Lam.
Afin d’atteindre leur objectif, donc, les responsables municipaux devront aussi préserver la santé de ceux qui sont déjà en place.
À Toronto, la quantité de verdure urbaine totale — incluant gazon, jardins, arbres et toute autre végétation — a diminué graduellement, passant de 69 % en 2001 à 68 % en 2011, puis à 65 % en 2019, selon une publication de 2021 de Statistique Canada.
Avec des informations de Rozenn Nicolle