Language

         

 Publicité par Adpathway

Croissance urbaine et protection des forêts, un difficile jeu d’équilibriste

1 month_ago 20

         

NE LAISSER PAS LE 5G DETRUIRE VOTRE ADN Protéger toute votre famille avec les appareils Quantiques Orgo-Life®

  Publicité par Adpathway

En avril 2024, une vidéo d’un groupe de chevreuils se heurtant à une clôture métallique en tentant d’accéder à un terrain fraîchement déboisé pour la construction d’un immeuble de logements avait semé la consternation sur les réseaux sociaux, un symbole frappant, selon plusieurs, de l’impact de la déforestation dans la municipalité.

La ville de Dieppe avait voulu se faire rassurante en disant mettre en place toutes les solutions possibles pour concilier la croissance de la municipalité en respectant la connectivité des habitats et les déplacements de la faune.

Un cerf qui marche sur une route.

Des cerfs de Virginie ont été aperçus en train de traverser le chemin Melanson à Dieppe en 2024 à Dieppe.

Photo : Radio-Canada

Parmi les mesures citées, l’arrêté sur les arbres de Dieppe, adopté en juin 2023 en réponse à la grogne citoyenne suscitée par la déforestation liée au développement de la ville.

Une carte représentant le territoire de la Ville de Dieppe.

La Ville de Dieppe dit ne pas avoir de données sur le déboisement survenu sur son territoire en 2024. En 2022, la forêt urbaine de Dieppe recouvrait environ 60% de son territoire.

Photo : Radio-Canada / Louise Duguay

Avec son arrêté, une première en Atlantique, Dieppe a dit vouloir trouver un équilibre entre son développement et la protection de sa forêt urbaine, qui recouvrait en 2022 60 % de son territoire, soit environ l’équivalent de l’île de Miscou, dans le nord-est du Nouveau-Brunswick

Un défi de taille, alors que, comme ailleurs dans la province, cette municipalité du sud-est du Nouveau-Brunswick est confrontée à une pénurie de logements en raison d’une croissance démographique sans précédent. Selon les autorités municipales, la population a grimpé de 20 % entre 2021 et 2024 pour atteindre environ 35 000 habitants.

Pour arriver à protéger la couverture forestière de la ville, l’arrêté prévoit notamment des mesures incitatives afin d’encourager la conservation d’arbres sur les terrains développés sur son territoire, a rappelé Dieppe lorsque la vidéo des chevreuils a circulé sur Internet l’an dernier.

Exigences minimales de plantation prévues par l’arrêté sur les arbres

Pour toute nouvelle construction, l’arrêté prévoit un arbre planté :

  • Pour chaque unité de logement créé

  • Pour chaque 93 m2 d’espace commercial ou industriel

  • Par tranche de 10 m de façade de nouvelle rue

*Lors de l’entrée en vigueur de l’arrêté, un crédit d’un arbre à planter par 100 m2 de boisé conservé sur le site était offert pour encourager la préservation de la forêt urbaine.

Selon des données obtenues en vertu d’une demande d’accès à l’information, Radio-Canada a été en mesure de constater que peu de promoteurs immobiliers ont pour l’instant choisi de profiter des incitatifs à la conservation prévus dans l'arrêté.

Vue aérienne du terrain déboisé pour construire un immeuble à logement à Dieppe.

L'aménagement de ce projet immobilier de 84 unités au 1445 boulevard Dieppe a nécessité le déboisement d'une superficie de 11 900 mètres carrés, soit l'équivalent d'un peu plus de deux terrains de football.

Photo : Radio-Canada / Ian Bonnell

En effet, entre le moment où l’arrêté est entré en vigueur et le 16 novembre 2024, Dieppe a approuvé 230 demandes de coupe d’arbre en lien avec un permis de construction, d’aménagement ou de lotissement, mais seulement 20 de ces projets ont protégé une partie des arbres sur leur terrain.

Près de 15 % de la canopée forestière a été protégée sur ces terrains, pour la plupart entièrement boisés, d’une superficie totale de 260 000 m2.

Une réglementation mal reçue par les promoteurs

Fox One Properties est à la tête de l’un de ces projets d’habitation où des arbres ont été préservés.

L’entreprise a été en mesure de conserver 2200 m2 de canopée forestière, soit près des deux tiers de la superficie d’un terrain boisé de la rue Elsliger où six maisons en rangée ont été construites.

Bien content d’avoir ainsi pu contribuer à préserver une partie de la forêt urbaine de Dieppe, le propriétaire de Fox One Properties, Marc-André Arsenault, affirme que c’est la forme irrégulière de son terrain qui a rendu la chose faisable. Selon lui, c’est toutefois impossible la plupart du temps.

On avait de la terre qui n’était pas utilisable, donc on a laissé les arbres dessus, lance M. Arsenault, qui dit être d’avis que l’arrêté sur les arbres est un irritant pour tous ceux qui participent au développement de la municipalité.

Une subdivision situé près d'une école.

L'impact sur la forêt urbaine d'un immeuble à logement est moindre que celui découlant de l'aménagement de maisons en rangées comme celles-ci, récemment aménagées sur la rue Elsliger à Dieppe.

Photo : Radio-Canada / Ian Bonnell

Il n’est pas le seul à le penser. D’après un sondage mené par Dieppe auprès de développeurs, de consultants et d’entreprises en arboriculture, 90 % des 11 répondants ont indiqué que la mesure avait eu un impact négatif sur leurs activités.

C’est la raison pour laquelle la municipalité s’est inspirée des commentaires qui lui ont été soumis dans son questionnaire pour revoir certaines des dispositions de son arrêté.

Pour encourager la préservation de parcelles d’arbres sur les terrains développés, les promoteurs peuvent bénéficier d’une dispense de plantation de quatre arbres par 100 m2 de parcelle préservée. C'était un seul auparavant.

On espère que ça va améliorer l’acceptabilité de la réglementation, dit le directeur de l’environnement à la Ville de Dieppe, Alexandre Truchon-Savard.

Un homme sourit à la caméra devant un arbre.

Alexandre Truchon-Savard est le directeur de l’environnement à la Ville de Dieppe.

Photo : Radio-Canada / Gracieuseté - Ville de Dieppe

L’arrêté a aussi été mis à jour pour offrir un peu plus de flexibilité en permettant aux promoteurs de proposer un projet environnemental lorsque la replantation d’arbres est impossible en raison de contraintes d’espace.

Alors que ces projets étaient auparavant tenus de verser 500 $ par arbre non planté à la municipalité, les constructions dotées d’un toit vert peuvent par exemple se soustraire aux exigences de plantation.

Des citoyens insatisfaits

Une femme devant un micro de Radio-Canada.

Il y a quelques années, Mélanie Urbain, s’était impliquée contre un projet immobilier sur la rue Lavoie, près de chez elle.

Photo : Radio-Canada / Babatundé Lawani

Il n’y a pas que les promoteurs immobiliers qui grincent des dents à cause de l’arrêté sur les arbres. Des citoyens qui se sont mobilisés afin de protéger la forêt urbaine sont également déçus. Mélanie Urbain, qui s’était impliquée contre un projet immobilier sur la rue Lavoie, près de chez elle, en fait partie.

Je pense qu'on a été naïf un petit peu de croire que ça allait faire en sorte qu'on allait protéger les arbres, qu'on allait empêcher des coupes de boisés.

Selon Mme Urbain, les autorités municipales avaient fait miroiter que l’arrêté sur les arbres permettrait d’éviter la perte de grandes parcelles de forêt, mais selon elle, au final, ça ne change absolument rien dans le sens que c'est pas un arrêté qui empêche la coupe pour les développeurs.

Elle cite en exemple les développements d’immeubles a sur la rue Melanson et le boulevard Dieppe. C’est là que la présence des chevreuils en avait choqué plusieurs l’an dernier.

Un impact moins grand

Bien qu’Alexandre Truchon-Savard dit comprendre que les déboisements nécessaires afin d’aménager ces immeubles créent un choc visuel, il rappelle que leur impact sur la forêt urbaine est moindre.

Si on le ramène par logement, l’impact est beaucoup moins grand que de faire un bloc appartement dense ou même des maisons en rangées que des maisons unifamiliales, rappelle-t-il.

Dans un contexte où la ville grandit, impossible de s’attendre à ce que chaque arbre coupé soit replanté, dit Alexandre Truchon-Savard.

On s’est développé dans un milieu qui est boisé, mais maintenant, on essaye de bien y penser [...], on prend des mesures qui sont, on le souhaite, les meilleures, pour s’assurer que les arbres qui vont rester vont survivre.

Pour Anijela Puric-Mladenovic, une professeur de l’Université de Toronto qui s’intéresse aux forêts urbaines dans le cadre de ses recherches, rien n’est moins sûr.

Le problème vient du fait que les techniques de construction font en sorte que la majorité de la terre arable est retirée lorsque vient le temps de préparer le terrain pour les projets.

Ces arbres ne vivent pas plus d’une trentaine d'années puisque cette couche de terre a des matières organiques importantes pour les arbres. Personne ne s’y intéresse puisque les arbres meurent et on les remplace, mais je ne crois pas que ces nouvelles subdivisions auront un jour une canopée verdoyantes comme on en voit dans de vieux quartiers, explique-t-elle.

Vu aérienne de trois projets d'immeubles à proximité du boulevard Dieppe.

De nombreux projets immobiliers ont vu le jour à Dieppe afin de répondre à la pénurie du logement. Le déboisement de ces terrains, près du boulevard Dieppe, avait semé la consternation l'an dernier alors qu'une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux montrait des chevreuils qui tentaient d'accéder au site clôturé.

Photo : Radio-Canada / Ian Bonnell

Alexandre Truchon-Savard reconnaît que la qualité des sols est importante pour les arbres et qu’il s’agit d’un enjeu qu’une révision future de l’arrêté sur les arbres pourrait prendre en compte.

On essaye d’y aller à petits pas. On a fait quand même un gros pas avec la politique sur les arbres [...] Certaines municipalités ont développé la notion de qualité de sol minimale à rencontrer. Ça prend des ressources pour valider tout ça, mais c’est définitivement quelque chose que l’on regarde.

Déjà des retombées

Bien que ce dispositif de protection de la forêt urbaine pourrait évoluer, Dieppe rappelle que les certificats d’autorisation de coupe d’arbre émis depuis l’entrée en vigueur de l’arrêté exigent la replantation de près de 1040 arbres. Quand une replantation n’est pas possible, 500 $ par arbre est versé à la municipalité, ce qui a permis de constituer un fonds, qui compte déjà 89 000 $, dans lequel la ville pourra puiser, par exemple, pour verdir des rues où il manque d'arbres.

Au moins l’arrêté assure qu’il y a une replantation minimum qui va être faite alors que ce n’était pas le cas avant.

Vu aérienne de trois projets d'immeubles à proximité du boulevard Dieppe.

Des citoyens se désolent que la Ville de Dieppe n'a pas entamé une réflexion sur la manière dont la municipalité se développe plutôt que de se contenter d'un arrêté sur les arbres.

Photo : Radio-Canada / Ian Bonnell

Même si elle reconnaît que la replantation d’arbres est souhaitable, Mélanie Urbain pense que la politique de l’arbre aurait dû s’accompagner d’une réflexion sur le genre de développement souhaitée à Dieppe. Selon elle, si la Ville désirait réellement protéger sa forêt urbaine, il aurait fallu mettre en place des mesures pour freiner l’étalement de la ville.

Si tu veux vraiment dire que ta ville prend un virage écologique, il faut que tu organises ton plan d'aménagement municipal puis que tu changes la façon qu’elle se développe, se désole-t-elle. On nous parle beaucoup de densification, mais là, on est en train de densifier des secteurs qui n'ont aucun service, donc ce n’est plus de la densification, c'est de l'étalement.

Vue du ciel du déboisement effectué en prévision du prolongement du boulevard Dieppe.

Avec le projet de prolongement du boulevard Dieppe, la Ville espère densifier la zone et rendre constructibles environ 500 acres de terrains le long de cette artère et près de 2800 acres à travers la municipalité, soit près de 11 % du territoire.

Photo : Radio-Canada / Ian Bonnell

Alain Paquette, titulaire de la Chaire de recherche sur la forêt urbaine à l’Université du Québec à Rimouski, partage son avis.

Malheureusement, dit-il, les régimes de taxation municipale font en sorte que les gouvernements municipaux augmentent leurs revenus en fonction du nombre de bâtiments retrouvés sur leur territoire.

Nos villes sont dessinées par le mode de taxation, qui est totalement lié au développement horizontal et c’est un problème. De plus, on construit encore nos villes essentiellement pour la voiture, explique le chercheur, qui collabore avec Dieppe pour instaurer les meilleures pratiques liées à la gestion des forêts urbaines.

Le jour où la société remettra en question le fait que l’essentiel des déplacements doit se faire en auto, le développement urbain changera, dit M. Paquette.

Un terrain déboisé afin d'y aménager un boulevard.

Le déboisement nécessaire afin de permettre le prolongement du boulevard Dieppe a commencé.

Photo : Radio-Canada / Louis-Philippe LeBlanc

Reste à savoir si Dieppe fera ce virage au cours des prochaines années. Chose certaine, la municipalité a déjà annoncé son intention de développer plus de 200 hectares de terrain dans le cadre du projet de prolongement du boulevard Dieppe, soit l’équivalent d’environ 65 % de la surface boisée totale perdue sur le territoire de la ville entre 2017 et 2022.

read-entire-article

         

        

NE LAISSER PAS LE 5G DETRUIRE VOTRE ADN  

Protéger toute votre famille avec les appareils Quantiques Orgo-Life®

  Publicité par Adpathway