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Maquereaux, cabillauds ou morues, harengs, sardines… Ces poissons sont bien connus des consommateurs belges, mais ils sont, peut-être à l'insu des gourmets, en train de se transformer avant d'arriver dans notre assiette. En effet, le réchauffement climatique et la hausse des températures des océans réduisent la taille des poissons ou leur nombre, observent les scientifiques. Parmi le plus marquant ? La taille des sardines (mais aussi leur poids) s'est réduite de 50 % en 15 ans. À tel point que les entreprises de sardines en boîte éprouvent des difficultés… En effet, une sardine plus petite, "quand on travaille à la main, à la fois pour l'étripage et la mise en boîte, c'est deux fois plus de main-d'œuvre", indique Jean-François Feillet, de la conserverie Chancerelle, en Bretagne. " Un poisson petit a un impact immédiat sur notre productivité. Il faut plus de temps pour fabriquer une boîte", confirme Caroline Hilliet Le Branchu, de la Belle-Iloise, qui l'an dernier n'a ainsi pas pu produire suffisamment. Résultat : "Jusqu'à mi-juillet, il y a quelques références qui vont être en rupture".
Mais la sardine n'est qu'un exemple – certes iconique- de poissons subissant l'impact du réchauffement. "Il y a déjà des effets très importants du changement climatique sur les populations et les stocks de poissons, en particulier les espèces pêchées. On observe deux grands effets, de nature différente, et qui n'affectent souvent pas les mêmes espèces, cadre l'écologue halieutique Didier Gascuel, professeur à Institut Agro Rennes-Angers et spécialiste de cette question. Le premier, c'est que certaines espèces ou certaines populations sont en régression, en général parce que le succès de la reproduction diminue. La survenue des larves est plus faible, le nombre d'individus dans la population diminue, et celle-ci éventuellement s'effondre. C'est clairement parce que les eaux deviennent trop chaudes. Le taux de mortalité est extrêmement important aux phases larvaires et même à l'éclosion des œufs. Un bon exemple est la morue ou le cabillaud dans la mer du Nord (notamment dans "notre" sud de la mer du Nord, NdlR). Ces morues (ou cabillaud) de la mer du Nord se trouvent en limite sud de leur aire de répartition. C'est une population qui évoluait dans des eaux qu'elle trouvait probablement déjà un peu chaudes, et lorsque ces eaux se réchauffent encore, le succès de la reproduction s'effondre donc. Une autre population, indépendante, celle de la mer Celtique (côte sud de l'Irlande, NdlR), diminue également. Mais en fait, on voit le phénomène se multiplier."
L'autre impact majeur a trait à l'alimentation des poissons eux-mêmes, qui se réduit : "Le deuxième effet du changement climatique est un aspect dont on n'a découvert que très récemment qu'il était absolument généralisé et d'importance majeure : on s'aperçoit qu'un certain nombre d'espèces deviennent de plus en plus maigres. En clair, à âge équivalent, on a des individus très maigres. La première fois que cela a été observé, c'était pour la sardine du golfe du Lion dans la Méditerranée, il y a une dizaine d'années. Et puis on s'est aperçu que les petits poissons pélagiques, c'est-à-dire tout le cortège de poissons de pleine eau que sont les harengs, les anchois, les sprats ou encore les maquereaux, étaient aussi devenus de plus en plus maigres, côté Atlantique", détaille Didier Gascuel.
Plancton en berne
L'explication la plus vraisemblable à cette situation, selon les scientifiques ? Un affaiblissement de l'entièreté de la chaîne alimentaire, à partir du plancton. On sait en effet que les dérèglements climatiques défavorisent les grandes espèces de phytoplancton et favorisent les petites. Ce phénomène s'observe également dans le zooplancton, tous deux premiers maillons de la chaîne alimentaire. De manière générale, les organismes sont en effet plus petits dans les eaux plus chaudes : plus la température de la mer est élevée, plus les processus biogéochimiques sont rapides et plus cela favorise les petites espèces. Concrètement, "je désigne souvent le problème derrière cela, en disant qu'aujourd'hui les poissons trouvent dans leur assiette des croquettes à la place des biftecks", résume Didier Gascuel. L'idée, c'est que l'on assite à une dégradation euh du transfert d'énergie dans la chaîne alimentaire avec des aliments de moins en moins énergétiques, des bioplanctons de plus en plus petits, ce qui fait que les les sardines, les les les anchois et les autres harengs sont en train non pas de mourir de faim mais de souffrir réellement de faim au point que leur embonpoint en est affecté." En pratique, les harengs ou les sardines en Atlantique ont perdu un tiers à un quart de leurs poids, tandis que les sardines du golfe du Lion, en particulier, ont perdu entre un tiers et la moitié de leur poids. Pour les harengs, les volumes de capture dans la mer du Nord sont passés de 2,2 millions de tonnes en 2016 à un maximum de 1,7 million de tonnes en 2024. Cette perte d'embonpoint est visible tant dans les eaux françaises que belges.
Conséquences ? Dans ce contexte, les pêcheurs assistent déjà à des pertes de potentiels de production, en Europe, de 5 à 10 % (et plutôt proche de 10 % selon le Pr Gascuel). On constate aussi des "migrations" de poissons, en réalité des effondrements de population à certains endroits et une croissance à d'autres, ce qui entraîne des tensions géopolitiques. Exemples ? "Le cabillaud a été longtemps très important d'un point de vue de l'écologie, de la régulation des populations de poissons mais aussi le support des plus grandes pêcheries des pays au nord de l'Atlantique Nord, côté Europe et Canada. Maintenant, en mer du Nord, les quotas ont baissé drastiquement. Cependant, dans nos régions, il y a encore beaucoup de cabillaud sur le marché, mais ce sont à présent principalement des importations de la Norvège, de la mer de Barents. À cet endroit, les cabillauds étaient plutôt en limite froide de leur zone thermique préférée et ils y bénéficient désormais d'eaux plus chaudes. De ce fait, il y a eu dans cette zone un accroissement des populations. Le consommateur ne s'est sans doute rendu compte de rien, sauf s'il est très attentif, car depuis deux ou trois ans, il y en a moins. En effet, dans un premier temps, cette population de la mer de Barents s'est développée tellement fort qu'il y a eu des quotas de quasi 1 million de tonnes, ce qui est absolument énorme et compensait largement les diminutions en mer du Nord et Celtique. Sauf que désormais, cette population de la mer de Barents est aussi en chute !"
Au niveau mondial, pour avril, la température à la surface des mers continue à afficher des niveaux très élevésPour cette baisse en mer de Barents, les hypothèses pourraient aussi être liées au réchauffement climatique, mais plutôt que la température moyenne de l'eau, cela pourrait s'expliquer par les vagues de chaleur marines, des eaux plus acides ou pauvres en oxygène, ou encore à nouveau l'alimentation en baisse des poissons.
Guerre du maquereau
Pour leur part, les maquereaux, qui sont aujourd'hui davantage présents au Nord, dans les eaux islandaises, norvégiennes et des îles Féroé, qu'au Sud (à cause aussi des changements de plancton ?), font l'objet d'une dispute sur la répartition des quotas de pêche. Les pays de l'UE et les pays comme l'Islande pêchent chacun la quantité totale qu'ils devraient théoriquement se partager pour assurer la pérennité des espèces, ce qui entraîne bien sûr une surpêche et une chute des populations.
Du côté des consommateurs, les clients ne semblent pas se plaindre auprès des poissonniers de la réduction de la taille des poissons : la mode serait ainsi au "poisson portion", donc aux poissons de petite taille, selon les enquêtes de Didier Gascuel. Mais d'après lui, cette préférence pose en fait problème car les pêcheurs ont déjà tendance à pêcher des poissons trop petits (vu la taille de leur filet), au lieu de les laisser poursuivre leur croissance en mer.
Pour pallier le manque de sardines par exemple, des conserveries s'approvisionnent déjà au Portugal ou en Espagne. Et d'autres jusqu'au Maroc, en poisson congelé. Les pêcheurs du sud de la Bretagne, ayant constaté le fort amaigrissement de leurs sardines, sont en train de monter des expéditions afin d'examiner s'ils ne trouvent pas de plus grosses sardines plus au Nord. Ces poissons quitteront-ils leurs zones de pêche traditionnelles pour se déplacer plus vers la Belgique ? "Elle a déjà été repérée dans la région, expliquait récemment au Standaard Hans Polet, directeur scientifique de l'Institut flamand pour la recherche sur l'agriculture, la pêche et l'alimentation (Ilvo). "Qui sait, nous pourrions la pêcher dans la Manche ou dans la mer du Nord et l'exporter ensuite en Espagne, comme nous le faisons aujourd'hui avec le calmar."
Pêche miraculeuse ?
Didier Gascuel est plus dubitatif sur ce genre de "pêche miraculeuse" reportée du Sud vers le Nord, car ses études d'impacts à l'aide de modèle climatique se sont toujours révélées plus "décevantes", au long des années et au fur et à mesure que les modèles se perfectionnaient. "Aujourd'hui, même pour des pays comme la Suède et la Norvège, on ne s'attend plus vraiment à ce qu'il y ait des bénéfices du changement climatique en matière de pêche." Et si des espèces "exotiques" arrivent bien dans nos régions, elles ne compensent pas les pertes et ne sont pas toujours comestibles. De manière générale, cela fait en tout cas de longues années que les pêcheurs belges ne se limitent plus au sud de la mer du Nord. Leur zone de pêche comprend la côte danoise, la Manche, le canal de Bristol, la mer d'Irlande, le golfe de Gascogne…
"Un évènement sans précédent" : une "tempête de neige silencieuse" s'abat sur les océansQuelle solution ? Face à ce défi d'approvisionnement, pour la filière en sardines notamment, certains plaident pour une interdiction de la pêche en hiver, afin de permettre aux stocks de se renouveler. De manière générale, pour le Pr Gascuel et nombre de scientifiques, "dans cette période du changement climatique, la seule bonne solution serait d'avoir une gestion des pêches plus précautionneuse et de rehausser nos normes environnementales afin d'essayer de compenser au moins une partie des effets du changement climatique, par une diminution de la pression exercée par la pêche. Et ce de façon à revenir à des écosystèmes en meilleure santé. C'est la meilleure manière pour que l'écosystème retrouve une certaine stabilité et une résilience, mais aussi pour que les pêcheries retrouvent de l'air en matière de rentabilité économique et de stabilité. Nous avons montré dans une étude que l'on pouvait largement compenser les effets des changements climatiques en termes de diminution moyenne de la biomasse par une légère diminution de la pression de pêche. Car même si ces effets commencent à devenir très importants, il ne faut pas oublier que l'effet aujourd'hui encore le plus important, c'est celui de la pêche."
Des sardines de 25 grammes
Notons que ce phénomène n'est pas seulement visible dans l'hémisphère Nord. Les pêcheurs indiens, entre autres, se plaignent également : "Le réchauffement des eaux côtières induit par le changement climatique entraîne des carences en nutriments, ce qui entrave le développement des jeunes sardines. Cela a entraîné une diminution drastique de leur taille. Auparavant, les sardines pesaient en moyenne 150 g ; aujourd'hui, elles atteignent à peine 25 g. Par conséquent, la taille et le goût du poisson se sont considérablement détériorés", expliquait en mars Jackson Pollayil, président de la Fédération Swatantra Matsyathozhilali du Kerala à The Hindu. Sur les côtes africaines, la réduction de la taille des poissons s'observe aussi.
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