Deux accords fortissimo, tels des poignards enfoncés violemment. Ainsi démarre de manière spectaculaire Don Giovanni. Dès l’ouverture de ce dramma giocoso, la musique sombre et puissante nous avertit du dénouement inéluctable. La tonalité de ré mineur prolongée par un rythme pointé tels les battements d’un cœur. Le héros est déjà condamné. On ne badine pas avec la mort.
Le Britannique Robert Icke, qui signe sa toute première mise en scène d’opéra dans l’écrin prestigieux du Festival d’Aix-en-Provence, semble avoir tellement forcé les aspects labyrinthiques de l’œuvre qu’il se perd d’emblée dans son propre dédale. L’idée initiale repose sur une fusion des deux personnages du Commandeur et de Don Giovanni. «Chi è morto? Voi o il vecchio?» s’enquiert Leporello à l’issue du combat qui vient d’opposer le Commandeur à son maître. Ce récitatif révélateur de l’humour génial de Da Ponte et de l’héritage de la commedia dell’arte qui irrigue aussi le drame sert donc ici de point de départ à un concept: le libertin et sa victime comme les deux facettes d’une même masculinité toxique porteuse de trouble et de chaos.