Depuis toujours, les astronomes observent le ballet céleste entre étoiles et planètes avec fascination. Mais une découverte récente bouleverse cette dynamique classique : une planète géante, baptisée HIP 67522 b, ne se contente pas d’orbiter autour de son étoile, elle semble littéralement déclencher la mort de cette dernière par des explosions stellaires répétées. Ce phénomène inédit, révélé par une étude publiée dans Nature, offre une nouvelle perspective sur les interactions complexes entre astres et promet de redéfinir notre compréhension des systèmes planétaires.
Une planète au bord du chaos
HIP 67522 b est une planète de la taille de Jupiter qui effectue une révolution complète autour de son étoile en seulement sept jours. Cette orbite extrêmement rapprochée la place à une distance où la gravité et les champs magnétiques sont intensément liés. C’est précisément ce lien magnétique qui est au cœur de cette histoire hors du commun.
L’étoile HIP 67522, comme beaucoup d’autres, est une gigantesque boule de plasma où des particules chargées s’agitent en créant des champs magnétiques complexes. Parfois, ces champs se croisent, s’emmêlent et finissent par se rompre, provoquant des éruptions stellaires, de violentes explosions de rayonnement accompagnées de gigantesques expulsions de plasma. Ce que les scientifiques ont découvert, c’est que la planète HIP 67522 b ne subit pas simplement ces phénomènes, elle les provoque.
La planète qui déclenche des explosions
Ekaterina Ilin, astrophysicienne à l’Institut néerlandais de radioastronomie et première auteure de l’étude, explique que la planète en orbite agit comme un catalyseur. En suivant son trajet, HIP 67522 b génère des ondes le long des lignes du champ magnétique de son étoile. Ces ondes ne déclenchent pas n’importe quelles éruptions, mais des explosions particulièrement intenses, « prêtes à éclater », comme le souligne Ilin. La planète semble en quelque sorte « fouetter » le champ magnétique, provoquant une réaction en chaîne d’une énergie bien supérieure à celle des simples ondes qu’elle émet.
Cette interaction magnétique ne se contente pas d’affecter l’étoile : elle a des conséquences dramatiques sur la planète elle-même. Les éruptions stellaires successives bombardent HIP 67522 b, attaquant et réduisant progressivement son atmosphère. Selon les projections des chercheurs, la géante gazeuse, aujourd’hui comparable à Jupiter, pourrait perdre suffisamment de matière pour devenir une planète de la taille de Neptune dans les cent prochains millions d’années.

Une observation rendue possible par la technologie moderne
Cette découverte n’aurait pas été possible sans les instruments sophistiqués dont disposent aujourd’hui les astronomes. Le satellite TESS (Transiting Exoplanet Survey Satellite) de la NASA a joué un rôle clé en détectant les variations lumineuses caractéristiques d’une planète passant devant son étoile. Après avoir repéré HIP 67522 comme un objet d’intérêt, les chercheurs ont rapidement sollicité le télescope spatial Cheops de l’Agence spatiale européenne, capable de cibler précisément des étoiles individuelles avec une grande sensibilité.
Grâce à Cheops, les astronomes ont pu observer 15 éruptions, presque toutes alignées avec le passage de la planète devant l’étoile, renforçant l’hypothèse d’une interaction directe entre les deux corps célestes. Cette corrélation temporelle a été la preuve essentielle démontrant que la planète ne subissait pas simplement les effets stellaires, mais qu’elle en était à l’origine.
Un phénomène unique qui ouvre de nouvelles pistes
Cette interaction entre une planète et son étoile, où la première influence de façon déterminante l’activité magnétique de la seconde, est une première scientifique. Elle invite à repenser les modèles classiques de formation et d’évolution des systèmes planétaires.
L’équipe de chercheurs, menée par Ekaterina Ilin, prévoit d’approfondir ses recherches avec d’autres instruments, notamment en étudiant différentes longueurs d’onde, telles que l’ultraviolet et les rayons X. Ces radiations ont un impact significatif sur les atmosphères planétaires et pourraient offrir des indices cruciaux sur le processus de dégradation atmosphérique observé.
Par ailleurs, les scientifiques ambitionnent d’identifier d’autres systèmes similaires afin de passer d’un cas isolé à un ensemble d’exemples. Cela permettrait de mieux comprendre ce phénomène inédit et d’alimenter les modèles théoriques. Le futur télescope spatial Plato, attendu pour 2026, devrait également contribuer à cette quête en détectant de nouvelles exoplanètes et en affinant les mesures sur celles déjà découvertes.
Implications pour la recherche exoplanétaire et la compréhension des étoiles
Au-delà de l’aspect spectaculaire de cette planète « tueuse d’étoile », cette découverte soulève des questions fondamentales sur la vie des systèmes planétaires. Quelles sont les conséquences d’une telle interaction sur la durée de vie d’une étoile ? Jusqu’où une planète peut-elle influencer son environnement stellaire ? Et surtout, comment ces phénomènes affectent-ils les conditions propices à l’émergence et à la survie de la vie ?
Jusqu’à présent, les études portaient surtout sur la manière dont les étoiles affectent leurs planètes, notamment à travers le vent solaire et les rayonnements. Ce nouveau regard, où la planète agit comme un agent actif, ouvre un champ de recherche riche en possibilités.