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« C’est une loi-cadre, donc qui est assez vide dans sa coquille », affirme sans détour le président de l’Ordre des ingénieurs forestiers du Québec, Patrick Pineault, lorsqu’il est appelé à commenter le projet de loi 97 du ministère des Ressources naturelles et des Forêts, qui vise à réformer le régime forestier.
Le régime forestier du Québec a un peu plus de 200 ans. Il a pris naissance vers 1820, lorsque le gouvernement intervient pour la première fois pour réclamer des redevances au bois récolté sur les terres de la Couronne.
À cette époque, le bois était exporté, à l’état brut, sans que les Québécois en profitent des avantages. Ce régime jette les bases des lois et règlements qui assurent la protection et le renouvellement des forêts.
Depuis son instauration, le régime forestier a été revu par divers gouvernements. Sa dernière mouture remonte à 2013, avec la Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier, du ministre libéral des Ressources naturelles et de la Faune, Claude Béchard.
Une douzaine d’années plus tard, c’est au tour de la ministre caquiste des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina, de moderniser le régime forestier. Un exercice périlleux, aux dires des divers acteurs de la forêt. Et la ministre ne s’en cache pas; elle comprend que sa réforme puisse susciter des inquiétudes.
D’ailleurs, elle partage la lecture que fait le président de l’Ordre des ingénieurs forestiers du Québec sur son projet de loi-cadre qui vise à réformer le régime forestier, le projet de loi numéroté 97. Mais, si le nouveau régime forestier et sa loi-cadre ne sont pas normés, cadrés ou très stricts, c’est pour lui donner plus d’agilité, plus de latitude, argumente-t-elle.
Avoir une plus grande latitude, ça amène de travailler, parfois, par règlement, plutôt que de tout inscrire dans la loi.
Ce qui veut dire que les modalités de ce nouveau régime forestier pourront être fixées ultérieurement par le gouvernement.
Cette souplesse législative facilitera, aux yeux de la ministre, la gestion de la forêt québécoise, notamment, pour l’adaptation aux changements climatiques. Un argument qui ne convainc pas les acteurs du milieu forestier.
Les critiques fusent de toutes parts depuis que Maïté Blanchette Vézina a déposé son projet de loi au parlement.

La ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina, en commission parlementaire sur le projet de loi 97
Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel
Les Premières Nations, comme des groupes environnementaux, la Fédération des pourvoiries du Québec, et des experts de la forêt ont vivement fait part de leur mécontentement.
Le président de l’Ordre des ingénieurs forestiers du Québec, Patrick Pineault, croit que l’acceptabilité sociale est essentielle pour moderniser le régime forestier.
Il suggère que les Premières Nations, les industriels, groupes environnementaux, villégiateurs, et utilisateurs travaillent, ensemble, en amont, à la cocréation des règlements qui découleront de la loi-cadre qu’entend adopter la ministre caquiste.
Selon Patrick Pineault, le régime forestier est à la croisée des chemins dans le contexte actuel où les conséquences des changements climatiques font déjà des ravages.
On doit se poser la question sur la foresterie du lendemain, donc du futur, dit-il.
La foresterie, ce n’est pas comme l’agriculture. Ça ne se fait pas en un an, ça se fait en 30, 50, 70 ans. Il faut avoir cette ambition pour se projeter plus loin.
Il croit qu’il est possible, avec les technologies actuelles, de réfléchir à la forêt de demain. On doit réfléchir, entend-il, aux choix d'essences d’arbres qui seront résilientes aux changements climatiques.
Mise en garde contre l'hypocrisie par un acteur du milieu
Au Bas-Saint-Laurent, dans la circonscription de la ministre, la modernisation du régime forestier fait craindre l’industrialisation de la forêt.
Tout le monde regarde de face la beauté du fleuve, mais je n’aimerais pas ça qu’on ait l'hypocrisie des forêts en plein dos.

Dans la région, 55 % des forêts sont de tenure publique et 45 % sont privées.
Photo : Radio-Canada / Jean-Luc Blanchet
Comme de nombreux opposants au projet de loi 97, Guillaume Ouellet, qui est le président de la ZEC du Bas-Saint-Laurent et des ZEC du Québec, une entité qui administre des activités de plein air, de pêche et de chasse en territoire public, remet en question le concept de triade que veut instaurer la ministre avec son nouveau régime forestier.
Ce concept repose sur la division de la forêt publique en trois zones, soit une zone d’aménagement forestier prioritaire, pour la récolte du bois, une zone de conservation et une zone multiusage. Pour l’instant, la forêt québécoise est considérée comme une zone multiusage.
Il faut se le dire, on va se faire mettre dehors de certains secteurs fauniques, calcule M. Ouellet. Selon lui, des pans de la forêt publique seront dédiés à la production forestière intensive, donc réservés à l’industrie forestière.
Le président des ZEC n’est pas contre la foresterie, mais il craint que la cohabitation devienne plus complexe dans les forêts habitées, comme celles du Bas-Saint-Laurent, où les amateurs de plein air, de chasse et de pêche partagent le territoire public avec l’industrie forestière.
Il cite en exemple la protection d’une frayère où les poissons déposent leurs œufs pour se reproduire. Le projet de loi 97 ne fournit pas de détails, quant à lui, sur la marche à suivre pour la protection de cet habitat, dans les zones qui seront dédiées uniquement à l’exploitation forestière.

Une plantation de résineux sur la ZEC du Bas-Saint-Laurent
Photo : Radio-Canada / Jean-Luc Blanchet
Il déplore aussi les plantations de monoculture. Je pense qu’ils ajoutent de l’huile sur le feu, estime-t-il, tout en ajoutant que couper du bois, c’est normal. Mais ce qu’il déplore, c'est que des forêts mixtes soient remplacées par des rangs d’épinettes. Notre faune, elle est où là-dedans?
Je vois mal un peu d’agilité pour les changements climatiques quand on priorise des zones à 30 % en zone intensive avec une ou deux espèces d’arbres pour avoir de la matière ligneuse au sein des industriels, pense Guillaume Ouellet.
Les propriétaires de lots privés priorisés
La modernisation du régime forestier est une avancée pour les propriétaires de forêts privés au Bas-Saint-Laurent. Ils sont favorisés pour l’approvisionnement des usines. Une percée intéressante pour les 85 000 producteurs forestiers privés qui détiennent 45 % de la forêt bas-laurentienne.
Ça nous amène des revenus plus intéressants, plus constants et ça permet plus de prévisibilité, affirme le président du Syndicat des producteurs forestiers du Bas-Saint-Laurent, Michel Lepage.
Le président des ZEC du Québec, Guillaume Ouellet, opine dans le même sens que les producteurs forestiers privés. Je pense qu’ils devraient faire plus partie de la loop, dit-il. Selon lui, les producteurs privés sont soucieux de l’aménagement de leurs forêts. Favoriser la récolte de leur bois est bénéfique pour l’économie locale.
Un contrat social pour la forêt
Le président de l’Ordre des ingénieurs forestiers du Québec, Patrick Pineault, n’hésite pas à comparer le régime forestier à un contrat social.
De nature optimiste, il entend collaborer avec la ministre qui a annoncé qu’elle apportera des amendements à son projet de loi durant l’été.
Il demande que le nouveau régime forestier soit indépendant, régionalisé, sans tomber dans le piège d’un zonage strict.
La ministre propose avec son projet de loi que l’aménagement forestier soit régionalisé, mais elle compte continuer les discussions dans les régions du Québec cet été pour peaufiner cet aspect.
Mon objectif est de s’assurer d’avoir des décisions qui soient régionalisées, assure-t-elle, en précisant qu’elle veut éviter de répéter les erreurs ou difficultés rencontrées par le passé.
Maïté Blanchette Vézina rappelle aussi que le Québec s’est doté d’un forestier en chef indépendant et que c’est ce dernier qui dicte la quantité de coupes forestières sur le territoire de la province.