En 1521, Magellan pose le pied pour la première fois sur les terres des îles Mariannes. On imagine sa surprise lorsqu'il découvre que ces petites îles du Pacifique sont déjà habitées par un peuple autochtone, les Chamorros. Ces îles volcaniques isolées, situées au niveau de la fosse océanique du même nom, sont pourtant situées à plus de 2 000 kilomètres de l'archipelarchipel des Philippines !

Un incroyable voyage de plus de 2 000 km dans le Pacifique

Les premiers observateurs se rendront compte que ce peuple appartient à la famille culturelle et linguistique austronésienne (ou malayo-polynésienne). Bien plus tard, des études archéologiques révèleront que le premier peuplement des îles Mariannes remonte à 3 500 ans. En 2020, une analyse ADNADN confirmera ce que les linguistes avaient soupçonné : les tout premiers colons, arrivés sur l'île de Guam, étaient originaires du centre ou du nord des Philippines.

L'ensemble de ces données laisse penser que les premiers habitants de l'île auraient donc effectué une traversée de plus de 2 000 kilomètres en plein océan. Un périple qui semble totalement incroyable en 1500 avant notre ère !  

La question qui se pose désormais est de savoir si ce voyage était intentionnel... ou accidentel. Et comment ces navigateursnavigateurs ont pu survivre durant un si long périple. Une équipe de chercheurs pourrait toutefois bien avoir la réponse à ces questions, grâce à l'analyse de minuscules résidus de grains de riz trouvés dans une grotte de l'île de Guam !

Des traces qui témoignent d’une importation de riz il y a 3 500 ans

À l'heure actuelle, les ressources alimentaires des insulaires des Mariannes reposent principalement sur le fruit à pain, la bananebanane, la noix de coconoix de coco, le taro et les ignames. Le riz, bien qu'étant une culture typique des sociétés asiatiques, n'a pas trouvé sa place dans cet environnement, en raison des contraintes météorologiques et du type de sol. Pourtant, les archéologues ont réussi à en trouver des résidus dans la grotte côtière de Ritidian, sur l'île de Guam.

L'analyse du sol de la grotte a en effet révélé la présence de phytolithesphytolithes, de minuscules structures de silicesilice (comme le sablesable), qui se forment à l'intérieur des cellules des plantes, et notamment du riz. Lorsque la plante meurt et se décompose, ces structures restent intactes très longtemps et peuvent ainsi être retrouvées dans les sédimentssédiments.

L'analyse des phytolithes retrouvés dans la grotte a révélé qu'ils provenaient de grains de riz. Une analyse minutieuse révèlera d'ailleurs que ce riz a été stocké dans des poteries, dont les restes ont été découverts sur le site. Celles-ci ont pu être datées, les résultats indiquant un âge de 3 500 à 3 100 ans.

Une plante certainement utilisée lors des rituels

Pour les chercheurs, auteurs d'un article publié dans la revue Science Advances, il s'agit là d'une preuve que les premiers insulaires du Pacifique ont emporté avec eux du riz lors de cette longue traversée en pleine mer. Il devait donc s'agir d'un voyage mûrement réfléchi et planifié.  

Après leur installation dans les îles des Mariannes, le riz a continué à être cultivé, mais de façon visiblement restreinte. Les chercheurs supposent que cette céréale ne devait être consommée qu'à des moments très spécifiques, peut-être lors d'événements rituels. Dans la culture chamorro, les grottes sont en effet des endroits sacrés. Il est probable que la grotte de Ritidian devait ainsi être réservée à ces pratiques rituelles.

Ces restes de grains de riz témoignent ainsi de ce qui est certainement l'un des voyages les plus extraordinaires de l'histoire de l'humanité.