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Les microdistilleries québécoises reviennent à la charge auprès du gouvernement Legault avec une nouvelle étude sous le bras. Elles réclament trois changements qui leur permettraient d’augmenter leurs revenus de 36,6 millions $ par année.
Marcel Mailhot a investi massivement dans la microdistillerie Grand Dérangement, qui produit le gin SAGA à partir des grains de son exploitation agricole. Cinq ans après sa fondation, la première microdistillerie dans Lanaudière n’est toujours pas rentable. Au final, c’est pas nous qui faisons de l’argent, c’est la SAQ et le gouvernement, dit l’entrepreneur, qui continue tout de même de croire en son projet.
Une partie du problème, selon lui : le montant versé à la Société des alcools du Québec pour chaque bouteille vendue dans la boutique attenante à la salle de production. Je fais moins de profit quand je vends une bouteille sur place que quand elle est vendue dans une succursale de la SAQ.
Pour un gin à 50 $, donne-t-il en exemple, il lui reste dans les deux cas environ 14 $ après la majoration de la SAQ et les taxes. Or, pour une vente sur place, il doit payer la main-d'œuvre, le chauffage, l’entretien, etc. Dans mon magasin, la SAQ ne fait absolument rien pour nous.
Il reçoit aussi environ 6 $ par bouteille du Programme d’appui au positionnement des alcools québécois (PAPAQ), mais c’est un programme temporaire, précise-t-il.
Des règles jugées désuètes
L’Union québécoise des microdistilleries (UQMD), qui représente plus de 50 des 70 producteurs de spiritueux québécois, demande à Québec de moderniser la loi, un cadre hérité de la prohibition des années 1920.
On est en train d’étouffer les microdistilleries québécoises, alors que d’autres provinces, dont l’Ontario et la Colombie-Britannique, allègent leur cadre réglementaire, dit Nicolas Bériault, président de l’UQMD et copropriétaire de la distillerie 3 Lacs.
Si les barrières commerciales sont abolies comme le souhaitent les premiers ministres des provinces, les producteurs québécois risquent, selon lui, d’être moins solides financièrement que leurs nouveaux concurrents.
L’économiste Frédéric Laurin, professeur à l’Université du Québec à Trois-Rivières et chercheur à l’Institut de recherche sur les PME, a chiffré les retombées de trois changements réglementaires potentiels à 36,6 millions $.
Selon ses calculs, réduire de 15 % la majoration de la SAQ pour les ventes sur le lieu de production rapporterait 14,6 millions $ de revenus supplémentaires aux microdistilleries; permettre la vente directe aux bars et aux restaurants, 6,9 millions $; permettre la vente de prêts-à-boire à base de spiritueux dans les épiceries et les dépanneurs, 15,1 millions $.
Revenus supplémentaires pour les microdistilleries
Avec les changements à la loi réclamés
Réduction de la majoration de la SAQ pour les ventes sur place : 14,6 millions $
Vente directe aux bars et aux restaurants : 6,9 millions $
Vente de prêts-à-boire à base de spiritueux dans les épiceries et les dépanneurs : 15,1 millions $
Total : 36,6 millions $
Source : Étude de Frédéric Laurin pour l’UQMD
Le cadre réglementaire est vraiment tout croche, commente Frédéric Laurin. Le gouvernement semble tolérer les producteurs de spiritueux, alors qu’il devrait les considérer comme des PME de développement économique, qui génèrent notamment de l’écotourisme. L’industrie a réalisé des ventes de plus de 100 millions $ l’an dernier et emploie plus de 620 personnes.
À court terme, l’UQMD concentre ses efforts sur la diminution de la majoration de la SAQ et la vente directe aux bars et aux restaurants. Ce sont des gains rapides et concrets pour pratiquement toutes les microdistilleries, dit Nicolas Bériault.
La vente de prêts-à-boire à base de spiritueux dans les épiceries et les dépanneurs n’était pas une priorité jusqu’à récemment, mais elle le devient de plus en plus. La catégorie connaît une forte croissance (+ 136 % à la SAQ depuis cinq ans) et les retombées potentielles de 15 millions $ ont agréablement surpris l’UQMD.
Un dossier politique complexe
Questionné sur la majoration de la SAQ, le ministère des Finances du Québec a renvoyé la balle à la SAQ, qui n’a pas répondu à nos questions au moment d'écrire ces lignes.
De son côté, le cabinet du ministre délégué à l'Économie Christopher Skeete a envoyé une déclaration par courriel : Nous sommes bien au fait des demandes des microdistillateurs. Ça fait partie de nos discussions et de nos échanges.
L’Union québécoise des microdistilleries a fait de nombreuses relances auprès du gouvernement. Même dans le dossier de la vente directe aux restaurateurs, pour lequel le premier ministre François Legault s’est dit ouvert en mars dernier, rien n’est réglé encore.
Tout bloque au ministère des Finances, dit Nicolas Bériault, président de l’UQMD. Le ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, de son côté, appuierait les revendications des microdistilleries.
Trop de microdistilleries pour le marché?
Après le boom du gin pendant la pandémie, l’offre dépasse maintenant la demande des consommateurs. Environ deux tiers des 70 microdistilleries québécoises sont déficitaires.
Des propriétaires ne se versent pas de salaire, sont fortement endettés, réalisent des marges de profit insuffisantes et font appel à des bénévoles, résume Frédéric Laurin. Ce n’est pas tenable à long terme. Certaines vont fermer.
L’industrie doit aller vers des produits à valeur ajoutée, comme des gins distinctifs, ou des produits à plus fortes marges de profit, comme le whisky, dit le chercheur.
Un constat qui rejoint Marcel Mailhot, propriétaire de la microdistillerie Grand Dérangement. Trop de microdistilleries tentent de concurrencer Seagram et Diageo avec des produits semblables, mais des volumes bien moindres. C’est perdu d’avance.
L’entrepreneur croit pouvoir se distinguer avec ses spiritueux fabriqués de A à Z sur place, du grain à la bouteille. Ça coûte plus cher, mais on peut mettre de l’avant le côté artisanal et créatif. Des arguments qui devraient permettre à la microdistillerie de devenir rentable d’ici quelques années, espère-t-il.