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Les temps sont durs pour les magasins généraux en Abitibi-Témiscamingue, alors que deux d'entre eux ont récemment annoncé leur fermeture.
À Angliers, au Témiscamingue, le marché Bernèche, connu anciennement comme le marché Léane, fermera définitivement ses portes le 30 août prochain.
Plus à l’est, à Laforce, les administrateurs du magasin général ont également mis la clé sous la porte ces dernières semaines.
Julie Bernèche, propriétaire du magasin général qui porte son nom, à Angliers, souligne que la décision de fermer le commerce n’a pas été prise de gaieté de cœur.

La propriétaire du commerce indique à ses clients que Poste Canada évalue les options concernant le comptoir postal.
Photo : Radio-Canada / Jean-Michel Cotnoir
C’est vraiment un processus qui a mûri dans les derniers mois, particulièrement depuis les Fêtes, indique-t-elle. Angliers, c’est vraiment un village touristique, on a un bel achalandage pendant les mois d’été, mais malheureusement, les mois d’hiver sont vraiment tranquilles et ne permettent pas au commerce d’être viable sur une année complète.
Les mois d’été épongent un peu les mois d’hiver, mais l’été, ça dure trois mois.
Du côté de la Chambre de commerce Témis-Accord, la co-présidente, Karie Bernèche, soutient que les magasins de Angliers et de Laforce ne sont pas des cas isolés, et que plusieurs autres vivent des difficultés.

Le marché général du village de Laforce est fermé.
Photo : Radio-Canada / Bianca Sickini-Joly
Non, pas du tout [des cas isolés]. Je suis à la Chambre de commerce depuis maintenant six mois et j’ai eu accès à des confidences d'entrepreneurs qui se sentent un peu dépassés actuellement, révèle Mme Bernèche, dont la sœur Julie gère le magasin d’Angliers.
Selon Karie Bernèche, la crise forestière qui a frappé le Témiscamingue en 2024 n’est pas étrangère aux difficultés rencontrées cette année par certains commerces.
Ç’a fait beaucoup les manchettes au printemps dernier, la fermeture des usines, ça avait pris beaucoup de place dans les médias. Là, on a l’impression de revivre le printemps 2024, mais ça se ressent au niveau des répercussions chez les commerçants qui voient leur achalandage et la rentabilité diminuer, observe-t-elle.
Des commerces viables?
Avec une population d’environ 300 habitants, certains pourraient s’interroger sur la viabilité d’un magasin général à Angliers, ou dans tout autre village de même taille.
Là n’est pas la question, selon Julie Bernèche.

L'histoire du magasin général de Angliers remonte à plus de 100 ans.
Photo : Radio-Canada / Jean-Michel Cotnoir
J’ai le goût de croire que c’est viable, j’ai vraiment envie de croire à ça. Mais la question qu’on devrait se poser, ce n’est pas si c’est viable ou pas, c’est nécessaire. À Angliers, on a une population vieillissante, on a beaucoup de personnes âgées qui ne sortent plus ou très peu du village. Ces gens-là ont besoin d’un commerce pour aller chercher leurs produits de première nécessité, plaide-t-elle.
Parmi les difficultés rencontrées par les propriétaires de magasins généraux, Julie Bernèche évoque le difficile équilibre de l’inventaire.
Elle estime que les citoyens, un peu partout sur le territoire, doivent faire un effort supplémentaire s’ils souhaitent préserver les quelques commerces de proximité de cet acabit encore en activité.

Le magasin propose une variété d'aliments frais, des produits nettoyants et des produits d'hygiène personnelle.
Photo : Radio-Canada / Jean-Michel Cotnoir
C’est pas juste chez nous. C’est Laverlochère, c’est Notre-Dame-du-Nord. Si tu as une épicerie dans ton village, je crois que chaque citoyen devrait avoir la conscience de faire au moins quelques achats sur une base hebdomadaire pour assurer une variété dans son commerce. Plus il y a de gens qui y vont, plus on est capables, en tant que commerçants, d’offrir cette variété-là et de favoriser l’achalandage, dit-elle.
Soulignant que la décision de fermer son commerce est définitive, Mme Bernèche juge néanmoins important de sensibiliser la population à cet enjeu.
Pour nous, il est trop tard, mais il n’est pas trop tard pour d’autres et il y en a plein d’autres en difficulté présentement. Je pense que si tout le monde se conscientise en disant : “J’ai besoin de telle ou telle chose cette semaine. Pourquoi j’irais à Ville-Marie ou à New Liskeard, au Maxi ou au Wal-Mart?” mentionne-t-elle.
C’est correct d’avoir des gros commerces, mais si on achète que là, on ne peut plus avoir de petits commerces.
Rivaliser avec Amazon
En plus de la nourriture, les magasins généraux offrent une gamme de produits divers, dont plusieurs sont disponibles en ligne, grâce à un seul clic.
Le copropriétaire du magasin général de Rémigny, Yanick Vachon, soutient qu’il s’agit d’une réalité à laquelle il a été confronté il y a trois ans, lorsqu’il a acheté le commerce avec sa conjointe Annie Leclerc.

Annie Leclerc et Yanick Vachon sont copropriétaires du magasin général de Rémigny.
Photo : Radio-Canada / Jean-Michel Cotnoir
Quand je suis arrivé, il y avait beaucoup de choses. Des jouets, des articles de chasse, de pêche, des bottes, des vestons. Un moment donné, tu te poses la question : ”Est-ce que j’ai vraiment besoin de garder tout ça?” Parce que si tu commandes sur Amazon, demain il est chez vous à la porte. Mais la journée que quelqu’un en a vraiment besoin, si tu ne l’as pas, les gens vont aller au centre-ville acheter tout ce qu’ils ont besoin, soupèse-t-il.
M. Vachon soutient que son commerce n’est actuellement pas en danger de fermeture.
Le réseau de dépanneurs que sa conjointe et lui possèdent à Rouyn-Noranda a offert un coussin pour traverser la première année, qu’il qualifie de très difficile.

L'été, le magasin général de Rémigny peut compter sur les clients du camping.
Photo : Radio-Canada / Jean-Michel Cotnoir
L’homme d'affaires souligne que le camping de Rémigny, dont il est aussi copropriétaire, fait une grosse différence sur la rentabilité du magasin général durant les mois d’été.
Nous autres c’est le camping, la chasse et la pêche. Ça commence de bonne heure au mois de mai et ça finit après la chasse. Un moment donné, ça tombe mort d’un coup sec alors on doit mettre du monde à l’arrêt, sur le chômage, pour être capable de passer à travers l’hiver, stipule Yanick Vachon, qui évoque la difficile gestion de l’inventaire lors de cette transition rapide entre les deux saisons.
Faire sa part
Selon Karie Bernèche, de la Chambre de commerce Témis-Accord, tout le monde doit faire sa part, tout le temps, pour aider à maintenir en vie les quelques magasins généraux encore ouverts dans la région.
Si chaque résident d’Angliers avait dépensé 30-40 % de ce qu’il consomme ailleurs en alimentation, s’il l’avait dépensé dans son propre village pour les besoins de base, ça fait une différence très très concrète, donne-t-elle en exemple.

Karie Bernèche est coprésidente de la chambre de commerce Témis-Accord. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Bianca Sickini-Joly
En plus d’une plus grande présence des citoyens locaux, Julie Bernèche croit de son côté que les grossistes peuvent faire leur part en faisant preuve de souplesse au moment de prendre les commandes.
Avec les grossistes, on n’a pas le choix de commander des gros formats. Dans les fruits et légumes, 18 brocolis, je ne les passe pas en une semaine, donc je ne peux pas me permettre de commander des brocolis. Il y aurait peut-être un petit peu plus de gestion et peut-être des frais supplémentaires, mais j’en commanderais moi des brocolis à l’unité, soulève-t-elle.
Je pense que ça peut être viable, mais il faut que ça vienne de tout le monde. Ça ne peut pas reposer uniquement sur les épaules de nos plus fidèles clients qui ne nous ont jamais abandonnés et qui ont toujours été là.

Des aliments, de la boisson, des vêtements et de l'essence, entre autres, à vendre au magasin général de Rémigny.
Photo : Radio-Canada / Jean-Michel Cotnoir
Selon Yanick Vachon, il est possible d’exploiter un magasin général dans une localité de moins de 500 habitants sans perdre d’argent. Il ajoute que la clientèle locale doit être au rendez-vous régulièrement, pas uniquement pour acheter la fameuse pinte de lait manquante.
C’est possible, mais c’est beaucoup beaucoup de travail. Il ne faut pas que tu regardes tes heures, pour venir à bout d’arriver à la fin de l’année et dire : “On a passé au travers, il reste un peu d'argent”. Mais tu ne regardes pas tes heures, ça, c’est sûr, conclut-il.