Il ressemble à une créature tout droit sortie d’un film d’animation un peu trop inspiré… et pourtant, il est bien réel. Voici Panacanthus cuspidatus, plus connu sous le nom de sauterelle épineuse, ou pour les intimes, le diable épineux. Un nom qui lui va comme un gant, tant cet insecte d’Amazonie cumule les bizarreries biologiques — entre arme défensive, régime carnivore et performances vocales dignes d’un festival.
Des piques, partout
Difficile de passer à côté de sa silhouette : tête protubérante en forme de couronne, corps hérissé de piquants, pattes bardées d’épines. Une allure qui, à elle seule, suffit à dissuader la plupart des prédateurs. C’est précisément le but. Car dans la nature, afficher des armes redoutables peut éviter d’avoir à s’en servir.
Ces épines ont aussi un avantage évolutif supplémentaire : elles permettent au diable épineux de se fondre dans la végétation dense et acérée de son habitat. Une tactique de camouflage bien utile pour un insecte qui, malgré son apparence agressive, n’est pas au sommet de la chaîne alimentaire.
Carnivore et opportuniste
Là où la plupart des sauterelles sont strictement herbivores, Panacanthus casse les codes : omnivore, elle ne se contente pas de grignoter des feuilles. C’est aussi une chasseuse habile, qui utiliserait ses longues pattes épineuses pour capturer de petites proies. Imaginez un grillon doté des bras de M. Chatouilleur… mais qui aurait décidé de se mettre sérieusement à la prédation.
Ce comportement, rare chez les orthoptères, intrigue les entomologistes. Il souligne surtout la plasticité alimentaire de l’espèce, précieuse dans un environnement aussi compétitif et imprévisible que la forêt tropicale.

Le cri du diable
Et comme si cela ne suffisait pas, le diable épineux est aussi un chanteur infatigable. Pour séduire les femelles, le mâle grimpe sur un perchoir et se met à striduler, c’est-à-dire à produire un son en frottant certaines parties de son corps. Le résultat ? Un cri puissant, audible à plusieurs dizaines de mètres… mais aussi un appel risqué.
Car ce chant n’attire pas que les partenaires potentiels : les chauves-souris sont aussi à l’écoute. C’est peut-être pour cela que certaines études ont montré une corrélation entre la complexité du chant et la quantité d’épines. Plus l’insecte est bruyant, plus il aurait intérêt à être indigeste.
La fascination du terrain
Mais au-delà des faits scientifiques, c’est souvent l’émerveillement du terrain qui parle le mieux. Le photographe naturaliste Nick Volpe, qui a eu la chance de croiser Panacanthus en pleine forêt, ne tarit pas d’éloges :
« C’est probablement la sauterelle la plus intimidante au monde. Regardez tous ces pics ! C’est un carnivore, et il le montre à merveille. Une véritable royauté parmi les sauterelles. »
Difficile de ne pas partager son enthousiasme.
Alors, le diable épineux mérite-t-il son titre d’insecte le plus étrange du monde ? Un look d’apocalypse, un régime inattendu, des chants de sirène… et tout ça, dans quelques centimètres de chitine. On vous laisse trancher.