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« Je pleure dans mon masque de plongée » : le cri du cœur d’un capitaine Fabien Roché face à l’état des océans

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À l’heure où la conférence des Nations unies sur les océans (Unoc-3) débute à Nice, tout le monde semble avoir un avis à donner sur le sujet de la protection du milieu maritime et son exploitation : politiques, scientifiques, journalistes… Mais peu d’entre eux ont vraiment expérimenté l’océan de manière concrète. Entretien avec le capitaine Fabien Roché, qui a parcouru les mers et océans du monde entier.

Au-delà des grands discours qui seront prononcés lors de l'Unoc-3, il y a des hommes et des femmes qui consacrent leur vie à l'océan au quotidien et qui sont les premiers témoins des bouleversements que ce milieu si fragile subit.

Fabien Roché est l'un de ceux qui ont grandi sur les océans du monde, des zones froides aux régions tropicales. Capitaine de navire d'expédition, spécialisé en zones polaires, ce passionné de navigation depuis l'enfance s'est également engagé dans la protection des océans, que ce soit par le biais des associations qu'il soutient ou des conférences qu'il donne auprès du grand public. « La mer est un point d'observation privilégié des changements: je suis en première ligne pour pouvoir observer ce qui se passe. C'est ce dont je parle lors de mes conférences, tout est basé sur le vécu. Je veux rendre aux océans ce qu'ils m'ont tant donné », nous explique le capitaine.

Futura : En quoi consiste le travail d’un capitaine exactement ?

Fabien Roché: C'est un travail d'équipe, mais aussi une grande responsabilité. Je suis responsable de la sécurité du navire, des passagers, de l'équipage et de la bonne exécution de l'itinéraire. Parfois, il faut prendre des décisions qui ne font pas plaisir à tout le monde en raison de la météométéo ou de la réglementation. Mon travail, c'est aussi de porter une attention particulière à l'impact environnemental de nos opérations.  

Fabien RochéC'est un très long chemin et cela m'a pris environ 11 ans, malgré mon expérience maritime. J'avais déjà traversé l'Atlantique avec mes parents quand j'avais 10 ans. J'ai commencé tard, car j'ai pris une année sabbatique pour partir en mer avec l'ONG « Marins sans frontières » lorsque j'avais 18 ans. Finalement, j'ai pris cinq années sabbatiques pendant lesquelles j'ai obtenu mon premier rôle de capitaine. J'ai ensuite travaillé sur des voiliers privés pendant deux ans et ça m'a permis de gagner assez d'argentargent pour refaire des études à 23 ans. J'ai été à l'École nationale supérieure maritime et j'ai ensuite gravi les échelons.

Futura : Vous avez beaucoup navigué sur les mers des pôles, est-ce que vous avez constaté un changement en Arctique et en Antarctique ces dernières années ?

Fabien RochéJ'ai navigué sur l’Astrolabe au début de ma carrière, un brise-glace utilisé pour ravitailler et amener les scientifiques à la base scientifique Dumont-d'Urville en Antarctique. J'ai trouvé ça absolument fabuleux, ça m'a chamboulé. J'ai vu les pôles pour la première fois en 1998. J'ai vu des zones autrefois inaccessibles, qui se dégagent maintenant plus tôt dans la saison. J'ai vu beaucoup moins de glace l'année dernière au Svalbard, ce qui pose problème pour beaucoup d'animaux qui vivent sur les glaces de mer, la banquise. Et quand je suis parti fin juillet l'année dernière, je n'avais toujours pas vu les baleines arriver, alors que d'habitude elles arrivent au début de la saison. On voit aussi arriver des populations d'orques en Arctique, alors qu'avant il n'y en avait jamais.

L'Arctique se réchauffe officiellement trois à quatre fois plus vite que le reste de la Planète, mais certaines régions comme le Svalbard, c'est jusqu'à 6 °C de plus en 50 ans : cette zone se réchauffe donc jusqu'à sept fois plus vite que le reste du monde. On est loin d'un environnement figé dans la glace comme on l'imagine. Au Svalbard comme au Chili, on arrive parfois dans des zones non cartographiées car avant il y avait un glacier à cet endroit-là.

Futura : Vous avez aussi navigué dans les eaux tropicales, quels sont les changements majeurs que vous avez observés là-bas ?

Fabien RochéDans mon enfance, on plongeait dans des environnement intacts, sublimes, quasiment vierges de toute influence humaine. On allait pécher pour le déjeuner et le dîner : j'ai vu les coraux tels qu'ils devraient être. Maintenant j'ai envie d'arrêter de plonger, je pleure dans mon masque de plongée quand je vois les coraux blanchis. On vit l'un des pires épisodes de blanchissement des coraux du monde actuellement.

Le plastiqueplastique est aussi une plaie. J'ai fait un voyage en Inde récemment et la pollution plastique était atroce. En Asie centrale et du Sud-Est, le plastique à usage unique est un problème majeur : 98 % de pollution, c'est du plastique et des déchetsdéchets de pêchepêche. On retrouve des tongs et des crocs partout, en AntarctiqueAntarctique comme sur les plages des tropiquestropiques.

Futura : Qu’est-ce qui vous a le plus marqué lors des nombreuses traversées que vous avez faites au cours de votre carrière ?

Fabien RochéJ'ai fait ma première traversée de l'Atlantique quand j'avais 10 ans et je notais les données météo quand j'étais gamin. À la hauteur du Cap vert, l'eau de mer était à 27 °C, au mois de mai. L'année dernière, quasiment au même endroit, à la même époque de l'année, la mer était à 30,5 °C. Bien sûr, c'est uniquement de l'observation ponctuelle, mais on a quand même pris 3 °C et demi en 45 ans, c'est immense et cela affecte grandement le climatclimat et les phénomènes météorologiques extrêmes, tels que les cyclones et pluies diluviennes.

Les traversées sont devenues tristes, il ne se passe pas une heure sans que l'on voit un morceau de plastique. Je n'ai jamais vu de plastique quand je faisais la traversée de l'Atlantique quand j'avais 10 ans. On voit aussi des sargasses partout, en nappes immenses, et cela crée des problèmes dans les zones tropicales : elles étouffent les autres écosystèmesécosystèmes, envahissent les plages, et relâchent des gazgaz toxiques qui affectent les populations locales.  

Fabien RochéJe ne vois pas ça comme un dilemme, mais plutôt comme un défi. En tant que capitaine, j'ai un véritable levier d'action : on choisit des itinéraires qui évitent autant que faire se peut les zones les plus sensibles, on travaille avec les autorités locales pour limiter nos actions et on sensibilise les passagers. Les premières expéditions polaires ont d'ailleurs été créées pour montrer aux gens les changements dans ce milieu.

J'arrive à toucher beaucoup de personnes à bord, je sensibilise les gens, j'essaye de faire passer un message au plus large public. Dans mes expéditions polaires, je montre le recul des glaciers sur les cartes et sur les images satellitaires. Les gens se rendent compte du recul car ils sont sur place, ils le voient de leurs yeuxyeux. J'espère qu'ils en parlent ensuite autour d'eux.

Futura : Est-ce qu’il y a eu des progrès importants faits en matière d’écologie dans le fonctionnement des yachts et autres navires d’expédition ?

Fabien RochéOui, beaucoup et peut-être plus que sur les moyens de transport terrestre, alors même que les transports routiers ont un impact plus important sur le climat. Les réglementations sont très sévères sur des zones comme la Norvège et le Svalbard et nous faisons sans arrêt des formations. Le secteur maritime est en évolution permanente. Le monde du yacht est très critiqué et je m'en suis éloigné, mais c'est un peu comme la Formule 1 : les moyens sont tels dans le monde du yacht qu'on peut les utiliser pour innover. Certains, trop peu encore, propriétaires commencent à devenir plus vertueux. C'est le cas pour le navire Black Pearl, l'un des plus grands yachts du monde. Il a énormément fait réfléchir sur d'autres technologies.

Futura : Vous êtes impliqué dans une organisation contre l’exploitation minière des fonds marins, pouvez-vous nous en parler ? Pourquoi faut-il se préoccuper de ce problème selon vous ?

Fabien RochéC'est une industrie qui n'existe pas encore, mais qu'il faut stopper avant. C'est l'un des plus grands dangers sur les océans. Le fond des océans a été moins exploré que la surface de la lunelune, les conséquences pourraient être irréversibles. Cela implique la destruction d'écosystèmes inconnus et de la biodiversitébiodiversité, mais aussi la perturbation du plus gros puits de carbonepuits de carbone du monde. On ne sait pas où on s'aventure ! Je me suis engagé avec le collectif Look Down Action. Le danger est imminent, le 24 avril dernier, Donald Trump a signé un décret autorisant le minageminage des eaux américaines et des eaux internationales, ce qui est contraire au droit international. C'est une compagnie canadienne au bord de la faillite qui a poussé Donald Trump. Elle a été guidée par la soif de l'argent, mais elle n'a pas la technologie. C'est une entreprise suisse, Allseas, qui possède les navires et la technologie. C'est contradictoire, car la Suisse a déjà signé un moratoiremoratoire contre l'exploitation minière des océans.  

Futura : Qu’attendez-vous de la conférence des Nations unies sur les océans (Unoc) qui se tient à Nice du 9 au 13 juin et êtes-vous optimiste ou pessimiste sur le futur des océans ?

Fabien Roché: J'essaye d'être lucide, il y a des signaux alarmants, mais on voit ce qui peut arriver lorsqu'on a des gens déterminés. L'activité humaine a tellement réussi à polluer le monde, que maintenant on va en tirer les conséquences et c'est le moment d'agir.

L'Unoc doit arriver à passer du consensus mou à des engagements fermes. J'attends que plus de pays rejoignent le moratoire contre le minage des fonds marins. Il y a aussi la question des aires marines protégées. Notre président se vante d'avoir des aires marines protégées, mais seulement 0,1 % des aires marines sont vraiment protégées, c'est un peu une farce, on autorise le chalutage industriel dans certaines. Il faut soutenir la pêche artisanale durable qui proliférait si on avait vraiment des aires marines protégées strictes : il y aurait un effet bénéfique. Il faut que la politique suive la science, mais la politique a plutôt tendance à suivre l'économie.

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