Quand on parle d’exploits spatiaux, les premiers pas de Neil Armstrong sur la Lune viennent souvent en tête. Pourtant, c’est une autre mission Apollo, un peu moins célèbre, qui détient un record bluffant : celui du vol spatial habité le plus rapide jamais réalisé.
Le 26 mai 1969, lors de sa rentrée atmosphérique vers la Terre, la mission Apollo 10 atteint la vitesse vertigineuse de 39 937,7 km/h. Aucun humain, avant ou après, n’est jamais allé aussi vite.
Une répétition… supersonique
Apollo 10, lancée le 18 mai 1969, est souvent décrite comme la “répétition générale” d’Apollo 11. À deux mois du premier alunissage de l’Histoire, la NASA veut tester tous les éléments de la mission, sans pour autant tenter de poser le module lunaire.
L’équipage — Thomas Stafford, John Young et Eugene Cernan — effectue donc un vol complet vers la Lune, s’insère en orbite lunaire, et fait descendre le module “Snoopy” jusqu’à seulement 14,4 km de la surface lunaire, avant de le faire remonter. Pendant ce temps, le module de commande “Charlie Brown” reste en orbite, prêt à les récupérer.
Ce test grandeur nature permet de valider les procédures, les communications, et les trajectoires. Il est aussi l’occasion, pour ces trois astronautes, de vivre un moment rare : voir la Terre se lever au-dessus de l’horizon lunaire.
Une rentrée dans l’atmosphère… à couper le souffle
C’est au retour de la mission que les choses deviennent véritablement spectaculaires. Lorsqu’Apollo 10 entre dans l’atmosphère terrestre, à plus de 120 km d’altitude, le module file à plus de 1 093 m/s, soit près de 40 000 km/h. Un record toujours invaincu pour un vol habité.
À ces vitesses, le frottement avec l’atmosphère transforme le vaisseau en une boule de feu blanc et violet, selon les mots d’Eugene Cernan. Pour ralentir, la capsule utilise l’air comme un frein naturel, avant de déployer trois parachutes géants qui assurent une descente contrôlée jusqu’à l’océan Pacifique.

Et aujourd’hui ?
Depuis 1969, aucune mission habitée n’a dépassé ce record de vitesse. Même les missions les plus récentes, comme celles de SpaceX ou du programme Artemis, restent en deçà. Ce n’est pas faute de technologie, mais plutôt une question de sécurité : plus la vitesse est élevée, plus la rentrée atmosphérique devient risquée.
En comparaison, la sonde solaire Parker, envoyée par la NASA en 2018, a pulvérisé tous les records de vitesse en 2024 avec une pointe à 692 000 km/h — mais sans équipage humain à bord. À cette allure, elle pourrait traverser les États-Unis en… 23 secondes.
Un record symbolique
Le record d’Apollo 10 reste un témoin fascinant d’une époque où les astronautes étaient aussi des cobayes, prêts à frôler les limites pour ouvrir la voie aux missions suivantes. À moins qu’un jour, une mission vers Mars ou au-delà ne vienne remettre ce chiffre mythique en question.
Mais pour l’instant, la couronne du “plus rapide humain de l’histoire” est solidement attachée à une capsule nommée Charlie Brown, revenue de la Lune à toute vitesse… sans jamais s’y poser.