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Il y a un an, la mine d'or Eagle appartenant à l’entreprise Victoria Gold près de Mayo, au Yukon, a été le théâtre de l'un des pires déversements miniers de l'histoire du Canada. Aux prises avec les conséquences environnementales et financières de la catastrophe, la communauté tente toujours de s’en remettre.
Avec une population de moins de 500 habitants, la communauté de Mayo, à cinq heures de route au nord de Whitehorse, est tissée serrée. Ici, tout le monde se connaît et le magasin général, sur la rue principale, est le lieu où les habitants viennent s’approvisionner et socialiser.
Rencontré alors qu’il y prenait son café, l’ancien chef de la Première Nation Na-Cho Nyäk Dun, Simon Mervyn, n’hésite pas à parler de dévastation à la suite du déversement minier qui s’est produit à la mine Eagle.

En tant que chef des Na-Cho Nyak Dun de 2015 à 2023, Simon Mervyn avait été au cœur des efforts de la communauté pour appuyer la construction de la mine Eagle de Victoria Gold.
Photo : Radio-Canada / Francis Plourde
C'est une catastrophe sur le plan financier. Pour nos jeunes qui étaient en affaires avec la compagnie minière, le boom est terminé, dit-il. Ce n’était pas prévu, on n’a pas eu le temps de planifier l’arrêt des activités. Ils sont dévastés et ce sont eux qui vont devoir réparer ça.
Avant la fermeture de la mine, les retombées étaient, selon lui, importantes pour la communauté. En 2023, la nation Na-Cho Nyäk Dun a reçu près de 1,4 million $ en redevances de la compagnie minière, sans compter les bourses d'études pour les jeunes de la communauté et les emplois créés.
Consultez notre dossier sur l'effondrement de la mine Eagle au Yukon.
Tout s’est arrêté le 24 juin 2024, quand la plateforme de lixiviation en tas servant à extraire l’or, située à flanc de montagne, s’est affaissée, déversant environ 4 millions de tonnes de sédiments sur une distance de plus d’un kilomètre. Le cyanure que la mine utilisait pour séparer l’or des sédiments a contaminé le ruisseau Haggart, à proximité.

Des barrières à poisson ont été installées tout le long du ruisseau Haggart.
Photo : Radio-Canada / Francis Plourde
Au cours des semaines qui ont suivi, l’entreprise, jadis perçue comme un modèle par le gouvernement yukonnais, a été mise sous séquestre et son PDG a démissionné. Les frais liés au nettoyage sont estimés à environ 220 millions $.
Depuis, c’est l’état d’urgence. Pendant des semaines après le déversement, des dizaines de poissons morts ont été retrouvés le long du ruisseau et l’eau est maintenant jugée impropre à la consommation, car le taux de cyanure y est toujours trop élevé, selon les autorités.
Une communauté en deuil
Rencontrée alors qu’elle cueillait de l’arnica, une fleur qu’elle utilise comme baume médicinal, Krystal Profeit a du mal à cacher sa colère. On avait l'habitude d'aller chasser l'orignal dans le secteur, mais avec le déversement, on ne peut plus. Ça a atteint la nappe phréatique, dit-elle.

Krystal Profeit, une résidente de Mayo qui s'était opposée à la construction de la mine, est toujours profondément affectée par le déversement de Victoria Gold.
Photo : Radio-Canada / Francis Plourde
Je croyais qu’il y avait des mesures en place pour nous protéger. J'avais confiance en mon gouvernement, raconte-t-elle. Malgré son opposition au projet, elle a brièvement travaillé sur le chantier lors de la construction, mais elle a rapidement déchanté.
Dans les mois qui ont précédé le déversement, il ne restait que deux ou trois personnes de notre nation qui y travaillaient toujours. [...] Presque au lendemain du déversement, le PDG a fait ses valises et est parti. On ne l'a pas revu depuis. Je n'ai même pas entendu le mot "désolé".

Franck Patterson, un aîné Na-Cho Nyäk Dun, craint les conséquences du déversement, qui affecteront à long terme son petit-fils. Il voudrait voir la mine rouvrir, mais sous certaines conditions, notamment qu'on n'utilise plus de cyanure pour extraire le métal.
Photo : Radio-Canada / Francis Plourde
Victoria Gold a été cupide, juge de son côté l'aîné Frank Patterson.
Son petit-fils à ses côtés, il raconte les conséquences pour sa communauté, dont le nom signifie Peuple de la grande rivière. En contaminant le ruisseau adjacent, c’est tout l’écosystème qui a été affecté.
Nous ne savons pas quels sont les dommages causés au cours d'eau et aux poissons. On ne pêche plus près du pont à une vingtaine de kilomètres de la mine, déplore-t-il.
Dans la région, des prospecteurs d’or utilisant d’autres méthodes de séparation estiment avoir été injustement associés à la catastrophe.
Alan Baar et son patron attendent depuis 18 mois maintenant le permis qui leur permettra d’exploiter leur gisement.

Le prospecteur Alan Baar estime que lui et son employeur ont été indirectement touchés par le déversement, car ils attendent depuis 18 mois un permis qui leur permettra d'exploiter leur gisement.
Photo : Radio-Canada / Francis Plourde
[L’incident de Victoria Gold] joue probablement un rôle important dans les délais, en raison de leur mauvaise gestion, analyse Alan Baar. Le prospecteur déplore que ses pairs qui récoltent l’or en séparant des sédiments sans produits chimiques aient été mis dans le même bateau que Victoria Gold.
Ça ne rend pas notre vie facile et nous avons des factures à payer, dit-il. Après avoir vu son salaire coupé de moitié et son employeur risquant la faillite, il se prépare à l'idée de déménager à Dawson pour travailler.
Chronique d’une catastrophe annoncée?
Le rapport sur les causes du déversement ne sera déposé qu’à la fin du mois. Avec le recul, toutefois, plusieurs au Yukon relèvent déjà des failles dans la façon dont la mine avait construit son bassin tout en haut de la montagne.
On ne bâtit pas des lacs en haute montagne, on les bâtit dans le bas de la montagne, explique le camionneur Yves Lafond, qui a travaillé à la construction du bassin. Je trouvais que ça n’avait pas de sens puis je me disais : "Me semble que ça appelle à la catastrophe.”

Yves Lafond a travaillé pendant six mois à la construction de la mine Eagle de la compagnie Victoria Gold. Déjà, lors de la construction, il redoutait un affaissement du réservoir qui était construit à flanc de montagne.
Photo : Radio-Canada / Francis Plourde
Pour sa part, Frank Patterson juge que les ingénieurs ont mal conçu le site, sans tenir compte de l’impact de la construction dans une région connue pour son pergélisol, qui affecte la stabilité du terrain.

Gabrielle Benoit vit à Mayo depuis six ans et partage le sentiment d'impuissance de la communauté, Victoria Gold ayant été condamnée à une amende par le passé, sans conséquences majeures.
Photo : Radio-Canada / Francis Plourde
Gabrielle Benoit, une résidente de Mayo, estime de son côté que l’accident a mis en lumière le traitement spécial accordé aux compagnies minières. Dans les mois précédant l’accident, Victoria Gold avait reçu une amende de moins de 100 000 $ en raison d’un déversement, alors que la mine avait engrangé en 2023 des profits de 400 millions $.
Tout le monde disait : "Ça ne nous surprendrait même pas que de se mettre aux normes, ça leur coûte plus cher que de payer l'amende." Dans ce cas-là, quelle est la motivation des mines à remplir leurs obligations? Ce sont des frustrations dues à une certaine impuissance.
Espoirs de reprise
Malgré les conséquences, plusieurs, au Yukon, voudraient voir une entreprise reprendre la mine pour l’exploiter de nouveau. PricewaterhouseCoopers (PwC), le syndic de faillite de la minière Victoria Gold, a annoncé cette semaine son intention de vendre la mine.

PricewaterhouseCoopers, la firme qui a repris la mine, a reconstruit un nouveau bassin, au pied de la montagne celui-là, pour que la mine puisse reprendre ses activités.
Photo : Radio-Canada / Francis Plourde
À Dawson, berceau de la ruée vers l’or, le prospecteur manitobain Scott Heasley rêve de la racheter pour l’exploiter, mais sans utiliser le même procédé que celui de Victoria Gold.
Il reste encore beaucoup de gisements, explique-t-il. Tout l'équipement est encore là et ça permettrait de ramener tous ces travailleurs de Dawson ou de Whitehorse au travail. C'est primordial, parce que c'est difficile en ce moment.

Le prospecteur manitobain Sean Heasley, avec l'aide de deux autres partenaires d'affaires, voudrait racheter la mine Eagle. Rencontré à Dawson, il estime qu'il y a moyen d'extraire l'or de la mine sans utiliser de cyanure.
Photo : Radio-Canada
Même chez les Na-Cho Nyäk Dun, touchés en plein cœur, l’aîné Frank Patterson n’est pas fermé à l’idée.
Je veux que les personnes à qui ils doivent de l'argent soient payées et je veux aussi que les emplois soient assurés, explique-t-il. Mais rouvrir la mine avec l'entente que nous avions? Non, nous devons nous asseoir et conclure un nouvel accord pour nous assurer que les générations futures soient protégées. Nous n'allons pas recommencer à transporter des tonnes de cyanure dans cette région.