« Je ne te demande pas ton nom, mais quelle est ta douleur. » Pasteur
« Quand un savant meurs, c’est une bibliothèque qui brûle »
Amadou Hampâté-Bâ (discours à l’Assemblée de l’UNESCO 1960)
Résumé
Si on devait en une phrase qualifier le docteur Ait Benameur : Nous dirons que c’est un être d’exception :
« Une personne d’exception, c’est quelqu’un dont la présence, la sensibilité ou l’engagement laisse une empreinte durable sur les autres. Elle se distingue non seulement par ses compétences ou ses réalisations, mais surtout par la profondeur humaine qu’elle incarne au quotidien. Que ce soit par sa créativité, sa capacité d’écoute, son intelligence du cœur ou son engagement auprès de sa communauté, elle fait du bien » (1).
Nous avons eu le privilège de croiser ces personnes sur notre chemin
Docteur Abdelhamid Ait Benameur a un parcours universitaire où la dimension humaine est prépondérante. Il a marqué la médecine algérienne par son érudition, sa rigueur scientifique, et sa pédagogie exigeante mais bienveillante et sa disponibilité à soigner à réparer des détresses.. .Homme de foi en la science, de culture et d’éthique, il incarnait une médecine qui soigne l’être humain, et non seulement la maladie. Ses patients, étudiants et collègues parlent, souvent de son écoute, de sa simplicité, de sa sagesse, et de son respect profond de la dignité humaine. Il rappelle la lignée des êtres d’exception comme le docteur Albert Schweitzer : médecin-théologien, prix Nobel, pionnier de l’éthique du « respect de la vie ».
Le docteur Ait Benameur a été « invité » dit on, à faire valoir ses droits à la retraite, lui qui a former des générations de médecins en leur inculquant le noble usage de médecine Tout cela parce des administratifs irresponsables ont décider de se passer cette Norme d’éthique de savoir et de profonde humanité Un professeur qui vit pratiquement a hôpital qui rend visite a ses malades plusieurs par jours avec ou sans ses internes Présent aux aurores il quitte la clinique à 22h pour revenir à 4h du matin après sa gymnastique . Prof Benameur a été récupéré rapidement pour le privé, son corps se défendant, car ce n’est pas la dimension pécuniaire qui l’intéresse avant tout, mais la possibilité de continuer à opérer à surveiller en Réanimation RA les constantes physiologiques, faire la causette, raser les malades au nom de cette dimension humaine qui tend a disparaitre, il faut le regretter, graduellement de l’hôpital public.
Témoignages d’admiration et de reconnaissance
Voici quelques témoignages recueillis sur le Dr Abdelhamid Aït Benamar chirurgien et formateur emblématique :
Témoignage 1 Le respect que j’ai pour ce grand Monsieur est infini . C’est Mr Ait Benamar Abdelhamid le maitre De la chirurgie en Algérie .un véritable trésor national . Malgré ses compétences chirurgicales impressionnantes , et sa valeur scientifique immense et son esprit organisé et bosseur , il a choisis de passer sa vie professionnelle dans un petite clinique publique en Algérie avec les Algériens. Il n’a jamais pratiqué aucune intervention dans les cliniques privées . Il était et il est toujours la pour les malades. Il Les accompagne de façon vraiment attentive , il se rend au travail à 5h de matin et en repart à 22h, tous les jours sans exception, même les jours fériés et les fêtes. Il s’inquiète pour ses malades et pour les malades des autres. Il vérifie les plus petits détails. Je suis extrêmement fière d’avoir eu la chance de travailler avec Lui , de le connaitre et d’être dans le même champ opératoire avec lui et le voir entrain de réaliser des choses merveilleuses . Que Dieu le protège et le garde pour nous et pour les patients » Site https://www.instagram.com/p/CmRRjq8NzbQ/ .
« Le Docteur Abdelhamid Ait Benamar… se rend sur son lieu de travail tous les jours à 4 h du matin et en repart à 22 h… pendant 40 ans… Bien qu’il soit considéré comme le meilleur chirurgien d’Algérie, il n’a jamais pratiqué aucune opération dans les cliniques privées… Il a préféré rester maître-assistant car il ne voulait consacrer de temps qu’à ses patients. » Plusieurs de ses anciens étudiants ou patients confirment : « Il a inspiré des milliers d’étudiants algériens qui le respectaient et l’admiraient… Un grand monsieur ! » fr.linkedin.com+1fr.linkedin.com+1https://www.instagram.com/p/CmRRjq8NzbQ/
Un autre message souligne : « Ses mains d’or ont permis de réussir brillamment l’opération… un suivi scrupuleux de ses patients…»
Des messages récents saluent sa mise à la retraite : « Bonne retraite Dr Ben Amar, votre dévouement et votre expertise ont marqué de nombreux esprits, vous avez été un professeur exceptionnel… » annumed.sante-dz.com+7facebook.com+7instagram.com+7
Une vidéo-clip musical le présente comme le Maestro de la chirurgie en Algérie. Un message Instagram évoque son respect infini en tant que maître de la chirurgie en Algérie Il a choisi de rester maître-assistant, refusant les titres académiques honorifiques, pour continuer à servir et former sur le terrain Sa mise à la retraite a été vécue comme une perte pour le CHU.
Un homme, un exemple. Le Professeur Benameur – pour beaucoup d’entre nous ce nom suffit – incarne l’idéal même du médecin tel que nous le rêvions, tel que nous avions l’espoir de le former, et tel que l’hôpital public, hélas, n’ose plus le protéger. Formateur infatigable de générations de médecins, il incarnait le respect de la vie, du savoir, et de l’éthique médicale dans ce qu’elle a de plus noble et de plus humain.
Dans un temps où l’hôpital s’effondre, où l’université ploie sous le poids de la bureaucratie et de la marchandisation, nous avons laissé partir, sans égard, un maître, un veilleur, un soignant d’exception. Mis à la retraite alors que son seul défaut est d’aimer ce qu’il fait au point de ne pas compter les années considérant qu’il est toujours capable d’opérer. Le fait qu’il puisse continuer à opérer dans des cliniques privées, démontre à contrario qu’il a été accueilli pour son savoir , son savoir faire, chacun sachant que les cliniques privées sont toujours à la recherche de compétences.
Une vocation au service de l’humain , pas une carrière.
Le docteur Ait Benameur n’a jamais couru après les titres, ni les honneurs. Maître-assistant volontaire dans un monde où l’on se bat pour des promotions, il voulait simplement opérer, transmettre, et accompagner. Ce chirurgien se levait à l’aube, Il entrait dans la chambre des malades , observait, palpait, échangeait. Il savait raser un patient, ajuster un oreiller, ou murmurer quelques mots dans le silence d’une garde. Ce n’est pas une anecdote. C’est une leçon. Car ce sont ces gestes-là, devenus rares dans nos hôpitaux, qui font que la médecine reste une science humaine. L’hôpital public n’évalue pas à sa juste mesure, la richesse humaine qu’il incarnait, le Dr Benameur fut très vite récupéré par le privé. Mais il ne s’y engagea pas par intérêt. Il s’y replia, à contre-cœur, pour continuer à soigner, à former, à préserver un lien vivant avec le malade.
Mutatis mutandis pour être moi aussi enseignant au long cours , je ressens cette satisfaction de transmettre aux générations futures . Je me souviens avoir évoquer avec lui ce noble métier, et j’avais dit sur le ton d’une boutade: « quand sonnera l’heure de la retraite, je suis prêt à payer pour enseigner » …Les médecins comme le docteur Ait Benameur, mais aussi, les chercheurs, les formateurs silencieux ne sont pas des marchandises, ce sont des encyclopédies c’est une déconstruction, peut être involontaire, du savoir à un moment où nous devons constamment, continuer à sédimenter la connaissance et solliciter nos éminences à continuer à éclairer le chemin . C’est le remplacement de l’idéal par l’indifférence,
Nous devons nous réveiller ! L’hôpital public n’est pas qu’un lieu de soins. Il est une boussole morale pour une nation. Et lorsque cette boussole se dérègle, tout le reste est détricoté : la confiance des patients, la formation des futurs médecins, la conscience de notre devoir collectif.
Appel pour une médecine éthique
Il existe des noms que l’on n’efface pas. Des visages, des voix, des gestes qui restent dans la mémoire des étudiants, des patients, des hôpitaux. Le docteur Aït Benameur est de ceux-là. Chirurgien de renom, enseignant exemplaire, figure tutélaire de la médecine algérienne, il a incarné une éthique du soin que le système hospitalier semble, aujourd’hui, incapable de protéger, et parfois même d’accepter. Mis à la retraite récemment par décision administrative, sans réelle considération pour son apport scientifique, pédagogique et humain, le Dr Benameur n’a, pourtant, jamais cessé de former, de soigner, de transmettre.
Il est temps de valoriser nos bâtisseurs silencieux – pas seulement dans les discours posthumes, mais dans les décisions concrètes qui engagent leur avenir et celui de la relève. Le moment de repenser les critères actuels d’évaluation des médecins hospitalo-universitaires : En revalorisant les enseignants-producteurs de science et de savoir, En libérant, sans complaisance, ceux qui n’apportent plus rien à l’hôpital public, En protégeant les maîtres de l’effacement prématuré, au nom de l’arithmétique des flux de fonctionnaires indépendamment des situations spécifiques posées par les serviteurs de l’Algérie au sens noble du terme ; ils voient leur vocation comme un service à assurer, non pas uniquement comme une carrière
Retraite et reconnaissance différenciée selon la contribution réelle
L’âge biologique ne peut être le seul critère de mise à la retraite ; la contribution au savoir et au bien commun doit aussi compter.
Je m’élève contre la mise à la retraite des besogneux, qui ont donné le meilleur d’eux même durant leur carrière. Et qui, du jour au lendemain, se voient remerciés, alors , comme qu’ils peuvent encore dispenser un savoir performant au pays. Leur départ encouragé, voire attendu pour libérer mécaniquement un poste attendu Peu importe, ce que deviendra l’équipe que l’on vient de défaire avec le professeur, l’essentiel est que le poste est libéré au nom de la justice collective. Ne peut on pas, penser à un corps de professeurs hors fonctions publiques qui continueraient au vue de leur savoir et dévouement à faire profiter les hôpitaux de leur expérience . Ils peuvent aussi être des professeurs invités qui interviennent dans les établissements du Sud où un cruel besoin de compétence se fait sentir.
Comment reconnaître, soutenir et retenir les vrais serviteurs du savoir et du soin, et comment assainir les institutions de ceux qui les parasitent sans rien rendre à la communauté. la nécessaire honnête indispensable dans l’évaluation scientifique avec une frontière étanche entre le pédagogique et recherche en face de l’administration pour éviter les interférences Nous devons affirmer l’indépendance de l’évaluation scientifique (face à l’administration), Le rejet de la marchandisation du soin et du savoir, Cette réflexion va au cœur d’une réforme éthique et structurelle urgente de l’Université et de l’Hôpital publics Prendre comme critère dans la mise à la retraite non pas, uniquement l’âge, mais la production scientifique continue Il faut être reconnaissant aux producteurs de science évaluée par leur paire ce qui sont dévouée à la science assigner les douleurs et ceux qui gèrent pour certains leur carrière négligeant leur vocation. Peut-être même les libérer avant l’âge de la retraite .
Peut être qu’il faille s’inspirer des modèles anglo- saxons où l’enseignant le chercheur est évalué chaque année, il est maintenu en poste en fonction de sa productivité . Même les étudiants notent leur enseignant. Il est vrai que les études sont payantes et la réputation d’une université dépend de sa capacité à attirer les meilleurs ; Rien à voir avec les études dans le pays où tout est gratuit. Mais les moyens du pays ne sont pas infinis, il y a un devoir de solidarité Il est nécessaire, alors, de mettre de l’ordre pour la pérennité de l’hôpital.
Les Principes clés de la charte d’éthique et de déontologie
En 2010 à la demande du ministre de l’enseignement supérieur avec des collègues nous avons codifié une charte d’éthique et de déontologie pour l’université algérienne et ceci pour lutter contre la dégénérescence inexorable de notre rapport à une médecin à dimension humaine comme les besogneux, les gardiens du Temple tentent de l’exercer, en entretiennent, fébrilement, la flamme du savoir et du savoir faire et du savoir être, tant il est important de donner l’exemple aussi par la prestance. Une charte nationale de l’éthique médicale, serait en bonne place dans toutes les facultés. Elle sera élaborée avec les praticiens.
Ce document réaffirme des principes universels et propres à notre société, rappelant « les grands principes qui guident la vie universitaire. La charte pose notamment une frontière étanche entre deux sphères : d’une part la gouvernance scientifique, confiée exclusivement aux enseignants-chercheurs via un conseil scientifique, et d’autre part l’administration (recteur, directeur ) chargée des tâches logistiques, de représentation de l’État et de protection des libertés académiques. Dans ce sens, elle précise que « les questions scientifiques restent du ressort exclusif des enseignants-chercheurs »academia.edu. La responsabilité administrative doit servir à garantir l’équilibre entre efficacité logistique et participation démocratique, sans empiéter sur l’espace académique réservé à la recherche et à l’enseignement.
Selon la charte, l’accession à un grade universitaire doit reposer « uniquement sur des critères académiques »academia.edu. Autrement dit, c’est la production scientifique évaluée par les pairs et l’engagement pédagogique qui doivent primer dans la promotion des enseignants-chercheurs. À ces critères institutionnels s’ajoute, dans l’esprit de nombreux praticiens, la dimension fondamentale du soin réel au chevet du malade. Ainsi, fidèle à l’esprit hippocratique, le médecin universitaire est invité à maintenir un contact étroit avec la clinique En intégrant explicitement la bienveillance au patient parmi ses valeurs, la charte oppose une médecine de vocation à toute tentation de marchandisation.
Comment former des médecins qui cumulent à la fois le savoir et l’humanisme ?
Sans remettre en causes les immenses efforts du pays, dans le domaine, médical. Nous allons changer de paradigme. Il sera, alors, possible de former une nouvelle génération de médecins capables de : guérir et soigner, écouter et agir. penser et aimer. La médecine devrait être appréhende comme vocation comme acte profondément humain, pas comme prestation marchande. Cela exige de rompre avec le modèle néolibéral du soin comme marchandise et de s’inspirer de figures comme le docteur Aït Benameur pour réconcilier science et conscience, compétence et compassion.
Le crédo à inculquer se référant, constamment, sur la Charte de l’éthique et de déontologie, contient plusieurs recommandations.
*Former des médecins compétents, éthiques, engagés, ancrés dans la société, capables de résister à la déshumanisation du soin et aux logiques néolibérales
*Pour cela, il nous faut penser la formation médicale dès la première année en incluant des enseignements en sciences humaines et sociales . Notamment l’éthique, et l’histoire de la médecine,
*Former à l’éthique, au doute en refusant la formation purement technique, déshumanisée. Il s’agira d’enseigner l’éthique médicale non pas comme une matière isolée, mais comme une manière d’être médecin dans un monde incertain, avec des décisions complexes.
*Enfin, il nous faudra lutter contre la marchandisation du soin en encourageant les étudiants à réfléchir au sens du soin, à la vocation médicale loin du libéralisme médical (soins à deux vitesses, logique de profit,).
Reste l’épineux devoir du diplômé vis à vis de son pays Il est tout de même triste de constater que nous n’avons pas pu ou su garder nos diplômés . Le devoir de tout médecin vis à vis de son pays est une dette morale vis-à-vis de son pays pour la formation reçue. Ceci implique aussi une profonde portée civique. Il appelle à restaurer une médecine du service, de la transmission et de la dignité humaine, contre la marchandisation croissante du soin. Nous devons cependant avoir comme cap les principes suivants
Le médecin est au service de la vie, pas du profit. : Tout diplômé en médecine publique devrait être convaincu de s’engager pour 2 à 4 ans dans une mission d’intérêt national (zones rurales, dispensaires, prison, santé scolaire…). Cette noble mission devrait être vue non comme une punition, mais comme un honneur citoyen — comparable au Service civil sanitaire ou au Service sanitaire étudiant » à Cuba
S’agissant du médecin expatrié , il pourrait, le moment venu , quand sa situation financière le lui permet pouvoir rendre au pays ce qu’il a investi pour lui de façon diverse, notamment en parrainant la formation d’un jeune médecin qui fait une spécialité à l’étranger ou bien de s’organiser pour pouvoir venir régulièrement au pays pour apporter son concours à un enseignement de top niveau, une participation à une publication et un jury de thèse.
Conclusion
Le Docteur Aït Benameur a consacré toute sa carrière au service des malades, incarnant avec rigueur et générosité les valeurs d’altruisme qui font la grandeur de la médecine. Ses collègues soulignent un dévouement sans faille, une humanité rare et un sens du travail bien fait. Par son exemple, il a transmis à ses étudiants l’idée qu’enseigner et soigner sont indissociables, et qu’aucun grade académique ne saurait se substituer à la présence au chevet du patient. Son héritage engage aujourd’hui la communauté médicale à poursuivre son combat pour une médecine libérée des logiques marchandes.
Il est vrai que la médecine connaît une crise morale en larguant les vraies valeurs, celles de la compétence, de l’humilité du travail bien fait, de la sueur, en un mot, du mérite, loin de tout trafic et népotisme. En réhabilitant l’éthique qui est une exigence morale , chaque promotion professionnelle aura comme cap le travail scientifique, l’enseignement dévoué et les soins rendus au malade. L’exemple inspirant du docteur Aït Benameur doit nous conduire à réaffirmer par notre engagement, que la médecine reste un sacerdoce au service de l’Homme. Ensemble, signons cet appel pour une médecine éthique et humaniste.
En rendant hommage au docteur Benameur, c’est une dette que nous payons et c’est à toute une idée de la médecine que nous rendons justice : celle de Pasteur, qui disait “Je ne te demande pas ton nom, mais quelle est ta douleur.” C’est cette médecine-là que nous voulons défendre. Une médecine qui soigne les corps sans oublier les âmes, qui forme sans formater, et qui ne confond pas carrière et vocation., et qui ne confond pas carrière et vocation. Nous invitons les médecins, étudiants, enseignants, patients et citoyens en prenant exemple sur cet homme d’exception qu’est le docteur Ait Benameur , à construire ensemble une médecine digne de ce nom, au service du pays, et non du profit et ceci pour que la médecine reste une vocation. Pour que le soin ne devienne pas un service. Pour que nos enfants puissent encore rêver de devenir médecin comme on devient gardien de l’humain.
Professeur Chems Eddine Chitour
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La source originale de cet article est Mondialisation.ca