Au début des années 1960, la société Heineken a commercialisé de manière éphémère la World Bottle (WOBO), une bouteille de bière en verre tout à fait spéciale. Vendue au même prix que les bouteilles classiques, celle-ci avait été toutefois pensée pour avoir une seconde vie : devenir une brique de construction.

De contenant à brique de construction

Fondée en 1864, la marque de bière néerlandaise Heineken est aujourd’hui un géant du marché de la bière, produisant pas moins de 250 marques aux quatre coins du monde. Comme toute grande société, Heineken a toujours tenté de se démarquer sur le plan marketing. L’exemple le plus parlant est peut-être celui de la bouteille World Bottle (WOBO), ayant fait l’objet d’une commercialisation en 1964, comme l’explique une publication officielle de la marque.

Il est ici question d’une bouteille de forme rectangulaire capable de s’emboiter avec ses consœurs et ce, un peu comme des briques de LEGO. L’objectif ? Permettre aux consommateurs d’utiliser l’objet tel un matériau de construction après avoir bu son contenu. Deux formats sont produits (350 ml et 500 ml) à environ 100 000 exemplaires et un petit abri de jardin est même construit par la marque (voir ci-après).

Heineken avait construit un abri de jardin avec des bouteilles WOBO, faisant office de preuve de concept.
Crédits : Heineken Collection Foundation

A l’origine de cette idée, nous retrouvons Alfred « Freddy » Heineken, petit fils du fondateur de la marque. En voyage sur l’île de Curaçao en 1960, l’intéressé s’indigne de la présence de nombreux détritus sur les plages, dont une partie n’est autre que des bouteilles de sa marque. Lui vient alors l’idée de créer une bouteille à double usage : contenir sa bière puis devenir une brique de construction.

Un projet très vite abandonné

Malgré une collaboration avec l’architecte néerlandais John Habraken et une communication abondante au niveau du projet, celui est finalement resté à l’état de prototype. En effet, le service marketing craignait que l’image chic de la marque s’érode en raison de cette fin vie plutôt « rustique ». D’autres craintes concernaient la possibilité que des consommateurs portent plainte pour mauvaise utilisation. Malgré cet échec, le projet WOBO a inspiré plusieurs projets d’écoconstruction, dont les earthships de l’architecte étasunien Michael Reynolds. Sa principale idée était de réutiliser ce que la société rejette habituellement, notamment les pneus usagés, les canettes en aluminium et évidemment, les bouteilles en verre.

Crédits : Heineken Collection Foundation

Le projet WOBO était-il trop en avance sur son temps ? Peut-être. Il faut dire qu’aujourd’hui, la transition écologique semble être plus que jamais une nécessité. Au passage, soulignons que depuis juin 2025, le système de réemploi d’emballages en verre (consigne) a fait son retour en France sous la forme de tests et ce, dans quatre régions. Il va sans dire que sur le papier, le réemploi des bouteilles est un concept bien plus intéressant qu’une réutilisation en tant que matériau de construction. En effet, le fait est que toute bouteille perdue doit être produite à nouveau pour sa fonction principale de contenant.

Enfin, s’il reste possible de croire à une simple opération markéting de la part d’Alfred Heineken, son initiative a néanmoins le mérite d’avoir eu une dimension écologique à une époque où les gouvernements ne sensibilisaient pas vraiment les populations au sujet.

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