C’est la fin du transport adapté tel que Laval l’a connu pendant 18 ans. La Société des transports de Laval (STL) met fin à sa collaboration avec la compagnie Autobus Chartrand, obligeant cette dernière à congédier plusieurs de ses employés.

Nous sommes au regret de vous informer que, malgré tous nos efforts, la STL persiste à vouloir confier le service de minibus de transport adapté de Laval à la STM, et de la STM exclusivement à l’industrie du taxi, écrit Chartrand dans l’avis de congédiement collectif envoyé aux employés concernés et obtenu par Radio-Canada.

Le 31 décembre 2025 marquera la fin du contrat de transport adapté entre la STL et Chartrand : 54 chauffeurs et une dizaine d’employés du volet administratif de Chartrand perdront ainsi leur emploi.

La STL discute présentement avec la STM afin de lui confier la gestion du service de transport adapté à Laval. L’entente est toujours en négociation, confirme la STM par courriel.

Et en février dernier, la STM a annoncé le transfert de son service de minibus en transport adapté vers l’industrie du taxi. À l’époque, 90 % des déplacements de transport adapté étaient déjà assurés par des partenaires de cette industrie. Le taux devrait atteindre 100 % en 2026.

Une vive inquiétude

C’est très douloureux, laisse tomber Eric Chartrand, propriétaire de la compagnie du même nom, en entrevue. Celui-ci tente de replacer les employés visés par le licenciement collectif, mais il ne pourra pas récupérer tout le monde.

Eric Chartrand se dit préoccupé par l’avenir des employés licenciés, mais aussi par celui des usagers du transport adapté. Il espère que le niveau de service sera maintenu et craint que les taxis ne soient pas à la hauteur.

Dans une lettre envoyée à la directrice du STL le 10 octobre, et dont Radio-Canada a obtenu copie, le directeur général de l’organisme AVC Aphasie-Laval exprime sa vive inquiétude face aux changements envisagés dans la gestion du transport adapté sur le territoire lavallois.

Ces modifications, qui visent à confier une part importante du service à des entreprises de taxi plutôt qu'à des chauffeurs d'autobus formés, soulèvent des questions majeures de sécurité, de conformité, d'environnement, d'équité sociale et de saine gestion des fonds publics.

Richard Carle s’inquiète surtout de la sécurité des usagers vulnérables, évoquant que les chauffeurs d’autobus affectés au transport adapté reçoivent une formation spécialisée. L’impact environnemental du remplacement d’autobus par des taxis individuels et les impacts économiques tels que la perte d’emplois sont aussi au centre des préoccupations dans la lettre.

M. Carle écrit qu’aucune étude d'impact détaillée ni justification financière claire n'a été rendue publique.

Il ajoute qu'AVC Aphasie-Laval et plusieurs autres organismes communautaires lavallois représentant des personnes handicapées appellent la STL et la Ville de Laval à suspendre tout changement tant qu’une analyse complète n’aura pas été effectuée.

On aimerait bien avoir des données, dit Richard Carle, en entrevue avec Radio-Canada. Ce qu’on demande, c’est de communiquer avec les organismes, de parler du projet, de nous expliquer le pourquoi et de démontrer concrètement les gains qui seront faits pour nos gens.

Selon lui, l’excellence était déjà au rendez-vous. Le modèle à prendre, c'était celui de Laval. Alors, pourquoi on amène ça ailleurs?

Les sociétés de transport se veulent rassurantes

Dans une réponse par courriel, la STL affirme être consciente que cette transition peut susciter des préoccupations. Nous nous sommes d’ailleurs engagés à leur revenir lorsque nous serons en mesure de leur donner les détails de cette transition, écrit-elle.

La STL note aussi que la qualité de service et le respect des besoins particuliers de la clientèle demeurent des priorités absolues.

Elle assure aussi qu’un partenariat potentiel avec la STM représenterait la meilleure option en vue d’optimiser nos dépenses sur le long terme, tout en assurant la poursuite d’un service de qualité pour notre clientèle lavalloise.

La question de la saine gestion des fonds publics est aussi évoquée par la STM sur son site web pour justifier les discussions entreprises sur la livraison du transport adapté entre elle et la STL.

Le transfert de la gestion du transport adapté de la STL à la STM n’est pas encore finalisé; les discussions sont en cours. En ce qui concerne la transition entamée par la STM du service de minibus vers l’industrie du taxi, la société assure que les clients ayant besoin d’un déplacement en minibus auront toujours accès au service.

La STM s’assure, au moyen de mécanismes contractuels robustes, que la qualité du service est respectée, ainsi que la fiabilité et la ponctualité du service, assure la STM dans une réponse par courriel. Les fournisseurs doivent mobiliser le nombre de voitures nécessaires pour réaliser les heures de service que nous demandons.

L’organisation mènera aussi un suivi de la livraison du service.

Après avoir appris que son contrat avec la STL ne serait pas renouvelé, cet été, Eric Chartrand a proposé ses services à la STM. Mais elle n’en veut pas, dit-il. Ça ne fait pas partie de ses projets.

Par courriel, la STM explique que les offres de services refusées ne répondaient ni aux besoins définis ni au virage entamé.

Avec des informations de Thomas Gerbet