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Sur le chemin Parent, en territoire Nehirowisiw, il se passe quelque chose de sombre. Les camions des compagnies forestières roulent jour et nuit pour sortir du bois. Vides, les 18 roues ressemblent à d’énormes cages thoraciques, prêts à se combler de nos poumons. Les gestionnaires camouflent les coupes à blanc en laissant quelques arbres frêles, érigés au centre du pillage telles des croix. Nous sommes dans un cimetière.
Plus loin, l’orée de la forêt est jeune, dense et homogène. Une compagnie y a replanté des épinettes en monoculture qui, avec la sécheresse, deviendront plutôt des allumettes. Au kilomètre 133, il y a un campement. Des gardiens du territoire se tiennent aussi droits que les conifères pour dire non à ce saccage.
Le projet de loi 97 devrait nous terroriser. C’est une réforme totale du régime forestier qui laisse tous les droits à l’industrie pour l’exploitation, même dans des zones écologiquement vulnérables et traditionnellement protégées par les peuples autochtones. Le gouvernement offrirait un tiers de la forêt aux industries, destine un autre tiers, où les coupes resteraient possibles, à des activités dites « multi-usages », et n’accorderait qu’un tiers à la protection.
Raser des pouponnières à orignaux, abattre les forêts ancestrales, les dénuder jusqu’aux rives des lacs, voilà le carnage que prépare cette loi. Ajoutons à l’équation les feux de forêt qui causent des ravages sans suivre les cartographies humaines et nous obtenons la somme de la dévastation. Chaque arbre scié nous arrache un peu plus d’air. Chaque feu nous rapproche d’un point de non-retour. Nous manquerons de quoi respirer bientôt.
Alarme
Prendre son masque N95 pour se rendre au travail devrait nous faire nous insurger. Un coucher de soleil écarlate dû au smog devrait nous faire rougir de colère. MétéoMédia qui ajoute la fumée dans la météo journalière et la carte des feux de forêt à celles des orages devrait être une alarme inarrêtable.
Les enfants qui prennent un crayon jaune pour dessiner le ciel devraient être assez de raisons pour qu’on se révolte dans les rues. Il y a des responsables à cette destruction et il faudra les forcer à peser sur le frein.
Ceux qui résistent nous redonnent du souffle. Le 11 avril dernier, l’alliance de Premières Nations Mamo (« ensemble » en innu) est formée pour unifier la résistance autochtone sur les territoires contre le projet de loi 97. Depuis le 28 mai, Mamo et les Gardiens du territoire Nehirowisiw Aski font l’exercice de leur souveraineté ancestrale en déclarant les opérations forestières sur leurs terres illégales, en expulsant la machinerie et en empêchant les camions de se ravitailler. Ils y sont 24 heures sur 24 depuis plus de deux mois, pour défendre les forêts et notre avenir.
Pourquoi acceptons-nous la fin du monde plutôt que de nous rallier à ceux qui la refusent ? L’illusion du confort est notre plus grand ennemi. Un confort qui facilite le déni, qui permet qu’on tourne les yeux lorsque des gens bloquent une industrie au nom de la fin du monde. Il nous faut refuser la fin qui se pointe à l’horizon, nous souder en barricade et rompre avec les désastres. Rejoindre Mamo, ensemble.
Notre stratégie ne doit pas consister seulement à affronter l’empire extractiviste, mais aussi à l’assiéger. Le priver d’oxygène avant qu’il nous asphyxie. Faire barrage. Refuser la dévastation. Il n’est plus question de la droite contre la gauche, mais du peuple contre une poignée d’élus et de milliardaires. Les empires ont tous une date d’expiration.
Il ne nous reste plus beaucoup de temps, alors autant être braves. Battons-nous pour sauver les couleurs. Laisserons-nous, sans la moindre insurrection, les enfants dessiner des ciels jaunes ? Je préfère vous faire la promesse de lutter pour qu’il reste toujours bleu.
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