L’heure n’est pas aux réjouissances pour la famille Biden. Alors qu’un livre enquête sur des dissimulations concernant le déclin cognitif de l’ancien Président américain s’apprête à être publié cette semaine, son entourage a annoncé dimanche une autre mauvaise nouvelle. Joe Biden, âgé de 82 ans, est atteint d’une « forme agressive » de cancer de la prostate, avec des « métastases osseuses » . Le cancer de la prostate est fréquent et généralement facile à traiter : en France, 93 % des hommes diagnostiqués sont toujours en vie après 5 ans. En revanche, la forme métastatique - celle dont est atteint Joe Biden - est particulièrement préoccupante, comme pour tous les cancers.

L’homme politique, qui a quitté la Maison Blanche en janvier dernier, aurait reçu le diagnostic il y a quelques jours seulement. « La semaine dernière, le président Joe Biden a été examiné pour une nouvelle découverte d’un nodule prostatique après avoir ressenti des symptômes urinaires  de plus en plus importants », renseigne le communiqué officiel de ses services. Ces derniers ont même été jusqu’à préciser le stade de gravité de la tumeur : grade 9 sur 10 du score de Gleason. Dans cette classification utilisée dans le monde entier, plus le grade est élevé, plus le cancer est agressif et moins le pronostic est bon. « Jusqu’au stade 6, ce sont des cancers qui évoluent très lentement. Le grade 7 est intermédiaire et les grades 8, 9 et 10 sont de très mauvais pronostics », souligne le Pr Alexandre de La Taille, chirurgien urologue au CHU de Créteil et président de l’Association française d’urologie.

Des traitements qui prolongent l’espérance de vie

Le médecin est très pessimiste concernant le cas de Joe Biden. « Quand il atteint ce stade, un cancer de la prostate est incurable », estime-t-il. En effet, un cancer circonscrit à la prostate est bien plus simple à traiter (notamment par ablation de l’organe). Mais quand il est repéré alors qu’il s’est déjà disséminé à d’autres organes ou tissus (comme les os dans le cas de Joe Biden), sa traque est beaucoup plus ardue. « Certes, il y a une révolution thérapeutique depuis quinze ans, avec l’arrivée de nouveaux traitements plus puissants qui ralentissent l’évolution de la maladie. Mais malheureusement, ils ne permettent pas de la guérir », poursuit le spécialiste. « C’est exact, mais l’espérance de vie peut rester élevée : regardez François Mitterand, qui a vécu seize ans avec ce cancer avant d’en décéder en 1996 », réagit le Pr Franck Bruyere, chef du service d’urologie du CHRU de Tours.

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L’entourage de Joe Biden semble plus optimiste, et précise dans son communiqué que son cancer « semble être sensible aux hormones, ce qui permet une gestion efficace ». Qu’est-ce que cela signifie ? « En pratique, la quasi-totalité des cancers de la prostate sont hormono-dépendants. C’est-à-dire que leur facteur de croissance numéro un est la testostérone, explique le Pr de La Taille. Avec l’hormonothérapie, il est possible de faire baisser le taux de testostérone et ainsi de limiter la multiplication des cellules tumorales. » Ces traitements, éventuellement combinés à de la chimiothérapie, peuvent prolonger l’espérance de vie de plusieurs années. Avec toutefois des effets indésirables : baisse de la libido, prise de poids, bouffées de chaleur, ostéoporose, troubles de l’érection ou encore irritabilité...

Un cancer passé inaperçu ?

Certains observateurs se sont étonnés de cette annonce survenue rapidement après la fin du mandat de Joe Biden. En effet, la santé des hommes et femmes d’État est généralement surveillée de façon très étroite. Or les cancers de la prostate se développent pendant des années avant de provoquer des symptômes. Comment expliquer que les médecins de la Maison Blanche soient passés à côté d’une telle maladie ? « Je vois deux possibilités : soit Joe Biden a développé une forme très agressive de cancer entre deux bilans, soit il s’agissait d’une tumeur d’évolution très lente et peu agressive qui était surveillée et qui s’est subitement dégradée », suggère le Pr de La Taille.

Le médecin rappelle l’importance de diagnostiquer le plus tôt possible les tumeurs. « C’est le critère qui a le plus d’impact sur l’espérance de vie », souligne-t-il. Le premier pas vers le diagnostic consiste en un toucher rectal et/ou un dosage du PSA par prise de sang. Un taux trop élevé de PSA - cette substance libérée dans le sang par la prostate - peut indiquer la présence d’une anomalie (mais il peut aussi s’agir d’un adénome bénin).

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Cet examen avait un temps fait l’objet d’une controverse car il était notamment accusé d’entraîner des traitements excessifs et inutiles. Désormais, les médecins disposent d’outils plus performants pour distinguer les cancers d’évolution lente (qui doivent simplement être surveillés), de ceux qui doivent absolument être traités. « Il faut demander cet examen remboursé par l’Assurance maladie à son médecin traitant à partir de 50 ans, et à partir de 45 ans pour les hommes afro-antillais et ceux qui ont des cas dans leur famille car ils ont un risque plus élevé de cancer de la prostate, rappelle le Pr de La Taille. Si le PSA est normal, il faut le refaire une fois par an, voire une fois tous les deux ans. S’il est élevé, cela doit inciter à consulter un spécialiste pour réaliser plus d’examens. »

En France, environ 640 000 hommes vivent avec un cancer de la prostate, dont 60 000 nouveaux cas et 9000 décès chaque année. Il s’agit, de loin, du cancer le plus fréquent chez l’homme (un quart des cancers masculins).