Encore une fois, Lara Gut-Behrami est plus intelligente que nous. Soyons honnêtes: nous, les journalistes, les fans de ski alpin, les amateurs de sport, avons tous eu le même raisonnement en apprenant la semaine dernière sa probable grave blessure à un genou. Puisqu’elle allait au-devant d’un hiver sans compétition, et qu’elle avait annoncé que cet hiver serait son dernier au plus haut niveau, alors elle allait annoncer la fin de sa carrière sitôt le diagnostic définitif posé.

Il y avait là comme une évidence. C’était oublier un peu vite que la championne tessinoise de 34 ans a le chic pour bousculer nos certitudes. Pour nous inviter, par ses choix et ses déclarations, à prendre un peu de recul sur nos passions sportives.

C’est désormais confirmé, Lara Gut-Behrami est blessée et ne skiera plus cette saison. Elle sera opérée, puis suivra une rééducation complète. Mais ensuite, seulement ensuite, elle verra ce qui sera le plus fort, entre sa frustration de ne pas avoir terminé sa carrière comme elle le souhaitait et son désir de passer à une nouvelle étape de sa vie. Rien ne presse. Que ce soit pour continuer de foncer entre des portes rouges et bleues ou juste pour vivre sans douleur, il faut commencer par bien se soigner.

Des balises pour les nouvelles générations

C’est là une vérité toute simple. Elle s’est fait une spécialité d’en distiller à longueur d’interviews depuis quelques années. Elle nous dit que le meilleur moyen d’obtenir un résultat, c’est de ne pas y penser, et de se concentrer plutôt sur le geste juste à réaliser. Que si les réseaux sociaux nous font plus de mal que de bien, il vaut mieux les quitter. Qu’il n’y a pas dans la vie que le sport, et qu’une championne peut être heureuse ou triste pour d’autres raisons. Que derrière chaque athlète en quête de performances, il y a une personne qui aspire au bonheur.

Répétés parfois au lieu d’afficher de grandes ambitions ou d’exulter suite à un succès majeur, ces mantras ont souvent été mal reçus. Mais force est de constater qu’ils deviennent des balises pour les nouvelles générations de sportives et de sportifs, qui les reprennent ou s’en inspirent. Quand viendra le temps de tirer le bilan de la carrière de Lara Gut-Behrami, il faudra bien sûr rappeler qu’elle a à peu près tout gagné dans sa discipline: globes de cristal, titres mondiaux, médailles olympiques. Mais il faudra surtout prendre la mesure de cet héritage immatériel. Puisque ce n’est pas pour tout de suite, attendons avec elle.