Language

         

 Publicité par Adpathway

Comment sauver l’Europe ?

2 week_ago 10

         

NE LAISSER PAS LE 5G DETRUIRE VOTRE ADN Protéger toute votre famille avec les appareils Quantiques Orgo-Life®

  Publicité par Adpathway


Par Thomas Fazi – Le 26 juin 2025 – Source Blog de l’auteur

Ce texte est une traduction d’un appel lancé par plusieurs intellectuels de premier plan de la gauche espagnole — Héctor Illueca, Augusto Zamora, Antonio Fernández et Manolo Monereo — initialement publié dans Publico. Ils avancent l’idée d’une confédération d’États-nations pour remplacer l’Union européenne actuelle, rompre avec Washington et l’atlantisme, et rétablir des relations amicales avec la Russie. Bien que j’aie quelques réserves mineures sur leur proposition — notamment sur le fait qu’une telle initiative devrait toujours impliquer des institutions supranationales plutôt que simplement internationales, ce qui est une distinction importante —, je partage globalement l’essentiel de leur argumentation :

Ce qui semblait impensable il y a quelques années seulement est aujourd’hui une réalité tangible : l’Europe est entrée dans une nouvelle phase de réarmement. En termes budgétaires, le bond en avant est colossal et sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale. Les plans de l’UE prévoient une mobilisation pouvant atteindre 800 milliards d’euros à court et moyen terme […].

La décision de l’UE de lancer un plan de réarmement de cette ampleur marque un tournant dans la configuration économique et politique du continent. En effet, contrairement à d’autres initiatives d’urgence telles que le fonds Next Generation EU, qui a mis en place des mécanismes exceptionnels de mutualisation de la dette, le réarmement sera principalement financé par l’émission de dette souveraine par chaque État membre. Cela aura des implications profondes sur les inégalités, la discipline budgétaire et la hiérarchie politique au sein de l’espace européen. Ce choix n’est en aucun cas neutre : en optant pour un système de financement décentralisé, l’UE consacre une architecture asymétrique qui reproduit et aggrave les inégalités existantes en son sein, rappelant les années barbares de la crise financière, lorsque la dette publique est devenue un mécanisme permettant de discipliner les pays périphériques et de les contraindre à mettre en œuvre des coupes sociales sévères. Au lieu de corriger les erreurs du passé, le réarmement européen les reproduit dans un nouveau contexte politico-militaire.

Les peuples d’Europe du Sud savent bien ce que cela signifie : le réarmement pourrait réactiver le modèle testé pendant la crise de la dette souveraine de la zone euro. Des pays comme l’Espagne, l’Italie et la Grèce, dont le niveau d’endettement est structurellement élevé, auront de sérieuses difficultés à financer leur effort de guerre, et il est probable que cet endettement se fera dans des conditions de plus en plus lourdes, limitant leur marge de manœuvre budgétaire et conditionnant leurs décisions budgétaires, reproduisant ainsi une hiérarchie politique imposée par les marchés. Cela signifie que les États les plus solvables pourront développer leurs capacités de défense sans trop de problèmes ; à l’inverse, les États périphériques ne pourront respecter leurs engagements en matière de dépenses militaires que s’ils acceptent des coupes dans d’autres secteurs clés, tels que la santé, l’éducation ou les retraites. Il en résultera une économie de guerre très hiérarchisée, dans laquelle la capacité d’emprunt déterminera la position relative de chaque État dans la répartition effective du pouvoir européen : ceux qui peuvent financer le réarmement mènent ; ceux qui ne le peuvent pas se contentent d’obéir.

Tel qu’il est conçu, le réarmement européen subvertit les priorités publiques et enterre la tradition d’après-guerre du constitutionnalisme social, consolidant un nouveau bloc historique autour des intérêts du capital de guerre. La marge de manœuvre de l’État vis-à-vis des différentes classes sociales deviendra de plus en plus étroite et soumise à des impératifs géostratégiques établis par des instances totalement étrangères à la volonté populaire. Dans ce contexte, on observera une séparation croissante entre le pays légal – les institutions formelles – et le pays réel – les majorités dépossédées –, érodant ainsi la légitimité déjà compromise de l’ordre actuel. Une nouvelle conscience émergera de l’océan de mensonges qui alimente la propagande de guerre. Elle est encore diffuse, fragmentée, voire contradictoire. Mais elle existe et se nourrit de la fatigue, de la détérioration des conditions de vie et d’une mémoire qui conserve encore les échos des résistances passées. Cette conscience ne s’exprimera pas immédiatement sous des formes organisées ou dans des langages anciens. Ce sera un processus lent, irrégulier et troublé. Mais il ouvrira une brèche, et à travers cette brèche, l’histoire pourra s’engouffrer.

Chaque crise recèle en elle la possibilité d’un nouveau départ. La fracture de la constitution matérielle peut ouvrir un cycle politique à long terme orienté vers la redéfinition démocratique du pouvoir. Sous la surface, telle une vieille taupe creusant sans relâche, émerge une conscience critique qui pourrait guider un processus constituant fondé sur la souveraineté populaire, la défense de la paix et la justice sociale. À notre avis, cet engagement ne nécessite pas une rupture avec l’Europe en tant qu’espace politique et historique, mais bien au contraire : la reconstruction de l’Europe sur de nouvelles bases.

Il est nécessaire d’articuler une Europe confédérale capable de dépasser le projet technocratique et post-national de l’UE actuelle. Une Europe qui commence par reconnaître l’État-nation comme un espace indispensable à la démocratie et l’intègre dans un cadre de coopération supranationale fondé sur le respect mutuel et l’existence d’institutions communes. Il ne s’agit pas de revenir aux anciens nationalismes exclusifs, mais plutôt de partir du principe qu’il ne peut y avoir de démocratie sans démos, et que ce n’est que dans le cadre d’une communauté politique organisée, dotée d’une capacité de délibération, de décision et d’autogouvernance, que la volonté générale peut s’exprimer.

Une Europe confédérale nécessite de repenser le continent comme une communauté pluraliste et solidaire, construite de bas en haut, dans laquelle la paix, le droit international et l’égalité entre les États membres sont des principes directeurs. Il ne s’agit pas ici de réflexions théoriques ou de formulations abstraites. Si l’Europe aspire à avoir sa propre voix sur la scène internationale et à cesser d’être un appendice de Washington, il y a au moins trois points essentiels à prendre en considération pour tracer une voie alternative : premièrement, élargir l’espace politique des États afin qu’ils puissent gérer leurs économies nationales en fonction de leurs intérêts spécifiques ; deuxièmement, proposer un traité d’amitié et de coopération avec la Russie qui exprime une volonté de compréhension mutuelle et de collaboration stratégique, en abandonnant la logique de confrontation ; et troisièmement, s’engager à s’intégrer activement dans un monde multipolaire plus équilibré, ouvert à une pluralité de modèles politiques, économiques et culturels. En fin de compte, l’Europe doit choisir si elle veut rester un acteur subordonné, aligné sans condition sur les intérêts américains, ou si elle est prête à participer à la construction d’un monde nouveau et plus équilibré, dans lequel les peuples ont une voix, un rôle et une reconnaissance.

L’Europe doit prendre position, rompre avec sa subordination à l’atlantisme et émerger comme un acteur actif d’un monde en transition qui ne tourne plus autour de Washington, et encore moins autour de Bruxelles. Nous devons retrouver, si possible, l’esprit de Bandung, la conférence de 1955 qui a réuni les pays afro-asiatiques nouvellement indépendants pour proclamer le droit des peuples à déterminer leur propre destin dans un cadre international fondé sur la souveraineté, la paix et la coopération entre égaux. Cette réunion historique a marqué l’émergence d’un sujet collectif sur la scène mondiale, l’annonce d’une géopolitique ascendante qui revendiquait la dignité des peuples libérés du colonialisme.

Plus d’un demi-siècle plus tard, l’Europe a la responsabilité historique d’embrasser cet héritage et de définir sa place dans le monde. Revenir à Bandung signifie construire une relation différente avec les pays du Sud ; reconnaître comme interlocuteurs les peuples – de l’Amérique latine à l’Afrique en passant par l’Asie – qui réclament un nouvel ordre international fondé sur l’égalité, la durabilité et la justice sociale. En bref, cela signifie participer activement à la transformation du monde – la grande tâche de notre époque.

Revenir à Bandung n’est pas un signe de nostalgie du passé, mais un engagement pour l’avenir.

Héctor Illueca, Augusto Zamora, Antonio Fernández et Manolo Monereo

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

390

read-entire-article

         

        

NE LAISSER PAS LE 5G DETRUIRE VOTRE ADN  

Protéger toute votre famille avec les appareils Quantiques Orgo-Life®

  Publicité par Adpathway