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Si l’on se fie à l’ancienneté de cette expression, nombreux sont ceux qui ont un jour rêvé d’embouteiller la foudre. Daniel Fortin-Guichard caresse le même genre d’ambition, mais en version hockey. Grâce à des tests sophistiqués, ce professeur du Département de kinésiologie et d’éducation physique de l’Université McGill tente de développer une méthode fiable pour établir les espoirs dotés du meilleur « sens du jeu », ou du meilleur « QI hockey », comme on dit dans le milieu.
J’espère que je ne trouverai jamais quelque chose qui va remplacer un recruteur. C’est un beau métier dont on a besoin. Il faut que le hockey reste quelque chose d’humain. Je n’ai pas envie qu’on fasse juste passer des joueurs dans des machines et qu’on les choisisse en fonction d’un score. Les équipes seraient bien contentes, mais le plaisir de jouer au hockey serait peut-être moindre, confiait le sympathique chercheur, plus tôt cette semaine, en entrevue.
Je vais trouver ça dommage si je trouve (une façon de remplacer les recruteurs), mais je vais passer ma carrière à essayer, a-t-il ajouté, sourire en coin, quelques minutes plus tard.
Il y a deux semaines, le professeur Fortin-Guichard, à titre d’auteur principal, et plusieurs chercheurs de renom ont publié une étude (1) qui a piqué la curiosité de plusieurs dirigeants d’équipe de la LNH et d’équipe de haut niveau.
Intitulée Beyond the trained eye : An objective method to predict game sense in team sports (qui pourrait se traduire par : Au-delà de l'œil averti : une méthode objective pour prédire le sens du jeu dans les sports d'équipe), cette intéressante étude a été publiée dans le Journal of Sports Sciences. Elle ne visait toutefois pas à remplacer l’expertise des recruteurs. Après tout, il faut y aller une étape à la fois! Son objectif consistait plutôt à fournir aux recruteurs des outils additionnels pour découvrir les joueurs dotés des meilleures intelligences du jeu.
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Cette étude, explique-t-il, était la deuxième étape d’un projet qui a débuté en 2018. Cette année-là, Daniel Fortin-Guichard avait fait un stage de recherche en Australie sous la supervision de Damian Farrow, une sommité dans le domaine de la recherche sur l’acquisition des habiletés.
Après son stage, qui s’est déroulé dans l’univers de l'Australian Football League, M. Fortin-Guichard a approché Patrick Roy, alors patron des Remparts de Québec.
J’ai dit à Patrick qu’en me basant sur le projet de recherche auquel j’avais participé en Australie, je pensais pouvoir aider ses recruteurs à identifier des talents, a-t-il raconté.
Le chercheur s’est alors joint aux Remparts en soutien à leur équipe de recruteurs. Il a été établi qu’il allait pouvoir passer du temps avec chacun des espoirs convoités par l’organisation, afin de les soumettre à divers tests psychologiques (son premier champ d’expertise) et de mesurer leur QI hockey. Une lecture et une compréhension du jeu supérieures à la moyenne sont des facteurs importants permettant de prédire les performances futures d’un athlète.
Et la très imprécise science du recrutement, on s’entend, consiste justement à prédire les performances futures de jeunes athlètes.
En faisant une revue de la littérature scientifique, Daniel Fortin-Guichard a constaté, en 2018, qu’une méthode d’évaluation était constamment citée dans les études : l’occlusion temporelle. En gros, cette tâche consiste à montrer des séquences de jeu à un athlète et à interrompre soudainement l’action. L’athlète, en se basant sur sa compréhension et sur sa lecture du jeu, doit alors prédire comment se déroulera le reste de la séquence.
Cette méthode est notamment utilisée par certaines équipes de la LNH lorsqu’elles rencontrent les principaux espoirs lors de la journée d'évaluation annuelle organisée par la ligue.
Depuis 2018, les espoirs des Remparts ont donc été soumis à des tests d’occlusion temporelle, et cela a mené à certains succès en matière de recrutement. Des joueurs recrutés avec cette méthode ont d’ailleurs remporté la Coupe Memorial avec l’équipe. Toutefois, quand le professeur Fortin-Guichard a terminé ses études postdoctorales, il a eu envie de vérifier si ce type de test était véritablement optimal pour percevoir l’intelligence hockey des joueurs.
C’est là que son projet d’étude a commencé.
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Dans le cadre de cette étude, on a suivi pendant une saison complète une quarantaine de joueurs de 15 ans de haut niveau (catégorie M18 AAA).
Dès le départ, les entraîneurs de ces joueurs provenant de diverses équipes ont été invités à classer chacun de leurs athlètes en fonction de leur QI hockey. Pour que les évaluations soient cohérentes, les entraîneurs les ont faites en fonction d’une définition claire des habiletés recherchées. Par exemple, la capacité de constamment trouver la meilleure option de jeu (avec et sans la rondelle) en maximisant la possession de rondelle et en ayant la capacité de le faire en étant soumis à la pression de l’adversaire, etc.
Les évaluations des entraîneurs, qui sont les mieux placés pour observer le QI hockey de leurs athlètes, ont été comparées aux résultats obtenus à la suite :
- des évaluations de cinq recruteurs de la LHJMQ qui ont assisté aux matchs des joueurs durant toute la saison;
- des résultats de tests cognitifs;
- des résultats obtenus lors de la participation à des jeux d’entraînement cognitifs (suivre des yeux des balles en 3D qui se déplacent à l’écran pour mesurer le niveau d’attention);
- des scores obtenus dans des simulations de jeu faites en réalité virtuelle, au cours desquelles les lectures de jeu et les temps de réaction avant d’effectuer des passes étaient mesurés;
- des tests d’occlusion temporelle (définis plus haut);
- des évaluations et des statistiques avancées extraites après la participation des joueurs à des minimatchs à 3 contre 3 disputés sur la largeur de la patinoire.
Au total, 78 possibles prédicteurs de performances avaient été établis. Une fois les résultats compilés et analysés, il en est ressorti que les trois meilleurs prédicteurs des évaluations faites par les entraîneurs étaient, dans l’ordre :
- les évaluations faites par les recruteurs de la LHJMQ;
- le nombre de passes reçues individuellement par chaque joueur lors des minimatchs à 3 contre 3 (une mesure qui semble confirmer l’importance accordée au fameux « jeu sans la rondelle » que mentionnent constamment les entraîneurs);
- les résultats obtenus lors des simulations faites en réalité virtuelle.
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Si l’on revient à la question de base qui avait servi de fondement au lancement de cette étude, le professeur Fortin-Guichard avait-il raison d’utiliser le test d’occlusion temporelle (les séquences de jeu interrompues à l’écran) pour mesurer le QI hockey des espoirs des Remparts?
Cette méthode, rappelons-le, est fréquemment citée dans la littérature scientifique.
Les résultats indiquent que je n’ai pas eu tort, mais j’aurais pu avoir davantage raison, dit-il.
Parmi les tâches auxquelles ont été soumis les joueurs, un des prédicteurs de performance que nous avons identifiés provenait bel et bien du test d’occlusion temporelle. Mais si on retournait en 2018 et qu’on cherchait le meilleur test hors glace possible, probablement que j’opterais pour un test en réalité virtuelle. C’est un peu plus long et ça nécessite plus de matériel, mais c’est représentatif de ce qu’un recruteur pourrait faire, avec le temps dont il dispose, pour parfaire son évaluation d’un joueur, explique-t-il.
Les résultats obtenus dans le cadre de cette nouvelle étude ouvrent maintenant la porte à toutes sortes de nouvelles possibilités. Qu’adviendrait-il si on étudiait une plus grande cohorte? Ou un groupe de joueurs plus âgés? Ou des espoirs de haut niveau provenant d’un bassin de développement différent, comme celui du hockey féminin?
Voilà le genre d’étude dont raffolent désormais les équipes professionnelles, qui investissent de plus en plus dans la science et dans leurs départements d’analyse de données pour bénéficier d’un avantage compétitif.
Le professeur Fortin-Guichard est fort populaire dans le milieu par les temps qui courent. Toutefois, il est conscient qu’il y a encore beaucoup de travail à faire avant de parvenir à mesurer avec précision et à embouteiller l’insaisissable QI hockey.
1 : Daniel Fortin-Guichard, Kathryn Johnston, Thomas Romeas, Magdalena Wojtowicz, Jean Lemoyne, David L. Mann, Simon Grondin & Joseph Baker (17 Apr 2025) : Beyond the trained eye : An objective method to predict game sense in team sports, Journal of Sports Sciences, DOI: 10.1080/02640414.2025.2491976