La nomination de Robert F. Kennedy Jr. à la tête du Département américain de la Santé suscite de vives inquiétudes parmi les chercheurs spécialisés dans l'autisme. Lors d'une récente conférence de presse, RFK Jr. a relancé des théories réfutées depuis longtemps, qualifiant l'augmentation des diagnostics d'autisme « d'épidémie » principalement due à des facteurs environnementaux. Ces déclarations controversées interviennent alors que les données scientifiques établissent clairement une forte composante génétique. Cette confrontation entre opinions personnelles et faits scientifiques met en lumièrelumière les dangers de la désinformation dans un domaine aussi sensible que les troubles neurodéveloppementaux.

Les propos controversés de RFK Jr. sur l'autisme

Robert F. Kennedy Jr. a récemment fait des déclarations alarmistes concernant ce qu'il considère comme une « épidémie » d'autisme. S'appuyant sur les dernières données des Centers for Disease Control and Prevention (CDC ou en français « Centres pour le contrôle et la préventionprévention des maladies ») qui indiquent qu'un enfant américain sur 31, né en 2014, est aujourd'hui diagnostiqué autiste, il attribue cette hausse principalement à des facteurs environnementaux nocifs.

Le nouveau responsable de la Santé américain a annoncé vouloir mener sa propre enquête sur les causes de l'autisme d'ici septembre 2025. Sa méthodologie soulève pourtant de sérieuses questions, notamment parce qu'il envisage de visiter des pistes déjà invalidées par la recherche scientifique, comme un lien potentiel entre les échographies prénatales et l'autisme.

Plus préoccupant encore, RFK Jr. prévoit de relancer l'hypothèse d'un lien entre le vaccin RORvaccin ROR (rougeolerougeole-oreillonsoreillons-rubéole) et le trouble du spectrespectre autistique, une théorie pourtant définitivement réfutée par de nombreuses études à grande échelle. Pour mener cette enquête, il aurait confié cette mission à une personne connue pour son scepticisme envers la vaccinationvaccination, et qui aurait même été radiée de l'ordre des médecins.

La réalité scientifique derrière l'augmentation des diagnostics

La communauté scientifique s'oppose fermement aux affirmations de RFK Jr. en présentant des explications bien plus rationnelles à l'augmentation observée des cas d'autisme. L'évolution des critères diagnostiques constitue le facteur explicatif principal de cette hausse apparente.

L'histoire du diagnostic de l'autisme révèle des changements majeurs au fil des décennies :

• avant 1980, l'autisme était considéré comme une « réaction schizophrénique infantile » ;
• en 1987, élargissement des critères pour inclure trois dimensions : interaction sociale, communication et restriction des activités ;
• en 1994, intégration du syndrome d'Aspergersyndrome d'Asperger ;
• en 2013, possibilité de diagnostiquer simultanément un TSA et un TDAH.

Une étude révélatrice de 2015 portant sur les enfants américains scolarisés dans des programmes spécialisés montre que le nombre d'enfants diagnostiqués autistes a quadruplé entre 2000 et 2010, passant de 93 624 à 419 647. Parallèlement, le nombre d'élèves identifiés comme souffrant de déficience intellectuelle a diminué de 637 270 à 457 478 sur la même période, suggérant une reclassification diagnostique plutôt qu'une véritable augmentation de prévalenceprévalence.

La disparité géographique des diagnostics renforce cette thèse. La Californie enregistre un taux de 53,1 pour 1 000 enfants contre seulement 9,1 pour 1 000 au Texas, un écart que les CDC attribuent aux différences de politiques de dépistagedépistage et de déstigmatisation, non à des facteurs environnementaux locaux.

Les véritables causes du trouble du spectre autistique

Le trouble du spectre de l'autisme (TSA) est un trouble du neurodéveloppement aux manifestations variées. Contrairement aux affirmations simplistes, les chercheurs ont identifié une origine multifactorielle avec une prédominance génétique claire.

Annette Estes, directrice du Centre de l'autisme de l'Université de Washington, explique cette complexité : « Contrairement à la trisomie 21, pour laquelle une anomalieanomalie génétique clairement identifiée permet un diagnostic précis, l'autisme ne se laisse pas appréhender aussi simplement, malgré des avancées remarquables ».

Les données scientifiques actuelles montrent que :

1. entre 60 et 90 % des cas d'autisme présentent une origine héréditaire ;
2. des mutations génétiques spécifiques sont identifiables dans 40 % des cas ;
3. certains facteurs environnementaux peuvent jouer un rôle secondaire, notamment des infections survenues in utero ;
4. les outils de dépistage recommandés par l'American Academy of Pediatrics permettent une détection précoce entre 18 et 24 mois.

La propagation de théories non fondées par des personnalités influentes comme RFK Jr. risque de détourner les ressources de recherche des véritables causes et traitements potentiels, tout en stigmatisant davantage les personnes autistes et leurs familles. Face à cette désinformation croissante, la vigilance de la communauté scientifique reste essentielle pour défendre les faits établis par des décennies de recherche rigoureuse.