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”Dans 50 ans, nous aurons certainement colonisé la Lune. Une économie importante se développera sur ce nouveau continent”

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Ce 31 mai, l'Agence spatiale européenne fête ses cinquante ans. Cette organisation intergouvernementale est responsable de l'activité spatiale (vols habités, missions scientifiques, satellites de communication et d'observation de la Terre…) pour 23 pays du continent européen dont la Belgique. Après un demi-siècle, quels sont ses succès, ses échecs et ses nouveaux défis ? Étonnamment, l'enjeu qui a mené à sa création il y a cinq décennies n'a jamais été autant d'actualité, notamment dans le cadre des bouleversements entraînés par la nouvelle Administration Trump. C'est ce que souligne le patron de l'Esa, l'Autrichien Josef Aschbacher, lors d'un long entretien accordé à La Libre.

Quel était le contexte de la création de l'agence en mai 1975 ?

La France et l'Allemagne avaient développé un satellite de communication, qu'elles souhaitaient lancer avec les États-Unis. Les États-Unis ont répondu qu'ils ne le lanceraient que s'il n'était pas utilisé à des fins commerciales, mais uniquement pour nos propres besoins nationaux. La France et l'Allemagne se sont dit alors qu'il était impossible qu'un autre pays décide de ce que nous faisons de notre technologie et qu'il nous fallait notre propre lanceur. L'Esa a été créée pour construire un lanceur, qui a été la principale motivation de la fusion ds deux organisations préexistantes. L'Esa a donc été créée pour répondre à notre besoin d'indépendance. Et aujourd'hui encore, nous avons besoin de davantage d'autonomie et d'indépendance. Cela signifie donc que la raison même de sa création est toujours valable, et peut-être plus que jamais.

ESA

Le directeur général de l'Esa tient en main un fac-similé de la Convention signée le 30 mai 1975 par les premiers Etats membres de l'Esa. L'Esa est de facto rentrée en fonctionnement le lendemain, le 31 mai. ©ESA

Pour quelle(s) raison(s) précisément ?

L'Europe a besoin d'être plus autonome et indépendante en matière de défense et dans le domaine technologique en général, y compris spatial. Il y a un nouveau contexte géopolitique : d'une part, la guerre en Ukraine et d'autre part, les messages provenant des États-Unis. La proposition budgétaire de la Maison-Blanche pour la Nasa (en baisse de 24%, lire aussi plus pas), publiée le 2 mai, constitue le point de départ de négociations. Nous n'en connaissons pas encore l'issue, mais c'est une première indication. Il s'agit d'une discussion budgétaire interne aux États-Unis, dans laquelle nous ne voulons pas interférer. L'Esa est néanmoins très exposée, car nous travaillons avec les États-Unis sur de nombreux projets, et tout impact sur le budget américain aura des conséquences pour nous. Si ce budget provisoire est finalement adopté, cela accroît le besoin d'une plus grande indépendance en Europe, mais cette nécessité est plus générale.

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Regrettez-vous cette dépendance persistante de l'Europe et de l'Esa aux États-Unis, en particulier pour l'exploration spatiale ?

Soyons clairs : la majorité des programmes de l'Esa ne dépendent pas du budget des États-Unis. Je dirais qu'environ 90 à 95 % de nos activités sont menées par nos États membres. Copernicus, Galileo, Euclid, etc. Nous les menons tout seuls ! Bien sûr, une grande partie de nos activités d'exploration sont menées avec les États-Unis, mais il y en a d'autres sans eux. Le service de retour de fret lunaire Leo, l'atterrisseur lunaire Argonaut, l'infrastructure de communication à la surface de la Lune Moonlight…

Durant ces 50 ans d'existence de l'Esa, quelle a été à vos yeux la principale difficulté à surmonter ?

Pendant ces 50 dernières années, nous avons connu de nombreux moments difficiles. L'une des plus grandes déceptions est que, dans les années 90, l'Europe a abandonné le programme Hermes, c'est-à-dire les vols spatiaux habités. L'Europe avait en effet lancé un programme de vol spatial à la fin des années 80, puis dans les années 90, il a soudainement été arrêté. La raison ? Cela se passait à la même période que la réunification entre l'Allemagne de l'Est et de l'Ouest, un processus qui a coûté beaucoup d'argent à l'Allemagne. Elle ne pouvait donc plus se permettre de mener un programme spatial habité, et le manque de financement a finalement mis fin au programme. C'était une véritable déception, et nous en souffrons encore, car aujourd'hui, l'Europe ne dispose pas de capacité de vol spatial habité. Nous volons avec la Nasa. Nous volions avec la Russie par le passé, mais c'est terminé (suite à l'invasion de l'Ukraine, NdlR). Et avec la Nasa, cela devient aussi très compliqué. Nous constatons donc que nous n'avons pas la capacité à nous seul d'envoyer des astronautes dans l'espace, vers la station spatiale, vers la Lune… C'est une décision dont l'Europe souffre encore. Aujourd'hui, je vois que la Chine est capable de lancer des astronautes, les États-Unis et la Russie aussi, bien sûr. J'étais en Inde il y a peu. Leur programme spatial est très ambitieux. Cette année, ils lanceront une capsule habitable et un lanceur sans astronaute pour tester leur technologie. Et ils prévoient de faire voler un astronaute, en fonction, bien sûr, du vol d'essai de cette année, dans un ou deux ans. L'Inde pourrait donc envoyer des astronautes dans l'espace, contrairement à l'Europe ! Pour moi, ce n'est pas une bonne situation ! C'est donc un problème que nous devons corriger. Mais cela nécessite évidemment des décisions politiques.

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Techniquement, ce serait possible ?

Oui – et nous développons déjà d'ailleurs plusieurs "briques" afin d'avoir des capacités futures – mais nous avons besoin d'investissements. Bien sûr, il faut un programme, un projet pour investir et le réaliser, mais ce n'est pas si impossible. Ce que cela coûterait ? C'est difficile à estimer, mais ce n'est certainement qu'une fraction de notre budget actuel. Il ne s'agit donc pas de doubler, ni de tripler le budget. Je ne veux pas donner de chiffres, mais ce serait abordable. Si l'on voulait envoyer nous-mêmes un astronaute européen sur la Lune, le coût représenterait environ 30 à 40 % de notre budget, en plus de celui dont nous disposons aujourd'hui, pour y parvenir sur une quinzaine d'années. Cela donne donc un ordre de grandeur : un simple vol vers l'espace, jusqu'à la station spatiale, d'un astronaute européen serait bien moins cher.

ESA

Josef Aschbacher est le patron de l'Agence spatiale européenne, qui regroupe 23 pays dans la Belgique. ©ESA

Mettre fin à la dépendance vis-à-vis d'une autre puissance constitue un bon argument auprès des Etats membres pour se lancer dans un tel projet?

Absolument. L'autonomie stratégique devient de plus en plus un argument. Elle l'a toujours été, mais avec la nouvelle situation géopolitique, elle devient de plus en plus importante. Disposer de ses propres capacités, de la technologie nécessaire, et pouvoir faire ce qu'il faut pour avoir sa propre indépendance stratégique, c'est un enjeu de plus en plus important.

Par ailleurs, si vous avez des capacités à offrir, vous êtes d'ailleurs aussi un partenaire très attractif pour d'autres. De nombreux pays nous contactent et nous disent : "Nous aimerions collaborer avec vous." L'Esa est une organisation très solide. Nous avons de nombreux projets intéressants dans les domaines de l'observation de la Terre, des télécommunications, de la navigation, et bien d'autres domaines qui pourraient être définis ensemble. Et l'intérêt est vif. […] L'Europe excelle dans de nombreux domaines spatiaux : l'observation de la Terre, la navigation, les sciences spatiales, les technologies, la défense planétaire... Copernicus est ainsi le système d'observation de la Terre le plus sophistiqué au monde... L'Europe est reconnue à l'étranger comme un pôle spatial d'excellence, mais est malheureusement limitée en termes de financement. Elle est donc très vulnérable et fragile dans son évolution future. Mon message aux décideurs européens est que l'Europe spatiale est excellente, mais très fragile. Si nous n'investissons pas davantage, nous risquons de perdre des industries, des compétences et des talents.

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"En 50 ans, il y a eu beaucoup de missions passionnantes. Si je devais en citer une : sans hésiter, l'atterrissage de la sonde Rosetta sur une comète en 2014. Ce succès était si spectaculaire que la nouvelle était partout : États-Unis, Chine, Russie…"

Pour en revenir aux États-Unis, Mars fait désormais partie de leurs priorités. Doit-on les suivre sur ce chemin ?

C'est la priorité exprimée par Donald Trump lors de son discours d'inauguration. C'est quelque chose dont nous discuterons entre États membres de l'Esa. Mais je suppose que ceux-ci accorderont pour leur part la priorité absolue à la Lune et investiront réellement dans son exploration. Nous aurons des missions (sondes ou robots, NdlR) sur Mars, mais je doute que nous investissions réellement dans une mission habitée vers Mars. Je pense que cela prendra plus de temps, du moins du côté européen, car les défis sont immenses et, par conséquent, les moyens nécessaires sont considérables. Je recommanderais donc sans hésiter, en tant que directeur général de l'Esa, d'acquérir d'abord de l'expérience et de développer des technologies sur la surface lunaire, donc d'explorer la Lune, avant de s'engager véritablement sur Mars. Mais nos chemins ne vont pas se séparer, les États-Unis continueront de mener des activités lunaires. Je ne pense pas qu'ils abandonneront la Lune. La Lune est une étape cruciale pour de nombreux domaines, notamment pour le développement technologique. Peut-être moins que prévu initialement, mais il y aura toujours des activités lunaires. Je m'attends donc à ce que les États-Unis poursuivent leurs activités lunaires, tout en se concentrant sur Mars.

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Puisque nous fêtons les cinquante ans de l'Esa, à quoi ressemblera selon vous l'exploration spatiale dans 50 ans ?

Dans 50 ans, nous aurons certainement colonisé la Lune. Une économie lunaire importante s'y développera, avec de nombreuses interactions et transactions, mais aussi des problèmes, c'est certain. Mais il y aura aussi beaucoup d'activité sur ce "nouveau continent". L'Europe sera certainement présente, et elle jouera un rôle important, grâce à son industrie et à ses institutions publiques. Je pense que l'industrie deviendra de plus en plus l'acteur principal du développement de cette économie lunaire.

Deuxième point : en 2075, nous serons sur Mars. Il y aura des humains sur Mars, c'est sûr. Peut-être des centaines. Il est difficile de prédire quand le premier humain volera vers Mars, mais d'ici là, nous maîtriserons certaines technologies que nous ne maîtrisons pas aujourd'hui. Pour voler vers Mars, il faut bien sûr une propulsion plus rapide que celle dont nous disposons aujourd'hui. Probablement donc une propulsion nucléaire pour réaliser le voyage non pas en six ou huit mois, mais en deux ou trois mois. Bien sûr, nous devons disposer des systèmes de survie nécessaires aux astronautes, car les radiations cosmiques sont très dangereuses. Une station orbitale pourrait aussi être nécessaire pour faire escale, soit pour le ravitaillement en carburant, soit pour que les astronautes fassent des réajustements nécessaires, mais techniquement, ce sera certainement maîtrisé d'ici là.

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Et bien sûr, nous explorerons également d'autres planètes. L'Esa prépare déjà une mission passionnante. Elle atterrira vers 2050 sur Encelade, une lune glacée de Saturne. Nous aimerions voir si des traces de vie pourraient se trouver sous la couche de glace. Nous observerons également Mars sous sa surface avec notre rover Rosalind Franklin, mais d'ici à 2075, nous saurons si nous avons découvert des traces de vie, ou des formes de vie, par exemple dans les océans des lunes glacées. Peut-être qu'en 2075, nous aurons découvert de la vie quelque part dans le système solaire, hors de notre planète. Ou peut-être pas !

La Nasa à la diète ? De lourds impacts possible pour l'Europe

Le budget provisoire pour la Nasa (en baisse de 24 % par rapport à 2025) prévoit l'annulation de projets réalisés avec l'Esa : le retour d'échantillons de Mars, la construction du module de service européen de la capsule Orion après la mission lunaire habitée Artemis 3, ainsi que la station en orbite lunaire Gateway. La collaboration lunaire permet(tait) d'obtenir en échange de la part de la Nasa des vols d'astronautes européens vers la Lune. Ce budget proposé par la Maison-Blanche doit à présent être négocié avec le Congrès, en vue d'un vote à l'automne. "Une fois le budget consolidé, nous discuterons avec nos États membres. Comment sortir renforcés de cette situation et non pas affaiblis ? Si cela change, nous nous adapterons en conséquence", promet Josef Aschbacher, qui assure que "les États-Unis sont toujours un partenaire fiable. Je nous vois toujours collaborer avec eux. La question est de savoir dans quelle mesure et dans quels domaines". Dans la nuit de vendredi à samedi, soit après la réalisation de cet interview, la Maison-Blanche a dévoilé de nouveaux détails de sa proposition de budget pour les programmes scientifiques de la Nasa, en particulier : la baisse du budget est de 47%, avec notamment l'annulation du support fourni par la Nasa pour le rover martien européen Rosalind Franklin (vaisseau de lancement, propulseurs...) ainsi que le radar pour la mission de l'Esa vers Vénus, EnVision.

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